Déterminer les pertes de charge et pressions

Déterminer les pertes de charge et pressions

Déterminer les pertes de charge et pressions

Contexte : Le dimensionnement d'un réseau d'adduction d'eau potable.

L'un des défis majeurs en ingénierie hydraulique est de transporter un fluide d'un point A à un point B en garantissant un débit et une pression suffisants à l'arrivée. Pour cela, il est crucial de comprendre et de quantifier l'énergie dissipée par le fluide lors de son écoulement. Cette dissipation, appelée perte de chargeDiminution de la pression totale d'un fluide lorsqu'il s'écoule dans une canalisation, due aux frottements et aux singularités., est un concept fondamental pour le dimensionnement correct des pompes et des canalisations.

Remarque Pédagogique : Cet exercice vous guidera à travers le calcul des pertes de charge linéaires et singulières dans une conduite, et vous montrera comment utiliser le théorème de Bernoulli pour déterminer la pression en un point du réseau.


Objectifs Pédagogiques

  • Calculer le nombre de Reynolds pour déterminer le régime d'écoulement.
  • Déterminer le coefficient de perte de charge linéaire à l'aide du diagramme de Moody.
  • Calculer les pertes de charge linéaires et singulières.
  • Appliquer le théorème de Bernoulli généralisé pour trouver une pression inconnue.

Données de l'étude

On étudie une section d'une conduite en fonte (non neuve) transportant de l'eau d'un réservoir A vers un point B situé en contrebas.

Schéma de l'installation hydraulique
Réservoir A z_A = 100 m Vanne Coude 90° Point B z_B = 85 m L = 250 m, D = 200 mm
Paramètre Symbole Valeur Unité
Débit volumique \(Q_v\) 80 L/s
Diamètre intérieur de la conduite \(D\) 200 mm
Longueur de la conduite \(L\) 250 m
Rugosité de la fonte \(\epsilon\) 0.26 mm
Altitude du plan d'eau en A \(z_A\) 100 m
Altitude du point B \(z_B\) 85 m
Masse volumique de l'eau \(\rho\) 1000 kg/m³
Viscosité cinématique de l'eau \(\nu\) \(1 \times 10^{-6}\) m²/s
Accélération de la pesanteur \(g\) 9.81 m/s²

Questions à traiter

  1. Calculer la vitesse de l'écoulement dans la conduite.
  2. Calculer le nombre de Reynolds et déterminer la nature du régime d'écoulement.
  3. Déterminer le coefficient de perte de charge linéaire \(\lambda\) en utilisant la formule de Colebrook-White (ou une approximation comme celle de Haaland).
  4. Calculer la perte de charge linéaire totale \(\Delta H_{\text{lin}}\).
  5. Calculer la perte de charge singulière totale \(\Delta H_{\text{sing}}\) (coude à 90°: K=0.4, vanne à passage direct ouverte: K=0.2).
  6. En appliquant le théorème de Bernoulli entre A et B, déterminer la pression au point B.

Les bases sur les Pertes de Charge

Lorsqu'un fluide s'écoule dans une conduite, il perd de l'énergie à cause des frottements sur les parois (pertes de charge linéaires) et des obstacles ou changements de direction (pertes de charge singulières).

1. Théorème de Bernoulli Généralisé
Il exprime la conservation de l'énergie pour un fluide réel en mouvement entre deux points 1 et 2. Il inclut un terme pour les pertes de charge \(\Delta H_{1 \to 2}\). \[ \frac{P_1}{\rho g} + \frac{v_1^2}{2g} + z_1 = \frac{P_2}{\rho g} + \frac{v_2^2}{2g} + z_2 + \Delta H_{1 \to 2} \]

2. Pertes de Charge Linéaires et Singulières
La perte de charge totale est la somme des pertes linéaires et singulières. \[ \Delta H_{\text{tot}} = \Delta H_{\text{lin}} + \Delta H_{\text{sing}} \] \[ \Delta H_{\text{lin}} = \lambda \frac{L}{D} \frac{v^2}{2g} \quad \text{et} \quad \Delta H_{\text{sing}} = \sum K_i \frac{v^2}{2g} \] Où \(\lambda\) est le coefficient de perte de charge linéaire et \(K_i\) sont les coefficients des pertes singulières.


Correction : Déterminer les pertes de charge et pressions

Question 1 : Calculer la vitesse de l'écoulement

Principe

Le concept physique fondamental ici est la conservation de la masse, exprimée par l'équation de continuité. Pour un fluide incompressible, le débit volumique (le volume de fluide passant par une section par unité de temps) est constant. Ce débit est le produit de la vitesse moyenne du fluide par l'aire de la section de la conduite.

