Calcul de la force de renversement d’un mur

Calcul de la force de renversement d’un mur

Calcul de la force de renversement d’un mur

Contexte : Les murs de soutènement, ouvrages essentiels du Génie Civil.

En géotechnique, un mur de soutènement est une structure conçue pour retenir les terres sur une surface quasi verticale. Ils sont omniprésents dans nos infrastructures : routes, voies ferrées, aménagement de terrains, quais, etc. L'un des risques majeurs de défaillance est le renversementMode de rupture où le mur bascule autour de son pied (ou pointe) sous l'effet de la poussée des terres. La stabilité est assurée par le poids propre du mur qui crée un moment stabilisateur.. Il est donc impératif pour un ingénieur de savoir quantifier les forces en jeu (la poussée des terres qui cherche à renverser le mur, et le poids du mur qui le stabilise) pour garantir un coefficient de sécurité adéquat. Cet exercice vous guidera à travers cette vérification fondamentale.

Remarque Pédagogique : Cet exercice est une application directe de la mécanique des sols, en particulier la théorie de la poussée des terres de Rankine. Nous allons utiliser les caractéristiques du sol et la géométrie du mur pour calculer des moments (un moment "moteur" et un moment "résistant") et les comparer. C'est la démarche de base pour le dimensionnement de tout ouvrage de soutènement.


Objectifs Pédagogiques

  • Calculer le coefficient de poussée active des terres selon la théorie de Rankine.
  • Déterminer la force de poussée résultante exercée par le sol sur le mur.
  • Calculer le moment de renversement généré par la poussée des terres.
  • Calculer le poids du mur et le moment stabilisateur qu'il génère.
  • Vérifier la stabilité au renversement en calculant le coefficient de sécurité.

Données de l'étude

On étudie la stabilité au renversement d'un mur-poids en béton de section trapézoïdale. Il retient un massif de sable sec et horizontal. On néglige la butée des terres à l'avant du mur pour une approche sécuritaire. Les données du projet sont les suivantes :

Schéma du Mur de Soutènement
H = 3.5 m B = 1.5 m b = 1.0 m Pression Pa H/3 A
Paramètre Symbole Valeur Unité
Hauteur du mur \(H\) 3.5 \(\text{m}\)
Largeur de la base \(B\) 1.5 \(\text{m}\)
Largeur en crête \(b\) 1.0 \(\text{m}\)
Angle de frottement interne du sol \(\phi'\) 30 \(\text{degrés}\)
Poids volumique du sol \(\gamma_{\text{sol}}\) 18 \(\text{kN/m}^3\)
Poids volumique du béton \(\gamma_{\text{béton}}\) 25 \(\text{kN/m}^3\)

Questions à traiter

  1. Calculer le coefficient de poussée active des terres \(K_a\).
  2. Calculer la force de poussée active totale \(P_a\) par mètre linéaire de mur.
  3. Calculer le moment de renversement \(M_{\text{renv}}\) par rapport au point A.
  4. Calculer le poids du mur \(W\) et le moment stabilisateur \(M_{\text{stab}}\) par rapport au point A.
  5. Calculer le coefficient de sécurité au renversement \(F_s\) et conclure sur la stabilité du mur.

Les bases de la Poussée des Terres

Avant la correction, revoyons les concepts de la théorie de Rankine pour la poussée des terres.

1. Le Coefficient de Poussée Active (\(K_a\)) :
Quand un mur s'éloigne légèrement du sol qu'il retient, le sol se décomprime et entre dans un état d'équilibre "actif". Le coefficient \(K_a\) est le rapport entre la contrainte horizontale et la contrainte verticale dans cet état. Pour un sol sans cohésion, avec un remblai horizontal et un mur vertical à parement lisse (hypothèses de Rankine), il est donné par : \[ K_a = \tan^2\left(45^\circ - \frac{\phi'}{2}\right) = \frac{1 - \sin(\phi')}{1 + \sin(\phi')} \]

2. La Force de Poussée Active (\(P_a\)) :
La contrainte de poussée active à une profondeur \(z\) est \(\sigma'_{\text{a}}(z) = K_a \cdot \gamma_{\text{sol}} \cdot z\). La distribution est donc triangulaire. La force résultante \(P_a\) est l'aire de ce triangle : \[ P_a = \frac{1}{2} K_a \gamma_{\text{sol}} H^2 \] Cette force s'applique au tiers de la hauteur H, à partir de la base.

