Calcul du Coefficient de Consolidation (Cv)
Contexte : Le temps, facteur clé des tassements en géotechnique.
Lorsqu'on construit sur des sols argileux saturés, comme des remblais routiers ou des fondations de bâtiments, le sol ne se tasse pas instantanément. L'eau présente dans les pores du sol, sous pression, doit s'échapper pour que le squelette solide puisse se réarranger et supporter la nouvelle charge. Ce phénomène, appelé consolidationProcessus de réduction de volume des sols fins saturés sous l'effet d'une charge, résultant de l'expulsion progressive de l'eau interstitielle., peut prendre des mois, voire des décennies. Le coefficient de consolidation (Cv) est un paramètre crucial qui quantifie la vitesse à laquelle ce tassement se produit. Le déterminer en laboratoire via un essai oedométrique est essentiel pour prédire les tassements futurs d'un ouvrage.
Remarque Pédagogique : Cet exercice est une application directe de la théorie de la consolidation de Terzaghi. Nous allons passer de l'échelle du laboratoire (une éprouvette de quelques centimètres) à l'échelle du réel (une couche de sol de plusieurs mètres) en utilisant des concepts de similitude basés sur le temps. C'est le quotidien de l'ingénieur géotechnicien : utiliser des essais de courte durée pour prédire des comportements sur le long terme.
Objectifs Pédagogiques
- Comprendre la notion de chemin de drainage et le calculer.
- Utiliser la méthode de Casagrande (log-temps) pour déterminer le temps \(t_{50}\).
- Appliquer la formule de Terzaghi pour calculer le coefficient de consolidation \(C_{\text{v}}\).
- Extrapoler les résultats de laboratoire pour prédire le temps de tassement sur un site réel.
- Se familiariser avec les unités en géotechnique (cm, minutes, m²/an).
Données de l'étude
Schéma de l'essai oedométrique
Paramètre | Symbole | Valeur | Unité |
---|---|---|---|
Hauteur moyenne de l'échantillon | \(H\) | 20.0 | \(\text{mm}\) |
Temps pour 50% de consolidation | \(t_{50}\) | 12 | \(\text{minutes}\) |
Conditions de drainage | - | Double | - |
Hauteur de la couche d'argile in situ | \(H_{\text{situ}}\) | 8.0 | \(\text{m}\) |
Drainage de la couche in situ | - | Double | - |
Questions à traiter
- Calculer le chemin de drainage maximal (\(H_{\text{dr}}\)) pour l'échantillon en laboratoire.
- Déterminer le coefficient de consolidation (\(C_{\text{v}}\)) de l'argile en m²/an.
- Calculer le chemin de drainage maximal (\(H_{\text{dr, situ}}\)) pour la couche de sol in situ.
- Estimer le temps (en années) nécessaire pour atteindre 90% de consolidation pour la couche d'argile in situ.
Les bases de la Consolidation
Avant de commencer, revoyons les concepts fondamentaux de la théorie de la consolidation de Terzaghi.
1. Le Chemin de Drainage (\(H_{\text{dr}}\)) :
C'est la distance maximale qu'une particule d'eau doit parcourir pour s'échapper de la couche de sol.
- Pour un drainage double (vers le haut et le bas), l'eau au centre n'a que la moitié de l'épaisseur à parcourir : \(H_{\text{dr}} = H / 2\).
- Pour un drainage simple (vers une seule direction), l'eau au fond doit traverser toute l'épaisseur : \(H_{\text{dr}} = H\).