Mini-Cours

La relation \(Q_v = A \times v\) est l'une des pierres angulaires de la mécanique des fluides. Elle signifie que pour un débit donné, si la section de la conduite diminue, la vitesse du fluide doit augmenter, et vice-versa. C'est ce principe qui explique pourquoi l'eau sort plus vite d'un tuyau d'arrosage quand on en pince l'extrémité.

Remarque Pédagogique

La première étape de tout problème d'hydraulique est souvent de calculer les grandeurs de base comme la section et la vitesse. Prenez l'habitude de toujours vérifier la cohérence de vos unités avant de commencer le moindre calcul. C'est le réflexe qui vous sauvera le plus souvent.

Normes

Ce calcul ne dépend pas d'une norme de construction spécifique, mais de principes physiques universels. Cependant, les normes professionnelles (comme le DTU en France) peuvent imposer des vitesses maximales dans les canalisations pour limiter le bruit et l'érosion (généralement autour de 2-3 m/s pour l'eau).

Formule(s)

Formule de la vitesse

\[ v = \frac{Q_v}{A} \]

Formule de l'aire d'un disque

\[ A = \frac{\pi D^2}{4} \]
Hypothèses
  • L'écoulement se fait en pleine section (la conduite est entièrement remplie d'eau).
  • Le fluide (eau) est considéré comme incompressible (sa masse volumique ne varie pas).
Donnée(s)
ParamètreSymboleValeurUnité
Débit volumique\(Q_v\)80L/s
Diamètre intérieur\(D\)200mm
Astuces

Pour convertir rapidement les L/s en m³/s, il suffit de diviser par 1000. Pour les mm en m, on divise aussi par 1000. Avoir ces conversions en tête vous fera gagner un temps précieux.

Schéma (Avant les calculs)
Relation Débit, Vitesse et Section
QvDv
Calcul(s)

Conversion du débit

\[ \begin{aligned} Q_v &= 80 \text{ L/s} \\ &= 80 \times 10^{-3} \text{ m}^3/\text{s} \\ &= 0.08 \text{ m}^3/\text{s} \end{aligned} \]

Conversion du diamètre

\[ \begin{aligned} D &= 200 \text{ mm} \\ &= 0.2 \text{ m} \end{aligned} \]

Calcul de la section

\[ \begin{aligned} A &= \frac{\pi \times (0.2 \text{ m})^2}{4} \\ &= \frac{\pi \times 0.04}{4} \\ &= 0.01\pi \\ &\approx 0.031416 \text{ m}^2 \end{aligned} \]

Calcul de la vitesse

\[ \begin{aligned} v &= \frac{0.08 \text{ m}^3/\text{s}}{0.031416 \text{ m}^2} \\ &\approx 2.546 \text{ m/s} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Vitesse Résultante
Qv = 80 L/sD = 200 mmv = 2.55 m/s
Réflexions

Une vitesse de 2.55 m/s est une valeur tout à fait plausible et courante dans les réseaux d'adduction d'eau. Elle est suffisamment élevée pour assurer un bon transport, mais pas excessive au point de causer une usure prématurée ou des nuisances sonores importantes.

Points de vigilance

L'erreur la plus fréquente est d'oublier de convertir les unités. Si vous calculez avec un diamètre en mm et un débit en L/s, votre résultat sera incohérent. Une autre erreur classique est de se tromper dans la formule de l'aire du cercle (oublier le carré, utiliser le rayon au lieu du diamètre, etc.).

Points à retenir
  • La relation fondamentale : Débit = Section × Vitesse.
  • La nécessité absolue de travailler avec des unités cohérentes (le Système International est le plus sûr).
  • La formule de l'aire d'un disque : \(A = \pi D^2 / 4\).
Le saviez-vous ?

L'équation de continuité est une manifestation locale de la loi de conservation de la masse. Elle a été formulée pour la première fois sous sa forme moderne par le mathématicien et physicien Leonhard Euler au milieu du 18ème siècle.

FAQ
Résultat Final
La vitesse de l'écoulement dans la conduite est d'environ 2.55 m/s.
A vous de jouer

Si le débit passait à 120 L/s dans la même conduite, quelle serait la nouvelle vitesse ?