3. Le Coefficient de Sécurité au Renversement (\(F_s\)) :
C'est le rapport entre les moments qui empêchent le mur de basculer (moments stabilisateurs) et les moments qui tendent à le faire basculer (moments de renversement), calculés par rapport au point de pivot potentiel (la pointe avant du mur, point A). \[ F_s = \frac{\sum M_{\text{stabilisateurs}}}{\sum M_{\text{renversement}}} \] Un coefficient de sécurité de 1.5 est généralement considéré comme un minimum acceptable dans les normes (ex: Eurocode 7).


Correction : Calcul de la force de renversement d’un mur

Question 1 : Calculer le coefficient de poussée active (Ka)

Principe (le concept physique)

Le coefficient Ka traduit la proportion de la contrainte verticale (due au poids des terres) qui se transforme en contrainte horizontale poussant sur le mur. Un sol "bon" (avec un angle de frottement élevé) se tient mieux de lui-même et aura un Ka faible. Un sol "mauvais" (sable lâche, argile molle) aura un Ka plus élevé, signifiant qu'il pousse plus fort horizontalement.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

La mécanique des sols définit trois états de contrainte horizontale : au repos (\(K_0\)), actif (\(K_a\)) et passif (\(K_p\)). L'état actif, le plus faible, est mobilisé lorsque le mur peut se déplacer légèrement vers l'extérieur. La théorie de Rankine est une méthode simple pour évaluer \(K_a\) en supposant qu'il n'y a pas de frottement entre le mur et le sol, une hypothèse souvent sécuritaire pour les murs-poids.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Imaginez un tas de sable sec. L'angle que forme le tas avec l'horizontale est l'angle de frottement \(\phi'\). Plus cet angle est élevé, plus le sable est "stable". Le coefficient \(K_a\) est directement lié à cette propriété : un sable qui peut former un tas abrupt (grand \(\phi'\)) poussera moins sur un mur qu'un sable qui s'étale (petit \(\phi'\)).

Normes (la référence réglementaire)

L'Eurocode 7 (Calcul géotechnique) régit la conception des ouvrages de soutènement. Il ne prescrit pas une seule formule, mais définit les principes de calcul, les états limites à vérifier (ULS - Ultimate Limit State) et les coefficients de sécurité partiels à appliquer sur les actions (poussée) et les résistances (poids).

Formule(s) (l'outil mathématique)

Selon la théorie de Rankine pour un remblai horizontal et un mur à parement vertical :

\[ K_a = \tan^2\left(45^\circ - \frac{\phi'}{2}\right) \]
Hypothèses (le cadre du calcul)

On utilise les hypothèses de Rankine : le sol est homogène et isotrope, le remblai est horizontal, le parement du mur en contact avec le sol est vertical et lisse (pas de frottement mur-sol), et le mur est suffisamment flexible pour permettre au sol d'atteindre l'état actif.

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Angle de frottement interne du sol, \(\phi' = 30^\circ\)
Astuces(Pour aller plus vite)

Pour \(\phi' = 30^\circ\), une valeur très commune pour les sables, \(K_a\) vaut toujours 1/3. C'est une valeur à mémoriser car elle revient très souvent dans les exercices et les pré-dimensionnements rapides.

Schéma (Avant les calculs)
Angle de Frottement et État Actif
Angle phi'Un sol avec un angle phi' élevé pousse moins.
Calcul(s) (l'application numérique)

On applique la formule avec l'angle de frottement donné.

\[ \begin{aligned} K_a &= \tan^2\left(45^\circ - \frac{30^\circ}{2}\right) \\ &= \tan^2(45^\circ - 15^\circ) \\ &= \tan^2(30^\circ) \\ &\approx (0.577)^2 \\ &\approx 0.333 \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Coefficient de Poussée Calculé
Ka ≈ 0.333
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Un Ka de 0.333 (soit 1/3) est une valeur classique pour un sable standard avec un angle de frottement de 30°. Cela signifie que la poussée horizontale en un point est égale à un tiers du poids des terres au-dessus de ce point (la contrainte verticale).