2. Le Facteur Temps (\(T_{\text{v}}\)) :
C'est un nombre sans dimension qui relie le temps réel (\(t\)), les propriétés du sol (\(C_{\text{v}}\)) et la géométrie (\(H_{\text{dr}}\)). Il est défini par :
\[ T_{\text{v}} = \frac{C_{\text{v}} \cdot t}{H_{\text{dr}}^2} \]
Ce facteur est directement lié au degré de consolidation moyen (\(U\)). Pour des valeurs de \(U\) courantes, \(T_{\text{v}}\) est une constante :
- Pour \(U = 50\%\), \(T_{\text{v}} = 0.197\)
- Pour \(U = 90\%\), \(T_{\text{v}} = 0.848\)
3. Le Coefficient de Consolidation (\(C_{\text{v}}\)) :
C'est la propriété intrinsèque du sol qui gouverne la vitesse de consolidation. Il dépend de la perméabilité et de la compressibilité du sol. En réarrangeant la formule du facteur temps, on peut le calculer à partir des données de laboratoire :
\[ C_{\text{v}} = \frac{T_{\text{v}} \cdot H_{\text{dr}}^2}{t} \]
Correction : Calcul du Coefficient de Consolidation
Question 1 : Calculer le chemin de drainage en laboratoire
Principe (le concept physique)
Le chemin de drainage est la distance la plus longue que l'eau doit parcourir pour sortir de l'échantillon. Dans notre essai, l'échantillon est placé entre deux pierres poreuses qui agissent comme des "éponges", aspirant l'eau. Une goutte d'eau située exactement au milieu de l'échantillon peut s'échapper soit vers le haut, soit vers le bas. Le chemin le plus long qu'elle aura à parcourir est donc la moitié de la hauteur totale de l'échantillon.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
La vitesse de dissipation de la surpression interstitielle est maximale près des drains et nulle au point le plus éloigné. Le chemin de drainage \(H_{\text{dr}}\) est donc un paramètre géométrique fondamental qui contrôle l'échelle de temps du phénomène. C'est la distance qui apparaît au carré dans l'équation de la consolidation, ce qui la rend extrêmement influente.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Imaginez vider une piscine. Si vous avez un drain au fond (drainage simple), l'eau de la surface doit parcourir toute la hauteur. Si vous pouviez aussi aspirer l'eau par la surface (drainage double), l'eau au milieu n'aurait que la moitié de la distance à parcourir, et la vidange serait beaucoup plus rapide. C'est le même principe ici.
Normes (la référence réglementaire)
Les conditions de drainage de l'essai oedométrique sont précisément définies par les normes, comme la norme ISO 17892-5 ou l'ASTM D2435. Ces normes spécifient l'utilisation de pierres poreuses saturées pour garantir que le drainage est effectif et ne constitue pas un frein au phénomène mesuré.
Formule(s) (l'outil mathématique)
Pour un échantillon de hauteur \(H\) avec un drainage double (des deux côtés) :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que les pierres poreuses sont infiniment plus perméables que l'échantillon d'argile et que le drainage est parfaitement efficace sur toute la surface de l'échantillon.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Hauteur moyenne de l'échantillon, \(H = 20.0 \, \text{mm}\)
Astuces(Pour aller plus vite)
Pour cette première question, il n'y a pas vraiment de raccourci, mais il est crucial de bien identifier le type de drainage (simple ou double) dès le début. C'est la première information à chercher dans un énoncé de ce type, car elle conditionne tous les calculs suivants.
Schéma (Avant les calculs)
Identification du Chemin de Drainage
Calcul(s) (l'application numérique)
On applique directement la formule.
Schéma (Après les calculs)
Chemin de Drainage Calculé
Réflexions (l'interprétation du résultat)
La valeur de 10 mm est la longueur caractéristique qui va gouverner la vitesse de consolidation pour notre essai. C'est cette distance, et non la hauteur totale de l'échantillon, qui doit être utilisée dans les calculs ultérieurs. Une petite valeur comme celle-ci permet d'obtenir des temps de consolidation mesurables en laboratoire (quelques minutes ou heures).
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
L'erreur la plus commune est de confondre drainage simple et double. Si l'énoncé avait mentionné une base imperméable, le drainage aurait été simple et le chemin de drainage aurait été de 20 mm, ce qui aurait doublé la valeur de \(H_{\text{dr}}\) et quadruplé le \(C_{\text{v}}\) calculé !
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- Le chemin de drainage \(H_{\text{dr}}\) est la distance maximale de parcours de l'eau.
- Pour un drainage double, \(H_{\text{dr}} = H/2\).
- Pour un drainage simple, \(H_{\text{dr}} = H\).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Pour accélérer la consolidation de couches d'argile épaisses sur de grands chantiers (ports, aéroports), les ingénieurs utilisent des "drains verticaux". Ce sont des colonnes de matériaux très perméables installées à travers l'argile, qui réduisent drastiquement le chemin de drainage horizontal et transforment un processus de plusieurs décennies en quelques mois.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Si l'échantillon avait une hauteur de 25 mm et un drainage simple, quel serait le chemin de drainage en mm ?