Question 2 : Calculer le nombre de Reynolds et déterminer le régime

Principe

Le nombre de Reynolds (Re) est un nombre sans dimension qui compare les forces d'inertie (qui tendent à créer des tourbillons et du chaos) aux forces de viscosité (qui tendent à amortir le mouvement et à le garder régulier). La valeur de ce nombre nous indique si l'écoulement sera ordonné et prédictible (laminaire) ou chaotique et tourbillonnaire (turbulent).

Mini-Cours

Il existe trois régimes d'écoulement principaux :

  • Laminaire (Re < 2000) : Les filets de fluide s'écoulent en couches parallèles, sans se mélanger. C'est un écoulement "propre" et très ordonné, typique des fluides très visqueux ou des très faibles vitesses.
  • Transitoire (2000 < Re < 4000) : Un régime instable, intermédiaire, où l'écoulement peut osciller entre laminaire et turbulent. On évite de dimensionner des systèmes dans cette zone.
  • Turbulent (Re > 4000) : L'écoulement est caractérisé par des tourbillons et un mélange intense. C'est le régime le plus courant en ingénierie de l'eau.

Remarque Pédagogique

Le calcul du nombre de Reynolds est une étape absolument cruciale. Il ne s'agit pas d'un simple calcul intermédiaire ; c'est lui qui va dicter le choix de la formule pour les pertes de charge à la question suivante. Une erreur ici invaliderait toute la suite de l'exercice.

Normes

Les seuils de 2000 et 4000 pour le nombre de Reynolds sont des valeurs conventionnelles universellement acceptées en mécanique des fluides pour les écoulements en conduite circulaire. Elles ne proviennent pas d'un code de construction mais de décennies d'expérimentations.

Formule(s)

Formule du nombre de Reynolds

\[ Re = \frac{v \cdot D}{\nu} \]
Hypothèses
  • Les propriétés du fluide, notamment la viscosité cinématique \(\nu\), sont constantes et uniformes (on suppose une température constante).
Donnée(s)
ParamètreSymboleValeurUnité
Vitesse\(v\)2.55m/s
Diamètre\(D\)0.2m
Viscosité cinématique\(\nu\)\(1 \times 10^{-6}\)m²/s
Astuces

Dans la pratique, pour de l'eau s'écoulant dans des conduites de taille courante (plus de quelques centimètres de diamètre) à des vitesses raisonnables (plus de 0.5 m/s), l'écoulement est presque systématiquement turbulent. Le calcul reste indispensable, mais vous pouvez déjà avoir une forte intuition du résultat.

Schéma (Avant les calculs)
Régimes d'écoulement Laminaire et Turbulent
Laminaire (Re < 2000)Turbulent (Re > 4000)
Calcul(s)

Calcul du nombre de Reynolds

\[ \begin{aligned} Re &= \frac{2.546 \text{ m/s} \times 0.2 \text{ m}}{1 \times 10^{-6} \text{ m}^2/\text{s}} \\ &= \frac{0.5092}{10^{-6}} \\ &= 509200 \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Position du Nombre de Reynolds calculé
0Laminaire2000Transitoire4000TurbulentRe = 509 200
Réflexions

Le nombre de Reynolds est de 509 200, ce qui est très largement supérieur au seuil de 4000. L'écoulement est donc pleinement turbulent. Cela signifie que les forces d'inertie dominent largement les forces de viscosité, et que les pertes par frottement seront significatives.

Points de vigilance

Attention à ne pas confondre la viscosité cinématique \(\nu\) (en m²/s) et la viscosité dynamique \(\mu\) (en Pa.s). La formule utilise la viscosité cinématique. Si l'énoncé vous donnait \(\mu\), il faudrait utiliser la formule \(Re = \frac{\rho v D}{\mu}\).

Points à retenir
  • La formule du nombre de Reynolds : \( Re = vD/\nu \).
  • Les seuils critiques : Laminaire < 2000, Turbulent > 4000.
  • Le régime d'écoulement détermine la méthode de calcul des pertes de charge.
Le saviez-vous ?

L'expérience qui a permis de visualiser et de définir ces régimes d'écoulement a été menée en 1883 par l'ingénieur britannique Osborne Reynolds. Il injectait un filet de colorant dans un écoulement d'eau dans un tube de verre et observait son comportement en faisant varier la vitesse.

FAQ
Résultat Final
Le nombre de Reynolds est d'environ 509 200, indiquant un régime d'écoulement turbulent.
A vous de jouer

Imaginez que l'on remplace l'eau par une huile ayant une viscosité cinématique de \(80 \times 10^{-6}\) m²/s, en gardant la même vitesse. Quel serait le nouveau nombre de Reynolds ?