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Assurez-vous que votre calculatrice est bien en mode "degrés" pour le calcul de l'angle. Une erreur fréquente est d'utiliser des radians, ce qui donnerait un résultat complètement faux. Vérifiez aussi que vous utilisez la bonne formule (le signe "-" pour la poussée active Ka, et un "+" pour la butée passive Kp).

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • \(K_a\) est un coefficient sans dimension qui dépend uniquement de l'angle de frottement \(\phi'\).
  • Plus \(\phi'\) est grand (bon sol), plus \(K_a\) est petit (poussée faible).
  • La formule de Rankine est une simplification qui donne un premier ordre de grandeur fiable.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Pour les sols cohérents comme les argiles, le calcul est plus complexe. La cohésion (\(c'\)) a un effet stabilisateur et réduit la poussée. Le diagramme de pression n'est plus un simple triangle et peut même être négatif en surface, indiquant que le sol pourrait tenir verticalement sur une petite hauteur sans support (phénomène de "fissure de traction").

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
Le coefficient de poussée active \(K_a\) est d'environ 0.333.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Quel serait le coefficient Ka pour un sol de meilleure qualité avec \(\phi' = 35^\circ\) ?

Question 2 : Calculer la force de poussée active (Pa)

Principe (le concept physique)

La contrainte de poussée augmente avec la profondeur (car le poids des terres au-dessus augmente). Cela crée un diagramme de pression triangulaire. La force totale, Pa, est la résultante de toutes ces petites pressions sur la hauteur du mur ; elle correspond simplement à l'aire de ce triangle de pression.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

La contrainte verticale effective à une profondeur z est \(\sigma'_{\text{v}} = \gamma_{\text{sol}} \times z\). La contrainte horizontale active est donc \(\sigma'_{\text{a}} = K_a \times \sigma'_{\text{v}} = K_a \gamma_{\text{sol}} z\). C'est une fonction linéaire de z. L'intégration de cette contrainte sur toute la hauteur H (ce qui revient à calculer l'aire du triangle) donne la force totale par unité de longueur du mur.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Pensez à la pression de l'eau dans une piscine. Elle est nulle en surface et maximale au fond. La force sur la paroi est l'aire du diagramme de pression triangulaire. C'est exactement le même principe pour un sol sec. Le poids volumique du sol (\(\gamma_{\text{sol}}\)) joue le même rôle que le poids volumique de l'eau.

Normes (la référence réglementaire)

L'Eurocode 7 exige que les calculs soient menés en utilisant les valeurs caractéristiques des propriétés des sols (\(\phi'_{\text{k}}, \gamma_{\text{k}}\)). Ces valeurs sont choisies de manière prudente à partir des résultats d'essais en laboratoire et in-situ pour représenter une estimation pessimiste des propriétés du terrain.

Formule(s) (l'outil mathématique)

La force de poussée est l'aire du diagramme de contrainte triangulaire :

\[ P_a = \frac{1}{2} K_a \gamma_{\text{sol}} H^2 \]
Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose que le poids volumique du sol est constant sur toute la hauteur, qu'il n'y a pas de nappe phréatique (sol sec) et qu'il n'y a pas de surcharges en surface du remblai (comme du trafic ou des bâtiments).

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Coefficient de poussée, \(K_a = 0.333\)
  • Poids volumique du sol, \(\gamma_{\text{sol}} = 18 \, \text{kN/m}^3\)
  • Hauteur du mur, \(H = 3.5 \, \text{m}\)
Astuces(Pour aller plus vite)

Le calcul se résume à "aire du triangle" : 1/2 × base × hauteur. Ici, la "hauteur" du triangle est H, et la "base" du triangle de pression est la contrainte en bas du mur, \(\sigma'_{\text{a,max}} = K_a \gamma_{\text{sol}} H\). La force est donc \(1/2 \times (\sigma'_{\text{a,max}}) \times H\), ce qui redonne bien la formule.