Question 2 : Déterminer le coefficient de consolidation (Cv)
Principe (le concept physique)
Le coefficient de consolidation \(C_{\text{v}}\) est une mesure de la "rapidité" du sol à tasser. Il combine sa capacité à laisser passer l'eau (perméabilité) et sa tendance à se déformer sous charge (compressibilité). En utilisant le temps \(t_{50}\) mesuré en laboratoire pour atteindre 50% de tassement, et en connaissant le chemin de drainage et le facteur temps théorique \(T_{\text{v}50}\), on peut isoler et calculer cette propriété fondamentale du sol.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Le coefficient de consolidation est défini par \(C_{\text{v}} = k / (m_{\text{v}} \cdot \gamma_{\text{w}})\), où \(k\) est la perméabilité, \(m_{\text{v}}\) est le coefficient de compressibilité volumique, et \(\gamma_{\text{w}}\) est le poids volumique de l'eau. Cette équation montre bien que \(C_{\text{v}}\) est élevé si la perméabilité \(k\) est grande (l'eau s'échappe facilement) et si la compressibilité \(m_{\text{v}}\) est faible (le sol se déforme peu).
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
La formule \(C_{\text{v}} = (T_{\text{v}} \cdot H_{\text{dr}}^2) / t\) est une des plus importantes en géotechnique. Elle est analogue à d'autres équations de diffusion, comme la diffusion de la chaleur. Le \(C_{\text{v}}\) joue le rôle du "diffusomètre thermique" : il indique à quelle vitesse une "perturbation" (ici, la surpression d'eau) se dissipe dans le milieu.
Normes (la référence réglementaire)
La détermination du temps \(t_{50}\) à partir de la courbe de tassement est généralement faite par la méthode graphique de Casagrande (en échelle log-temps) ou de Taylor (racine carrée du temps). Ces méthodes sont décrites dans les normes d'essai (ISO 17892-5, ASTM D2435) pour assurer une détermination reproductible du paramètre.
Formule(s) (l'outil mathématique)
La formule de base est :
Pour 50% de consolidation, on utilise les valeurs correspondantes :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que le \(C_{\text{v}}\) est constant pendant le palier de chargement. En réalité, il peut varier légèrement car la perméabilité et la compressibilité du sol changent au fur et à mesure que le sol se densifie.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Facteur temps pour U=50%, \(T_{\text{v}50} = 0.197\) (valeur théorique standard)
- Chemin de drainage, \(H_{\text{dr}} = 10.0 \, \text{mm}\) (de la Q1)
- Temps pour 50% de consolidation, \(t_{50} = 12 \, \text{minutes}\)
Astuces(Pour aller plus vite)
L'unité finale demandée est le m²/an, qui est très courante en géotechnique. Il est plus simple de faire le calcul initial dans une unité cohérente (ex: cm²/min) puis de faire une seule conversion à la fin. 10 mm = 1 cm. Le calcul devient \(C_{\text{v}} = (0.197 \times 1^2) / 12 \approx 0.0164\) cm²/min. Il ne reste plus qu'à convertir cette valeur.
Schéma (Avant les calculs)
Détermination de Cv à partir de l'essai
Calcul(s) (l'application numérique)
1. Calculer \(C_{\text{v}}\) en mm²/minute :
2. Convertir en m²/an. Sachant que :
1 m = 1000 mm \(\Rightarrow\) 1 m² = \(10^6\) mm²
1 an = 365 jours \(\times\) 24 h/jour \(\times\) 60 min/h = 525600 minutes
Schéma (Après les calculs)
Valeur de Cv et Comparaison
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Une valeur de \(C_{\text{v}}\) de 0.86 m²/an est typique d'une argile de plasticité moyenne. C'est une valeur faible qui confirme que le processus de consolidation sera lent. Si on avait obtenu une valeur de 10 ou 20 m²/an, cela aurait été plus caractéristique d'un limon, un sol qui se consolide beaucoup plus vite.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Les conversions d'unités sont la principale source d'erreurs. Attention en particulier au carré sur les unités de longueur (mm² en m²). Une erreur d'un facteur 1000 sur la conversion mm \(\rightarrow\) m devient une erreur d'un facteur un million (1000²) sur la conversion mm² \(\rightarrow\) m².