Question 3 : Déterminer le coefficient de perte de charge linéaire \(\lambda\)

Principe

Le coefficient de perte de charge linéaire, \(\lambda\) (lambda), est un nombre sans dimension qui quantifie l'intensité du frottement entre le fluide et la paroi de la conduite. Pour un écoulement turbulent (Re > 4000), ce coefficient dépend à la fois du nombre de Reynolds (l'intensité de la turbulence) et de la rugosité relative de la conduite (l'état de surface de la paroi).

Mini-Cours

La relation entre \(\lambda\), Re et la rugosité relative \(\epsilon/D\) est complexe et a été déterminée expérimentalement. Le résultat est souvent présenté sous la forme du diagramme de Moody. Pour éviter une lecture graphique imprécise, on utilise des formules qui modélisent ce diagramme. La plus célèbre est l'équation de Colebrook-White, qui est implicite (on ne peut pas isoler \(\lambda\) directement). Pour des calculs directs, on utilise des approximations explicites comme la formule de Haaland, très précise.

Remarque Pédagogique

Bien que le diagramme de Moody soit un outil pédagogique fantastique, dans la pratique, un ingénieur utilisera presque toujours une formule explicite comme celle de Haaland ou un solveur numérique pour l'équation de Colebrook-White. C'est plus rapide, plus précis et plus facilement automatisable.

Normes

Les formules de Colebrook-White et de Haaland sont des standards de l'ingénierie hydraulique, reconnues internationalement et présentes dans tous les manuels de référence sur la mécanique des fluides (par exemple, le "Mémento des pertes de charge" d'Idel'cik).

Formule(s)

Formule de Haaland

\[ \frac{1}{\sqrt{\lambda}} \approx -1.8 \log_{10}\left[ \left(\frac{\epsilon/D}{3.7}\right)^{1.11} + \frac{6.9}{Re} \right] \]
Hypothèses
  • La valeur de la rugosité \(\epsilon\) pour la fonte est une valeur moyenne représentative de l'état de la conduite. Dans la réalité, elle peut varier le long du tuyau.
Donnée(s)
ParamètreSymboleValeurUnité
Nombre de Reynolds\(Re\)509 200-
Rugosité\(\epsilon\)0.26mm
Diamètre\(D\)200mm
Astuces

Avant de vous lancer dans le calcul, vérifiez la rugosité relative. Si elle est très grande et que le nombre de Reynolds est très élevé (régime "pleinement turbulent"), le terme \(6.9/Re\) devient négligeable. Le coefficient \(\lambda\) ne dépend alors quasiment plus que de la rugosité relative.

Schéma (Avant les calculs)
Diagramme de Moody (Concept)

On se situe sur le diagramme à l'intersection de la ligne verticale correspondant à notre Re et de la courbe correspondant à notre rugosité relative \(\epsilon/D\).

Nombre de Reynolds (Re) →Coefficient de friction (λ) →Courbe pour ε/DNotre RePoint de lecture de λ
Calcul(s)

Calcul de la rugosité relative

Les deux unités doivent être les mêmes (ici, mm) pour que le rapport soit sans dimension.

\[ \begin{aligned} \frac{\epsilon}{D} &= \frac{0.26 \text{ mm}}{200 \text{ mm}} \\ &= 0.0013 \end{aligned} \]

Calcul du terme \(1/\sqrt{\lambda}\)

\[ \begin{aligned} \frac{1}{\sqrt{\lambda}} &\approx -1.8 \log_{10}\left[ \left(\frac{0.0013}{3.7}\right)^{1.11} + \frac{6.9}{509200} \right] \\ &\approx -1.8 \log_{10}\left[ (0.0003513)^{1.11} + 0.00001355 \right] \\ &\approx -1.8 \log_{10}\left[ 0.0000954 + 0.00001355 \right] \\ &= -1.8 \log_{10}(0.00010895) \\ &\approx 7.13 \end{aligned} \]

Calcul de \(\lambda\)

\[ \begin{aligned} \lambda &= \left(\frac{1}{7.13}\right)^2 \\ &\approx (0.1402)^2 \\ &\approx 0.01967 \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Point de fonctionnement sur le diagramme de Moody
Re →λ →ε/D = 0.00135092000.0197
Réflexions

Une valeur de \(\lambda\) d'environ 0.02 est très typique pour des conduites commerciales en régime turbulent. Ce résultat est cohérent et nous permet de passer à la suite des calculs avec confiance.

Points de vigilance

L'erreur la plus commune est de mal gérer les unités de \(\epsilon\) et \(D\). Elles doivent impérativement être identiques avant de faire le rapport. De plus, faites attention à la fonction logarithme sur votre calculatrice (log base 10, et non le logarithme népérien ln).