Schéma (Avant les calculs)
Diagramme Triangulaire des Pressions Actives
Pression maxPa = ?
Calcul(s) (l'application numérique)

On calcule la force par mètre linéaire de mur, en utilisant des unités cohérentes (kN et m).

\[ \begin{aligned} P_a &= \frac{1}{2} \times 0.333 \times 18 \, \text{kN/m}^3 \times (3.5 \, \text{m})^2 \\ &= \frac{1}{2} \times 0.333 \times 18 \times 12.25 \, \text{kN/m} \\ &\approx 36.71 \, \text{kN/m} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Force de Poussée Résultante
Pa ≈ 36.7 kN/mH/3
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Pour chaque mètre de longueur, le mur doit résister à une force horizontale d'environ 36.71 kN, soit l'équivalent du poids d'environ 3.7 tonnes. C'est cette force qui cherche à faire basculer le mur et à le faire glisser sur sa base.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

N'oubliez pas le carré sur la hauteur H ! C'est l'erreur la plus fréquente. La force de poussée est très sensible à la hauteur du mur. Si vous doublez la hauteur, la force est multipliée par quatre (\(2^2\)). Assurez-vous aussi de la cohérence des unités (kN/m³ et m doivent donner des kN/m).

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • La poussée des terres génère un diagramme de pression triangulaire.
  • La force résultante \(P_a\) est l'aire de ce triangle.
  • La force \(P_a\) est proportionnelle au carré de la hauteur \(H^2\).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Si une surcharge uniforme \(q\) (comme une route) est appliquée sur le remblai, elle crée une pression rectangulaire supplémentaire \(\sigma'_{\text{q}} = K_a \cdot q\) qui s'ajoute à la pression triangulaire du sol. La force de poussée totale est alors plus grande et son point d'application remonte.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
La force de poussée active totale est d'environ 36.71 kN/m.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Si le mur faisait 4.0 m de haut, quelle serait la nouvelle force de poussée Pa (en kN/m) ?

Question 3 : Calculer le moment de renversement (Mrenv)

Principe (le concept physique)

Le moment est une mesure de la tendance d'une force à provoquer une rotation. Le moment de renversement est créé par la force de poussée Pa qui s'applique à une certaine hauteur (son "bras de levier") par rapport au point de pivot potentiel du mur (le point A). Plus la force est grande ou plus elle s'applique haut, plus le moment de renversement est important.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

Le point d'application de la résultante d'une charge triangulaire se situe au centre de gravité du triangle, c'est-à-dire à un tiers de sa hauteur depuis sa base la plus large. Le bras de levier de la force \(P_a\) par rapport à la base du mur est donc \(H/3\). Le moment est le produit vectoriel de la force et du bras de levier, mais en 2D, il se simplifie en \(M = F \times d\).

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Imaginez essayer de faire basculer une armoire. Il est beaucoup plus facile de la renverser en poussant tout en haut qu'en poussant tout en bas. C'est le principe du bras de levier. La poussée des terres, s'appliquant en moyenne assez haut (à H/3), a un effet de renversement significatif.

Normes (la référence réglementaire)

Dans les calculs selon l'Eurocode 7, le moment de renversement est considéré comme une "action". Selon l'approche de calcul choisie, on peut lui appliquer un coefficient de sécurité partiel (par exemple, \(\gamma_F = 1.35\)) pour obtenir le moment de calcul à comparer au moment résistant de calcul.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Le moment est la force multipliée par son bras de levier. Pour un diagramme triangulaire, la force Pa s'applique à H/3 de la base.

\[ M_{\text{renv}} = P_a \times \left(\frac{H}{3}\right) \]
Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose que le mur, s'il bascule, pivotera autour de la pointe avant de sa fondation (le point A). C'est l'hypothèse standard pour l'analyse du renversement.