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- Le coefficient \(C_{\text{v}}\) est une propriété du sol qui mesure sa "vitesse" de consolidation.
- On le calcule avec la formule \(C_{\text{v}} = (T_{\text{v}50} \cdot H_{\text{dr}}^2) / t_{50}\).
- La cohérence des unités est absolument critique dans ce calcul.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
La Tour de Pise a commencé à s'incliner pendant sa construction au 12ème siècle à cause d'un tassement de consolidation différentiel. Le sol sous le côté sud, une couche d'argile compressible, s'est tassé plus rapidement que sous le côté nord. Le temps de consolidation très long de cette argile explique pourquoi la tour a continué de s'incliner pendant des siècles.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Si le temps \(t_{50}\) mesuré avait été de 24 minutes (sol plus lent), quel aurait été le \(C_{\text{v}}\) en m²/an ?
Question 3 : Calculer le chemin de drainage in situ
Principe (le concept physique)
Le principe est exactement le même qu'en laboratoire, mais appliqué à l'échelle du site réel. On identifie la couche d'argile et on regarde si l'eau peut s'échapper par le haut, par le bas, ou les deux. Si la couche d'argile est prise en sandwich entre deux couches très perméables (sable, gravier), le drainage est double. Si elle repose sur un substratum rocheux imperméable, le drainage est simple.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
L'identification des conditions de drainage in situ est une étape cruciale de l'étude géotechnique. Elle se base sur les sondages et les logs de forage qui décrivent la succession des couches de sol. Une couche de sable au-dessus et une couche de gravier en dessous d'une couche d'argile est un cas d'école de drainage double. Une couche d'argile reposant directement sur un bedrock granitique est un cas typique de drainage simple (uniquement vers le haut).
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
C'est ici que le travail du géologue et de l'ingénieur se rejoignent. Une bonne interprétation de la stratigraphie du site est indispensable. Une erreur sur les conditions de drainage (considérer un drainage double alors qu'il est simple) peut conduire à une sous-estimation du temps de tassement d'un facteur 4, ce qui peut avoir des conséquences désastreuses sur un projet.
Normes (la référence réglementaire)
Il n'y a pas de "norme" pour ce calcul, mais il découle directement de la théorie de Terzaghi. La bonne pratique, dictée par les guides de conception géotechnique (comme l'Eurocode 7), est de toujours justifier le choix des conditions de drainage sur la base des données de reconnaissance du site.
Formule(s) (l'outil mathématique)
L'énoncé précise un drainage double pour la couche in situ de hauteur \(H_{\text{situ}}\) :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que les couches drainantes (au-dessus et en dessous de l'argile) sont continues sur toute l'étendue du projet et suffisamment épaisses et perméables pour ne pas gêner l'évacuation de l'eau.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Hauteur de la couche in situ, \(H_{\text{situ}} = 8.0 \, \text{m}\)
Astuces(Pour aller plus vite)
Le calcul est direct. L'important est de ne pas mélanger les unités. Si la hauteur de la couche est en mètres, le chemin de drainage calculé sera aussi en mètres. Gardez cette unité pour la suite, car le \(C_{\text{v}}\) a été calculé en m²/an.
Schéma (Avant les calculs)
Couche d'Argile In Situ
Calcul(s) (l'application numérique)
On applique la formule avec les dimensions du site.
Schéma (Après les calculs)
Chemin de Drainage In Situ Calculé
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Le chemin de drainage sur le site est de 4 mètres, soit 400 fois plus grand que le chemin de drainage en laboratoire (10 mm). Comme le temps de consolidation dépend du carré de cette distance, on peut déjà s'attendre à un temps de tassement in situ qui sera de l'ordre de 400² = 160 000 fois plus long que le temps mesuré en laboratoire.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Ne pas oublier de diviser par deux dans le cas d'un drainage double. Utiliser la hauteur totale de la couche (8 m) comme chemin de drainage est une erreur fréquente qui mènerait à un temps de tassement 4 fois trop long.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- L'analyse des conditions de drainage in situ est primordiale.