Points à retenir
  • Le coefficient \(\lambda\) dépend de Re et \(\epsilon/D\) en régime turbulent.
  • La formule de Haaland est un outil puissant pour calculer \(\lambda\) directement.
  • La rugosité relative \(\epsilon/D\) est un paramètre clé qui doit être calculé avec soin.
Le saviez-vous ?

Le diagramme de Moody, publié en 1944, est en fait basé sur les travaux de Hunter Rouse et J. Nikuradse, mais c'est l'ingénieur américain Lewis Ferry Moody qui l'a popularisé sous cette forme graphique extrêmement pratique, qui est devenue un standard mondial.

FAQ
Résultat Final
Le coefficient de perte de charge linéaire \(\lambda\) est d'environ 0.0197.
A vous de jouer

Si la conduite était en PVC lisse (\(\epsilon \approx 0.0015\) mm), quelle serait la nouvelle valeur de \(\lambda\) (en gardant le même Re) ?

Question 4 : Calculer la perte de charge linéaire totale

Principe

La perte de charge linéaire (ou régulière) représente l'énergie perdue par le fluide à cause du frottement continu contre les parois internes de la conduite sur toute sa longueur. Elle est proportionnelle à la longueur de la conduite, au carré de la vitesse, et au coefficient de frottement \(\lambda\), et inversement proportionnelle au diamètre.

Mini-Cours

La formule de Darcy-Weisbach, \(\Delta H_{\text{lin}} = \lambda \frac{L}{D} \frac{v^2}{2g}\), est l'équation universelle pour calculer les pertes de charge linéaires. Le terme \(v^2/2g\) est appelé "hauteur dynamique" et représente l'énergie cinétique du fluide par unité de poids. La formule montre que les pertes de charge augmentent très vite avec la vitesse (au carré !) et sont plus importantes dans les tuyaux longs et de petit diamètre.

Remarque Pédagogique

C'est ici que tous les éléments précédents se rejoignent. Vous avez calculé la vitesse (Q1) et le coefficient \(\lambda\) (Q3). Cette question est une application directe de la formule de Darcy-Weisbach. Soyez méthodique et assurez-vous que toutes vos valeurs sont dans le Système International avant de les injecter dans la formule.

Normes

L'équation de Darcy-Weisbach est un standard fondamental en hydraulique, utilisé dans toutes les normes de dimensionnement de réseaux (par exemple, les normes NF EN pour l'Europe).

Formule(s)

Formule de Darcy-Weisbach

\[ \Delta H_{\text{lin}} = \lambda \frac{L}{D} \frac{v^2}{2g} \]
Hypothèses
  • Le diamètre et la rugosité de la conduite sont constants sur toute la longueur L.
  • L'écoulement est établi (le profil de vitesse ne change plus le long de la conduite).
Donnée(s)
ParamètreSymboleValeurUnité
Coefficient de perte de charge\(\lambda\)0.0197-
Longueur\(L\)250m
Diamètre\(D\)0.2m
Vitesse\(v\)2.546m/s
Gravité\(g\)9.81m/s²
Astuces

Calculez d'abord le terme de hauteur dynamique \(v^2/2g\), car il sera réutilisé pour les pertes de charge singulières. Cela évite de refaire le même calcul plusieurs fois.

Schéma (Avant les calculs)
Visualisation de la Perte de Charge Linéaire

On peut visualiser la perte de charge linéaire comme la pente de la "ligne de charge", qui représente l'énergie totale du fluide.

Conduite LLigne de chargeΔH lin
Calcul(s)

Calcul de la hauteur dynamique

\[ \begin{aligned} \frac{v^2}{2g} &= \frac{(2.546 \text{ m/s})^2}{2 \times 9.81 \text{ m/s}^2} \\ &= \frac{6.482}{19.62} \\ &\approx 0.330 \text{ m} \end{aligned} \]

Calcul de la perte de charge linéaire

\[ \begin{aligned} \Delta H_{\text{lin}} &= 0.0197 \times \frac{250 \text{ m}}{0.2 \text{ m}} \times 0.330 \text{ m} \\ &= 0.0197 \times 1250 \times 0.330 \\ &\approx 8.12 \text{ m} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Valeur de la Perte de Charge Linéaire
Conduite L = 250 mLigne de chargeΔH lin = 8.12 m
Réflexions

Une perte de 8.12 mètres de colonne d'eau sur 250 mètres de conduite est significative. Cela signifie que le fluide a perdu une quantité d'énergie équivalente à celle qu'il aurait fallu pour l'élever de 8.12 mètres. C'est la principale source de perte d'énergie dans ce système.