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Force de poussée, \(P_a = 36.71 \, \text{kN/m}\)
  • Hauteur du mur, \(H = 3.5 \, \text{m}\)
Astuces(Pour aller plus vite)

En combinant les formules, on peut voir que \(M_{\text{renv}} \propto H^3\). Cela signifie que le moment de renversement est extrêmement sensible à la hauteur du mur. Si vous doublez la hauteur, le moment est multiplié par huit (\(2^3\)) ! C'est pourquoi les murs très hauts nécessitent des conceptions beaucoup plus robustes.

Schéma (Avant les calculs)
Moment de Renversement autour du Point A
PaAMrenv = ?
Calcul(s) (l'application numérique)

Le bras de levier est H/3.

\[ \begin{aligned} M_{\text{renv}} &= 36.71 \, \text{kN/m} \times \left(\frac{3.5 \, \text{m}}{3}\right) \\ &= 36.71 \times 1.167 \, \text{kN} \cdot \text{m/m} \\ &\approx 42.82 \, \text{kN} \cdot \text{m/m} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Valeur du Moment de Renversement
Mrenv ≈ 42.8 kNm/m
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Le sol exerce un moment de 42.82 kNm pour chaque mètre de mur, tentant de le faire basculer autour de sa pointe avant. C'est la valeur que le moment stabilisateur devra contrer avec une marge de sécurité suffisante.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

L'erreur la plus courante est de choisir le mauvais point de pivot. Pour le renversement, on se place toujours au point le plus critique, c'est-à-dire la pointe avant de la fondation (le "nez de semelle"). Calculer le moment par rapport au centre de la base, par exemple, n'aurait pas de sens physique pour ce mode de rupture.

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • Le moment de renversement est la force de poussée \(P_a\) multipliée par son bras de levier.
  • Le bras de levier de \(P_a\) est \(H/3\) par rapport à la base du mur.
  • Ce moment est la principale "action" déstabilisatrice pour le renversement.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Si le remblai derrière le mur est incliné d'un angle \(\beta\), non seulement la formule de Ka change (elle devient plus complexe), mais la force de poussée Pa n'est plus horizontale. Elle est inclinée du même angle \(\beta\). Son moment de renversement doit alors être calculé en décomposant la force en une composante horizontale et une composante verticale.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
Le moment de renversement est d'environ 42.82 kNm/m.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Avec la force Pa de 47.95 kN/m pour un mur de 4.0 m, quel serait le nouveau Mrenv (en kNm/m) ?

Question 4 : Calculer le poids du mur (W) et le moment stabilisateur (Mstab)

Principe (le concept physique)

Le propre poids du mur agit comme une force stabilisatrice. Il crée un moment qui s'oppose au renversement. Pour calculer ce moment, il faut d'abord trouver le poids total du mur, puis déterminer où ce poids s'applique (son centre de gravité) pour connaître son bras de levier par rapport au point de pivot A.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

Pour trouver le centre de gravité d'une forme composée, on utilise la méthode des moments statiques. On décompose la forme en formes simples (ici, un rectangle et un triangle). Le moment statique total est la somme des moments statiques de chaque partie (\(\sum A_i x_i\)). La position du centre de gravité global est alors \(X_G = (\sum A_i x_i) / (\sum A_i)\). Le moment stabilisateur est simplement le poids total (\(W_{\text{total}}\)) multiplié par le bras de levier \(X_G\).

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

C'est une simple application du principe de la balance. Pour que le mur soit stable, le moment créé par son poids doit largement l'emporter sur le moment créé par la poussée. C'est pour cette raison que les murs-poids sont très larges à la base : cela augmente leur poids et, surtout, cela augmente le bras de levier de ce poids par rapport à la pointe avant, maximisant ainsi le moment stabilisateur.

Normes (la référence réglementaire)

L'Eurocode 7 considère le poids propre des structures comme une action permanente favorable. Dans certains cas, on lui applique un coefficient partiel minorant (ex: \(\gamma_G = 0.9\)) pour s'assurer de la stabilité même si le poids volumique réel du matériau est légèrement inférieur à la valeur de calcul.