- Le calcul de \(H_{\text{dr, situ}}\) suit la même logique qu'en laboratoire, mais à l'échelle du site.
- Ce paramètre est celui qui a le plus d'influence sur le temps de tassement final.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
L'aéroport international de Kansai au Japon est construit sur une île artificielle posée sur une épaisse couche d'argile marine très compressible. Les ingénieurs ont prédit des tassements de consolidation de plusieurs mètres sur plusieurs décennies. Le bâtiment du terminal a été monté sur des vérins ajustables pour compenser les tassements et maintenir le sol de l'aéroport à niveau.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Pour une couche de 12 m d'épaisseur reposant sur du rocher (drainage simple), quel serait le chemin de drainage in situ en m ?
Question 4 : Estimer le temps pour 90% de consolidation in situ
Principe (le concept physique)
C'est le cœur du calcul géotechnique : l'extrapolation. La théorie de la consolidation nous dit que pour un même sol (même \(C_{\text{v}}\)) et un même degré de consolidation (donc même \(T_{\text{v}}\)), le rapport \(t/H_{\text{dr}}^2\) est constant. On peut donc établir une relation de proportionnalité entre le laboratoire et le terrain pour calculer le temps de tassement sur le site.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
La relation \(t = (T_{\text{v}} \cdot H_{\text{dr}}^2) / C_{\text{v}}\) montre que le temps est directement proportionnel au Facteur Temps \(T_{\text{v}}\) (qui augmente avec le degré de consolidation U), proportionnel au carré du chemin de drainage, et inversement proportionnel au coefficient de consolidation. Pour un sol donné, le seul levier pour réduire le temps de tassement est de réduire \(H_{\text{dr}}\), d'où l'efficacité des drains verticaux.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Ce calcul est un exemple parfait de l'utilisation de nombres adimensionnels (comme \(T_{\text{v}}\)) en ingénierie pour passer d'une échelle à une autre. Le Facteur Temps est le "traducteur" qui permet de dire : "si à l'échelle du labo, il faut 12 minutes pour faire 50% du chemin, alors à l'échelle du site, où le chemin est 400 fois plus long, il faudra 12 minutes \(\times\) 400² pour faire 50% du chemin".
Normes (la référence réglementaire)
Le calcul prévisionnel des tassements en fonction du temps est une exigence des normes de conception géotechnique (Eurocode 7). Ces normes imposent de vérifier que les tassements totaux et différentiels, ainsi que leur vitesse, restent dans des limites admissibles pour la structure à construire.
Formule(s) (l'outil mathématique)
On part de la définition du facteur temps \(T_{\text{v}} = (C_{\text{v}} \cdot t) / H_{\text{dr}}^2\). On peut écrire :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que le coefficient de consolidation \(C_{\text{v}}\) déterminé en laboratoire sur une petite éprouvette est représentatif de l'ensemble de la masse de sol de 8 mètres d'épaisseur, ce qui est une hypothèse forte. En pratique, on réalise plusieurs essais sur des échantillons de différentes profondeurs pour vérifier l'homogénéité de la couche.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Facteur temps pour U=90%, \(T_{\text{v}90} = 0.848\) (valeur théorique standard)
- Coefficient de consolidation, \(C_{\text{v}} = 0.86 \, \text{m}^2/\text{an}\) (de la Q2)
- Chemin de drainage in situ, \(H_{\text{dr, situ}} = 4.0 \, \text{m}\) (de la Q3)
Astuces(Pour aller plus vite)
Puisque le temps est proportionnel au facteur temps \(T_{\text{v}}\), on peut rapidement estimer \(t_{90}\) à partir de \(t_{50}\). Le rapport \(T_{\text{v}90} / T_{\text{v}50} = 0.848 / 0.197 \approx 4.3\). Donc, une fois que vous avez calculé le temps pour 50% de consolidation sur le site, il suffit de le multiplier par 4.3 pour avoir une bonne estimation du temps pour 90%.