Points de vigilance

Assurez-vous que L et D sont dans la même unité (mètres). Une erreur courante est d'utiliser D en millimètres. Vérifiez également que vous utilisez bien la vitesse \(v\) et non le débit \(Q_v\) dans la partie \(v^2/2g\).

Points à retenir
  • La formule de Darcy-Weisbach est centrale pour les pertes de charge linéaires.
  • Les pertes de charge sont exprimées en mètres (de colonne de fluide).
  • Elles sont proportionnelles à L et v², et inversement proportionnelles à D.
Le saviez-vous ?

Henry Darcy était un ingénieur français qui, dans les années 1850, a mené des expériences sur l'écoulement de l'eau à travers des lits de sable pour le système de fontaines de la ville de Dijon. Ses travaux ont jeté les bases de l'hydrodynamique des milieux poreux et des calculs de pertes de charge.

FAQ
Résultat Final
La perte de charge linéaire totale est d'environ 8.12 mètres de colonne d'eau.
A vous de jouer

Si la conduite faisait 500 m de long au lieu de 250 m, quelle serait la nouvelle perte de charge linéaire ?

Question 5 : Calculer la perte de charge singulière totale

Principe

Les pertes de charge singulières représentent l'énergie perdue à cause des perturbations locales de l'écoulement. Contrairement aux pertes linéaires qui sont réparties sur toute la longueur, les pertes singulières se produisent en des points précis : coudes, vannes, tés, élargissements, etc. Chaque "accident" de parcours crée des tourbillons qui dissipent de l'énergie.

Mini-Cours

On quantifie la "sévérité" d'une singularité par un coefficient adimensionnel K. Ce coefficient est déterminé expérimentalement et dépend de la géométrie de l'obstacle. Par exemple, un coude brusque a un K plus élevé qu'un coude arrondi. La perte de charge pour chaque singularité est simplement \(K \times (v^2/2g)\). Pour obtenir la perte de charge singulière totale, on additionne les coefficients K de toutes les singularités présentes sur le tronçon et on multiplie cette somme par la hauteur dynamique.

Remarque Pédagogique

Dans les longs pipelines, les pertes de charge linéaires sont souvent dominantes. Cependant, dans les circuits compacts avec de nombreux composants (comme un local technique de piscine ou un circuit de chauffage), les pertes de charge singulières peuvent devenir majoritaires. Il ne faut jamais les négliger.

Normes

Les valeurs des coefficients K sont tabulées dans des manuels de référence en hydraulique et des normes techniques. Ces valeurs sont issues de campagnes d'essais en laboratoire et sont standardisées pour les composants courants (coudes, vannes, etc.).

Formule(s)

Formule des pertes de charge singulières

\[ \Delta H_{\text{sing}} = \left( \sum K_i \right) \frac{v^2}{2g} \]
Hypothèses
  • Les coefficients K fournis sont corrects pour les composants installés.
  • On néglige les interactions entre singularités proches (par exemple, si une vanne est juste après un coude, le K total peut être légèrement différent de la somme des deux K).
Donnée(s)
ComposantSymboleValeurUnité
Coude à 90°\(K_{\text{coude}}\)0.4-
Vanne ouverte\(K_{\text{vanne}}\)0.2-
Hauteur dynamique\(v^2/2g\)0.330m
Astuces

Faites une liste de toutes les singularités mentionnées dans l'énoncé et additionnez leurs coefficients K avant de faire la multiplication finale. Cela évite les erreurs et clarifie le calcul.

Schéma (Avant les calculs)
Visualisation des Pertes Singulières

On peut visualiser les pertes singulières comme des "sauts" ou des chutes brutales sur la ligne de charge, à l'endroit de chaque singularité.

SingularitéLigne de chargeΔH sing
Calcul(s)

Somme des coefficients K

\[ \begin{aligned} \sum K_i &= K_{\text{coude}} + K_{\text{vanne}} \\ &= 0.4 + 0.2 \\ &= 0.6 \end{aligned} \]

Calcul de la perte de charge

\[ \begin{aligned} \Delta H_{\text{sing}} &= 0.6 \times \frac{(2.546 \text{ m/s})^2}{2 \times 9.81 \text{ m/s}^2} \\ &= 0.6 \times 0.330 \text{ m} \\ &\approx 0.198 \text{ m} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Valeur de la Perte de Charge Singulière
SingularitéLigne de chargeΔH sing = 0.20 m
Réflexions

La perte de charge singulière totale est de 0.20 m, ce qui est très faible par rapport à la perte de charge linéaire (8.12 m). Dans ce cas précis d'une longue conduite droite, les frottements sont clairement la source principale de perte d'énergie. Les singularités ne représentent qu'environ 2.4% de la perte totale.