Formule(s) (l'outil mathématique)

On utilise le principe de superposition :

\[ W_{\text{total}} = \sum W_i \quad \text{et} \quad M_{\text{stab}} = \sum (W_i \times x_i) \]

où \(W_i\) est le poids d'une section simple et \(x_i\) est la distance de son centre de gravité au point de pivot A.

Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose que le béton est homogène avec un poids volumique constant. Les calculs sont effectués pour une "tranche" de mur d'un mètre de long, d'où les unités en kN/m et kNm/m.

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Dimensions du mur : H=3.5m, B=1.5m, b=1.0m
  • Poids volumique du béton, \(\gamma_{\text{béton}} = 25 \, \text{kN/m}^3\)
  • Point de pivot : A (à x=0)
Astuces(Pour aller plus vite)

Pour éviter les erreurs, faites un petit tableau simple pour chaque forme : Forme | Aire (A) | Poids (W=A×γ) | Position du CdG (x) | Moment (M=W×x). Cela structure le calcul et rend la vérification beaucoup plus facile.

Schéma (Avant les calculs)
Décomposition et Centres de Gravité
G1G2Ax2x1
Calcul(s) (l'application numérique)

1. Décomposer le mur en un rectangle (1) et un triangle (2) et calculer les propriétés de chaque partie.

Pour le rectangle (1) :

\[ \begin{aligned} A_1 &= b \times H \\ &= 1.0 \, \text{m} \times 3.5 \, \text{m} \\ &= 3.5 \, \text{m}^2 \end{aligned} \]
\[ \begin{aligned} W_1 &= A_1 \times \gamma_{\text{béton}} \\ &= 3.5 \, \text{m}^2 \times 25 \, \text{kN/m}^3 \\ &= 87.5 \, \text{kN/m} \end{aligned} \]
\[ \begin{aligned} x_1 &= (B-b) + \frac{b}{2} \\ &= (1.5 - 1.0) + \frac{1.0}{2} \\ &= 0.5 + 0.5 \\ &= 1.0 \, \text{m} \end{aligned} \]

Pour le triangle (2) :

\[ \begin{aligned} \text{Base}_{\text{triangle}} &= B - b \\ &= 1.5 \, \text{m} - 1.0 \, \text{m} \\ &= 0.5 \, \text{m} \end{aligned} \]
\[ \begin{aligned} A_2 &= \frac{1}{2} \times (B-b) \times H \\ &= 0.5 \times 0.5 \, \text{m} \times 3.5 \, \text{m} \\ &= 0.875 \, \text{m}^2 \end{aligned} \]
\[ \begin{aligned} W_2 &= A_2 \times \gamma_{\text{béton}} \\ &= 0.875 \, \text{m}^2 \times 25 \, \text{kN/m}^3 \\ &= 21.875 \, \text{kN/m} \end{aligned} \]
\[ \begin{aligned} x_2 &= \frac{2}{3} \times (B-b) \\ &= \frac{2}{3} \times 0.5 \, \text{m} \\ &\approx 0.333 \, \text{m} \end{aligned} \]

2. Calculer le poids total et le moment stabilisateur total.

\[ \begin{aligned} W_{\text{total}} &= W_1 + W_2 \\ &= 87.5 + 21.875 \\ &= 109.375 \, \text{kN/m} \end{aligned} \]
\[ \begin{aligned} M_{\text{stab}} &= (W_1 \times x_1) + (W_2 \times x_2) \\ &= (87.5 \, \text{kN/m} \times 1.0 \, \text{m}) + (21.875 \, \text{kN/m} \times 0.333 \, \text{m}) \\ &= 87.5 + 7.28 \\ &\approx 94.78 \, \text{kN} \cdot \text{m/m} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Force et Moment Stabilisateurs Globaux
W_totAMstab
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Le mur oppose un moment stabilisateur de 94.78 kNm/m au moment de renversement. Ce moment est généré par son propre poids. À première vue, il semble significativement plus grand que le moment de renversement (42.82 kNm/m), ce qui est un bon signe pour la stabilité.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

L'erreur la plus fréquente est le calcul des bras de levier. N'oubliez pas que toutes les distances doivent être mesurées à partir du point de pivot A. Pour le rectangle, son centre de gravité est à B - b/2, et non b/2. Pour le triangle, il est à (2/3) de sa base (côté mur), et non (1/3).