Schéma (Avant les calculs)
Extrapolation du Temps de Tassement
Calcul(s) (l'application numérique)
On utilise la formule directe. Attention à la cohérence des unités (m et an).
Schéma (Après les calculs)
Prédiction du Tassement dans le Temps
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Il faudra près de 16 ans pour que 90% du tassement total se produise sous la nouvelle construction. Cette information est capitale pour le maître d'ouvrage et les concepteurs. Elle peut influencer le phasage des travaux (par exemple, attendre la fin du tassement primaire avant de poser des finitions fragiles) ou même le choix de la solution de fondation (par exemple, opter pour des fondations profondes qui ne sont pas affectées par le tassement de la couche d'argile).
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Ne pas utiliser le mauvais facteur temps ! Utiliser \(T_{\text{v}50}\) (0.197) au lieu de \(T_{\text{v}90}\) (0.848) est une erreur fréquente. Assurez-vous de toujours utiliser le facteur temps qui correspond au degré de consolidation demandé dans la question.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- Le temps de consolidation est proportionnel au carré du chemin de drainage.
- On peut passer du laboratoire au terrain en utilisant le rapport des carrés des chemins de drainage.
- Le temps pour 90% de consolidation est environ 4.3 fois plus long que le temps pour 50% de consolidation (\(T_{\text{v}90}/T_{\text{v}50} = 0.848/0.197 \approx 4.3\)).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
La ville de Mexico est construite sur d'anciennes couches d'argile lacustre. Le pompage excessif des eaux souterraines a provoqué une consolidation massive de ces couches, entraînant un affaissement (subsidence) de la ville qui atteint jusqu'à 9 mètres dans certains quartiers au cours du 20ème siècle, l'un des cas les plus extrêmes au monde.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Avec les mêmes données, quel serait le temps pour atteindre 50% de consolidation sur le site (en années) ?
Outil Interactif : Paramètres de Consolidation
Modifiez les paramètres du sol et du site pour voir leur influence sur le temps de tassement.
Paramètres d'Entrée
Temps de Tassement In Situ
Le Saviez-Vous ?
La théorie de la consolidation a été développée par Karl von Terzaghi en 1925. Souvent appelé le "père de la mécanique des sols", cet ingénieur autrichien a révolutionné le domaine en appliquant les principes de la mécanique, de l'hydraulique et de la géologie pour comprendre et prédire le comportement des sols, transformant la construction de fondations d'un art empirique à une science de l'ingénieur.
Foire Aux Questions (FAQ)
Pourquoi utilise-t-on \(t_{50}\) et pas \(t_{100}\) ?
Théoriquement, la consolidation à 100% prend un temps infini. La courbe de tassement s'approche asymptotiquement de sa valeur finale. Il est donc impossible de mesurer un \(t_{100}\) précis. Les points à 50% (méthode de Casagrande) ou 90% (méthode de Taylor) sont des points caractéristiques de la courbe, beaucoup plus faciles et fiables à déterminer graphiquement à partir des données de laboratoire.
Cette théorie s'applique-t-elle à tous les sols ?
Non, la théorie de Terzaghi s'applique principalement aux sols fins (argiles, limons) complètement saturés en eau, et pour des chargements unidimensionnels (verticaux). Pour les sables et graviers, le tassement est quasi-instantané car l'eau s'évacue très vite (perméabilité élevée). Pour les sols non saturés ou les chargements complexes, des théories plus avancées sont nécessaires.
Quiz Final : Testez vos connaissances
1. Si on double l'épaisseur d'une couche d'argile (avec les mêmes conditions de drainage), le temps pour atteindre un certain degré de consolidation sera...
2. Un sol avec un \(C_{\text{v}}\) élevé...
- Coefficient de Consolidation (Cv)
- Paramètre du sol qui caractérise la vitesse du processus de consolidation. Il intègre la perméabilité et la compressibilité du sol. Unité : m²/s ou m²/an.
- Chemin de Drainage (Hdr)
- La plus grande distance qu'une particule d'eau doit parcourir pour s'échapper d'une couche de sol en cours de consolidation.
- Facteur Temps (Tv)
- Paramètre adimensionnel qui relie le temps écoulé, le chemin de drainage et le coefficient de consolidation. Il est directement lié au degré de consolidation.
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