Points de vigilance

Ne pas oublier de singularités est crucial. Lisez attentivement l'énoncé et le schéma pour toutes les identifier. Assurez-vous également d'utiliser la bonne vitesse dans le terme \(v^2/2g\), surtout si le diamètre de la conduite change au niveau d'une singularité (ce qui n'est pas le cas ici).

Points à retenir
  • Les pertes singulières sont localisées au niveau des accidents de parcours.
  • Chaque singularité est caractérisée par un coefficient K.
  • La perte totale est la somme des K multipliée par la hauteur dynamique.
Le saviez-vous ?

Le "coup de bélier" est un phénomène de surpression destructeur qui se produit lors de la fermeture rapide d'une vanne. C'est une manifestation extrême d'un phénomène hydraulique transitoire lié à l'inertie de la colonne d'eau, bien plus complexe qu'une simple perte de charge singulière.

FAQ
Résultat Final
La perte de charge singulière totale est d'environ 0.20 mètre de colonne d'eau.
A vous de jouer

Si on ajoutait un deuxième coude identique sur le parcours, quelle serait la nouvelle perte de charge singulière totale ?

Question 6 : Déterminer la pression au point B

Principe

Le théorème de Bernoulli généralisé est l'outil ultime pour relier la pression, la vitesse et l'altitude entre deux points d'un écoulement. Il repose sur le principe de la conservation de l'énergie : l'énergie totale au point de départ (A) est égale à l'énergie totale au point d'arrivée (B) plus toute l'énergie qui a été perdue en chemin (les pertes de charge).

Mini-Cours

L'équation de Bernoulli se compose de trois termes d'énergie par unité de poids (exprimés en mètres) :

  • \(z\) : Énergie potentielle de position (charge d'altitude).
  • \(P/\rho g\) : Énergie de pression (charge de pression).
  • \(v^2/2g\) : Énergie cinétique (charge de vitesse ou hauteur dynamique).
La somme de ces trois termes est la "charge totale". Dans un fluide réel, cette charge totale diminue le long de l'écoulement à cause des pertes de charge \(\Delta H\).

Remarque Pédagogique

C'est la question de synthèse. Elle utilise tous les résultats que vous avez calculés précédemment. Le choix des points A et B est stratégique : on choisit des points où l'on connaît le maximum d'informations. Ici, le point A (surface libre du réservoir) est idéal car on connaît son altitude, sa pression (atmosphérique) et sa vitesse (nulle).

Normes

L'application du théorème de Bernoulli est une méthode d'analyse fondamentale en ingénierie et n'est pas dictée par une norme spécifique, mais ses résultats sont utilisés pour vérifier que les pressions dans un réseau respectent les normes en vigueur (par exemple, pression minimale au robinet, pression maximale admissible par les tuyaux).

Formule(s)

Théorème de Bernoulli généralisé

\[ \frac{P_A}{\rho g} + \frac{v_A^2}{2g} + z_A = \frac{P_B}{\rho g} + \frac{v_B^2}{2g} + z_B + \Delta H_{\text{totale}} \]
Hypothèses
  • La pression à la surface du réservoir A est la pression atmosphérique. Pour les calculs, on utilise la pression relative, donc on pose \(P_A = 0\).
  • La vitesse à la surface d'un grand réservoir est considérée comme négligeable (\(v_A \approx 0\)).
  • L'écoulement est permanent (les conditions ne varient pas dans le temps).
Donnée(s)
ParamètreSymboleValeurUnité
Altitude en A\(z_A\)100m
Altitude en B\(z_B\)85m
Vitesse en B\(v_B\)2.546m/s
Perte de charge linéaire\(\Delta H_{\text{lin}}\)8.12m
Perte de charge singulière\(\Delta H_{\text{sing}}\)0.20m
Astuces

Réorganisez toujours l'équation de Bernoulli pour isoler le terme inconnu (ici \(P_B/\rho g\)) avant de remplacer par les valeurs numériques. Cela réduit les risques d'erreur de calcul et rend votre démarche plus claire.

Schéma (Avant les calculs)
Bilan énergétique avec la ligne de charge

La pression au point B dépend de la différence entre l'altitude de la ligne de charge en B et l'altitude de la conduite en B.

ConduiteLigne de chargePression + Vitessez_BCharge totale en B
Calcul(s)

Équation de Bernoulli simplifiée

\[ 0 + 0 + z_A = \frac{P_B}{\rho g} + \frac{v_B^2}{2g} + z_B + (\Delta H_{\text{lin}} + \Delta H_{\text{sing}}) \]

Isolement de la charge de pression en B

\[ \frac{P_B}{\rho g} = z_A - z_B - \frac{v_B^2}{2g} - \Delta H_{\text{lin}} - \Delta H_{\text{sing}} \]

Calcul de la charge de pression en B

\[ \begin{aligned} \frac{P_B}{\rho g} &= 100 - 85 - 0.330 - 8.12 - 0.198 \\ &= 15 - 8.648 \\ &= 6.352 \text{ m} \end{aligned} \]

Calcul de la pression \(P_B\)

\[ \begin{aligned} P_B &= 6.352 \text{ m} \times 1000 \text{ kg/m}^3 \times 9.81 \text{ m/s}^2 \\ &\approx 62313 \text{ Pa} \\ &\Rightarrow P_B \approx 62.3 \text{ kPa} \approx 0.62 \text{ bar} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Lignes de Charge et Piézométrique
zA = 100mzB = 85mLigne piézométrique (HGL)Ligne de charge (EGL)PB/ρg=6.35mvB²/2g=0.33m
Réflexions

La pression au point B est positive (0.62 bar), ce qui est indispensable pour éviter la cavitation (vaporisation de l'eau). Cette pression est relativement faible, ce qui est normal après une perte d'énergie importante. Si cette pression était insuffisante pour l'usage prévu, il faudrait soit augmenter le diamètre de la conduite (pour réduire les pertes), soit utiliser un réservoir plus élevé.

Points de vigilance

L'erreur la plus grave serait d'oublier un terme dans l'équation de Bernoulli. Chaque terme (altitude, pression, vitesse, pertes) doit être pris en compte. Attention également aux signes : les pertes de charge sont toujours soustraites de l'énergie du point amont.

Points à retenir
  • Le théorème de Bernoulli est un bilan d'énergie.
  • Énergie en A = Énergie en B + Énergie perdue entre A et B.
  • Le choix judicieux des points de départ et d'arrivée simplifie grandement le calcul.
Le saviez-vous ?

Daniel Bernoulli, un mathématicien suisse du 18ème siècle, a formulé ce principe pour les fluides parfaits (sans viscosité, donc sans pertes de charge). L'équation a ensuite été "généralisée" au 19ème siècle pour inclure le terme de pertes de charge et ainsi pouvoir décrire les écoulements des fluides réels.

FAQ
Résultat Final
La pression relative au point B est d'environ 62.3 kPa (ou 0.62 bar).
A vous de jouer

Si le point B était situé à une altitude de 90 m au lieu de 85 m (toutes autres choses égales), quelle serait la nouvelle pression en bar ?


Outil Interactif : Simulateur de Pertes de Charge

Utilisez les curseurs pour faire varier le débit et le diamètre de la conduite, et observez leur influence sur les pertes de charge et la pression finale au point B.

Paramètres d'Entrée
80 L/s
200 mm
Résultats Clés
Vitesse (m/s) -
Pertes de charge totales (m) -
Pression en B (bar) -

Quiz Final : Testez vos connaissances

1. Si on double le débit dans une conduite en régime turbulent, comment évoluent approximativement les pertes de charge linéaires ?

2. Qu'est-ce que le nombre de Reynolds représente physiquement ?

3. Les pertes de charge singulières sont causées par :

4. Dans le théorème de Bernoulli, que représente le terme \( \frac{P}{\rho g} \) ?

5. Une rugosité plus élevée de la conduite entraîne :


Perte de Charge
Énergie dissipée par un fluide en mouvement, exprimée en hauteur de colonne de fluide (mètres). Elle est due aux frottements (linéaires) et aux obstacles (singulières).
Nombre de Reynolds (Re)
Nombre sans dimension qui caractérise le régime d'écoulement d'un fluide. Il compare les forces d'inertie aux forces de viscosité.
Théorème de Bernoulli
Principe de conservation de l'énergie appliqué aux fluides. Il établit une relation entre la pression, la vitesse et l'altitude d'un fluide en mouvement.
Rugosité (\(\epsilon\))
Mesure des aspérités de la surface intérieure d'une conduite, qui influence les pertes de charge par frottement.
Déterminer les pertes de charge et pressions

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