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • Le poids du mur est la principale force qui assure sa stabilité.
  • Le moment stabilisateur dépend du poids ET de la largeur de la base.
  • On peut décomposer une forme complexe en formes simples pour trouver son poids et son centre de gravité.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Pour les murs en L ou en T (murs cantilever), une grande partie du moment stabilisateur provient non pas du poids du béton seul, mais du poids du remblai qui repose sur la semelle arrière ("talon") du mur. L'ingénieur utilise astucieusement le poids du sol, qui est la source du problème, pour en faire une partie de la solution !

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
Le poids total du mur est de 109.38 kN/m et le moment stabilisateur est d'environ 94.78 kNm/m.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Si la base B était de 2.0 m (b restant à 1.0 m), quel serait le nouveau Mstab (en kNm/m) ?

Question 5 : Calculer le coefficient de sécurité (Fs) et conclure

Principe (le concept physique)

C'est l'étape finale où l'on compare la "force" de stabilisation à la "force" de renversement. Le coefficient de sécurité nous donne une marge de confiance. Un Fs de 1.0 signifierait que le mur est à la limite de basculer. Les normes exigent une valeur supérieure (typiquement 1.5 ou plus) pour tenir compte des incertitudes sur les propriétés des sols, les charges, etc.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

La notion de coefficient de sécurité est au cœur de l'ingénierie. Elle permet de couvrir les aléas : les propriétés du sol ne sont jamais parfaitement connues, les charges peuvent être plus élevées que prévu, et les modèles de calcul sont des simplifications de la réalité. Un Fs > 1 garantit que la résistance est supérieure à la sollicitation dans le modèle, et la marge (ex: 1.5) garantit la sécurité dans la réalité.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Pensez à un combat de tir à la corde. Le moment stabilisateur est la force de votre équipe, le moment de renversement est la force de l'équipe adverse. Gagner ne suffit pas, vous voulez gagner avec une marge confortable pour être sûr de ne pas tomber si quelqu'un glisse. Le coefficient de sécurité est cette marge de confort.

Normes (la référence réglementaire)

L'Eurocode 7 recommande un coefficient de sécurité global d'au moins 1.5 pour la vérification de la stabilité au renversement à l'état limite ultime (ELU/ULS). Cette valeur peut varier selon les codes nationaux et l'importance de l'ouvrage.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Le coefficient de sécurité au renversement est le rapport des moments stabilisateurs sur les moments de renversement.

\[ F_s = \frac{M_{\text{stab}}}{M_{\text{renv}}} \]
Hypothèses (le cadre du calcul)

Ce calcul suppose que le renversement est le seul mode de rupture possible. En pratique, il faut aussi vérifier la stabilité au glissement sur la base et la capacité portante du sol sous la fondation.

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Moment stabilisateur, \(M_{\text{stab}} = 94.78 \, \text{kNm/m}\)
  • Moment de renversement, \(M_{\text{renv}} = 42.82 \, \text{kNm/m}\)
Astuces(Pour aller plus vite)

La règle d'or : "le bien sur le mal", "la résistance sur l'action", "ce qui aide sur ce qui nuit". Le coefficient de sécurité doit toujours être supérieur à 1, donc si votre calcul donne une valeur inférieure à 1, vous avez probablement inversé le numérateur et le dénominateur.

Schéma (Avant les calculs)
Balance des Moments
MstabMrenvFs = ?
Calcul(s) (l'application numérique)
\[ \begin{aligned} F_s &= \frac{94.78}{42.82} \\ &\approx 2.21 \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Stabilité Confirmée
MstabMrenvFs = 2.21 > 1.5 ✔️
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Le coefficient de sécurité calculé est de 2.21. Cette valeur est nettement supérieure à la valeur minimale de 1.5 généralement requise par les normes comme l'Eurocode 7. On peut donc conclure que le mur est stable vis-à-vis du risque de renversement dans les conditions étudiées.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Ne vous arrêtez pas à la conclusion "Fs > 1.5 donc c'est bon". Un bon ingénieur s'interroge : la valeur est-elle trop élevée (surdimensionnement coûteux) ? Les hypothèses (sol sec, pas de surcharge) sont-elles réalistes ? Cette vérification n'est qu'une partie d'une analyse de conception complète.

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • Le coefficient de sécurité au renversement est \(F_s = M_{\text{stab}} / M_{\text{renv}}\).
  • Il doit être supérieur à une valeur minimale imposée par les normes (typiquement 1.5).
  • Ce coefficient mesure la marge de sécurité de l'ouvrage contre le basculement.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Le mur de soutènement le plus haut du monde est celui du barrage de la Grande-Dixence en Suisse. C'est un barrage-poids de 285 mètres de haut. Sa base est large de près de 200 mètres pour garantir sa stabilité face à la poussée phénoménale de l'eau, en appliquant exactement les mêmes principes de moments stabilisateurs et de renversement.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
Le coefficient de sécurité au renversement est \(F_s \approx 2.21\). Le mur est donc considéré comme stable.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Avec Mstab = 154.17 kNm/m et Mrenv = 42.82 kNm/m, quel serait le nouveau Fs ?


Outil Interactif : Stabilité du Mur

Modifiez les paramètres du sol et du mur pour voir leur influence sur la sécurité.

Paramètres d'Entrée
30 °
1.5 m
3.5 m
Résultats Clés
Moment de Renversement (kNm/m) -
Moment Stabilisateur (kNm/m) -
Coefficient de Sécurité (Fs) -

Le Saviez-Vous ?

La théorie de la poussée des terres a été initialement développée par des ingénieurs militaires français comme Vauban et Coulomb au 17ème et 18ème siècle pour la conception des fortifications. Charles-Augustin Coulomb a été le premier à proposer une analyse rationnelle du problème en 1776, bien avant les travaux de William Rankine en 1857.


Foire Aux Questions (FAQ)

Pourquoi néglige-t-on la butée des terres à l'avant du mur ?

La butée est la résistance passive du sol à l'avant du mur, qui s'oppose au mouvement. On la néglige souvent dans les calculs de renversement car ce sol peut être remanié, érodé ou excavé au cours de la vie de l'ouvrage. Ne pas en tenir compte est une hypothèse sécuritaire qui garantit que le mur est stable même sans cette aide.

Que se passe-t-il s'il y a de l'eau derrière le mur ?

La présence d'eau change radicalement la situation. L'eau exerce une pression hydrostatique (triangulaire, comme la poussée) qui s'ajoute à la poussée des terres déjaugées (calculée avec le poids volumique déjaugé \(\gamma'\)). L'eau augmente considérablement le moment de renversement et est une cause fréquente de défaillance. C'est pourquoi un bon drainage derrière les murs de soutènement est absolument crucial.


Quiz Final : Testez vos connaissances

1. Si l'angle de frottement du sol (\(\phi'\)) augmente, le coefficient de sécurité au renversement...

2. Pour améliorer significativement la stabilité au renversement d'un mur-poids, la modification la plus efficace est...


Poussée Active des Terres
Force horizontale exercée par un massif de sol sur un ouvrage de soutènement lorsque celui-ci se déplace légèrement vers l'extérieur, permettant au sol de se décomprimer jusqu'à un état d'équilibre minimal.
Angle de Frottement Interne (\(\phi'\))
Propriété intrinsèque d'un sol granulaire qui mesure sa résistance au cisaillement. C'est l'équivalent de l'angle d'un tas de sable en équilibre. Plus il est élevé, plus le sol est résistant.
Coefficient de Sécurité
Rapport entre la capacité résistante d'une structure (ex: moment stabilisateur) et la sollicitation qu'elle subit (ex: moment de renversement). Il quantifie la marge de sécurité de l'ouvrage vis-à-vis d'un mode de ruine donné.
Calcul de la force de renversement d’un mur

D’autres exercices de Géotechnique:

0 commentaires
Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *