Conception d’un Système de Drainage Urbain

Conception d’un Système de Drainage Urbain en VRD

Conception d’un Système de Drainage Urbain

Contexte : La gestion des eaux pluviales, un enjeu majeur pour la ville durable.

En Voiries et Réseaux Divers (VRD)Ensemble des travaux et ouvrages liés à la voirie et aux réseaux (eau, assainissement, électricité, etc.) nécessaires à l'aménagement d'un projet urbain ou de génie civil., la gestion des eaux de pluie est essentielle pour prévenir les inondations, protéger l'environnement et assurer la pérennité des infrastructures. L'urbanisation, en imperméabilisant les sols (routes, toitures), accélère le ruissellement et augmente les volumes d'eau à gérer. Le rôle de l'ingénieur est de concevoir un réseau de collecte capable d'évacuer un "débit de pointe" calculé pour une pluie de référence, sans débordement. Cet exercice vous guidera dans le dimensionnement d'une canalisation d'eaux pluviales pour un petit lotissement, en utilisant des méthodes standards du métier.

Remarque Pédagogique : Cet exercice illustre une démarche fondamentale en hydraulique urbaine. Nous partirons des caractéristiques d'une zone à aménager (surfaces, nature des sols) et d'une donnée climatique (l'intensité de la pluie) pour calculer un débit, puis dimensionner un ouvrage (la canalisation) capable de le transiter. C'est le cœur du métier de l'ingénieur VRD : traduire un besoin fonctionnel en caractéristiques techniques.


Objectifs Pédagogiques

  • Calculer la surface active d'un bassin versantSurface géographique qui collecte les eaux de pluie et les dirige vers un même point de sortie (exutoire), comme un cours d'eau ou une canalisation..
  • Déterminer un coefficient de ruissellementRatio (sans dimension, entre 0 et 1) représentant la part de la pluie qui ruisselle et n'est pas infiltrée. 0.9 pour l'asphalte, 0.2 pour une pelouse. pondéré pour une surface hétérogène.
  • Appliquer la méthode rationnelle pour calculer un débit de pointe.
  • Utiliser la formule de Manning-Strickler pour dimensionner une canalisation circulaire.
  • Vérifier la condition d'auto-curage en calculant la vitesse d'écoulement à plein débit.

Données de l'étude

On doit concevoir la canalisation principale d'eaux pluviales pour une nouvelle rue résidentielle. Le bassin versant est constitué des voiries, des trottoirs et des parcelles de jardin avant des habitations. On cherche à dimensionner le collecteur pour une pluie de période de retourDurée statistique moyenne entre deux occurrences d'un événement d'une intensité donnée. Une pluie de période de retour 10 ans a une chance sur dix de se produire chaque année. 10 ans.

Schéma du bassin versant
Limite du bassin versant 7 m (Jardins) 12 m (Voirie) 7 m (Jardins) Longueur = 150 m Vers collecteur
Paramètre Symbole Valeur Unité
Longueur du bassin versant \(L\) 150 \(\text{m}\)
Largeur totale de la voirie (route + trottoirs) \(l_{\text{voirie}}\) 12 \(\text{m}\)
Largeur totale des espaces verts \(l_{\text{verts}}\) 14 \(\text{m}\)
Coefficient de ruissellement (voirie) \(C_{\text{voirie}}\) 0.90 -
Coefficient de ruissellement (espaces verts) \(C_{\text{verts}}\) 0.20 -
Intensité de pluie (retour 10 ans) \(i\) 180 \(\text{mm/h}\)
Coefficient de Manning-Strickler (PVC) \(K\) 100 -
Pente de la canalisation \(I\) 1.0 \(\%\)

Questions à traiter

  1. Calculer la surface totale du bassin versant et le coefficient de ruissellement pondéré.
  2. Calculer le débit de pointe à l'exutoire en utilisant la méthode rationnelle.
  3. Déterminer le diamètre théorique minimum de la canalisation (en mm) par la formule de Manning-Strickler, puis choisir un diamètre normalisé.
  4. Calculer la vitesse d'écoulement à pleine section dans le diamètre normalisé choisi et vérifier la condition d'auto-curage (V > 0.6 m/s).

Les bases de l'Hydraulique Urbaine

Avant de commencer la correction, rappelons les deux formules fondamentales de cet exercice.

1. La Méthode Rationnelle :
C'est une méthode simple et très utilisée pour estimer le débit de pointe maximal généré par une pluie sur un petit bassin versant (< 200 ha). Elle relie le débit à la nature du sol et à l'intensité de la pluie. \[ Q_{\text{p}} = C \cdot i \cdot A \] Où :
- \(Q_{\text{p}}\) est le débit de pointe (\(\text{m}^3/\text{s}\))
- \(C\) est le coefficient de ruissellement (sans dimension)
- \(i\) est l'intensité de la pluie (\(\text{m}/\text{s}\))
- \(A\) est la surface du bassin versant (\(\text{m}^2\))

2. La Formule de Manning-Strickler :
Cette formule empirique décrit la relation entre le débit, la géométrie d'un canal ou d'une conduite, sa pente et sa rugosité. Elle est fondamentale pour dimensionner les réseaux d'assainissement. \[ Q = K \cdot S \cdot R_{\text{h}}^{2/3} \cdot I^{1/2} \] Où :
- \(Q\) est le débit (\(\text{m}^3/\text{s}\))
- \(K\) est le coefficient de Strickler (dépend de la rugosité du matériau)
- \(S\) est la section mouillée (surface de l'eau) (\(\text{m}^2\))
- \(R_{\text{h}}\) est le rayon hydraulique (\(S/P\), P = périmètre mouillé) (\(\text{m}\))
- \(I\) est la pente de la conduite (\(\text{m}/\text{m}\))


Correction : Conception d’un Système de Drainage Urbain

Question 1 : Calculer la surface et le coefficient pondéré

Principe (le concept physique)

Un bassin versant est rarement homogène. Il est composé de différentes surfaces (routes, pelouses, toits...) qui ne réagissent pas de la même manière à la pluie. Une surface imperméable comme l'asphalte génère beaucoup de ruissellement (coefficient C élevé), tandis qu'une pelouse en absorbe une grande partie (C faible). Pour appliquer la méthode rationnelle, on doit calculer un coefficient moyen, pondéré par la superficie de chaque type de surface.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

Le coefficient de ruissellement C est un concept clé qui simplifie des phénomènes complexes d'infiltration, d'évaporation et de stockage de l'eau à la surface. Sa détermination précise peut faire l'objet d'études approfondies, mais pour les projets courants, des valeurs tabulées (comme celles de l'énoncé) sont largement utilisées et acceptées. La pondération par les surfaces est une simple moyenne barycentrique.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Imaginez que le bassin versant est une grande éponge composée de deux matériaux. Une partie est une éponge de cuisine (la pelouse, C=0.2) qui retient beaucoup d'eau, et l'autre est une brique (la route, C=0.9) qui n'absorbe presque rien. Le coefficient pondéré est la capacité d'absorption "moyenne" de cette éponge composite. Plus il y a de brique, plus le C moyen se rapproche de 0.9.

Normes (la référence réglementaire)

En France, la référence historique pour ce type de calcul est l'Instruction Technique de 1977 (Circulaire n° 77-139). Bien que des méthodes plus modernes existent, la méthode rationnelle y est décrite et reste la base pour les projets de petite à moyenne envergure. Les coefficients de ruissellement sont également issus de ce type de document de référence.

Formule(s) (l'outil mathématique)

1. Calcul des surfaces partielles :

\[ A_{\text{voirie}} = L \cdot l_{\text{voirie}} \]
\[ A_{\text{verts}} = L \cdot l_{\text{verts}} \]

2. Calcul de la surface totale :

\[ A_{\text{total}} = A_{\text{voirie}} + A_{\text{verts}} \]

3. Calcul du coefficient pondéré :

\[ C_{\text{pond}} = \frac{A_{\text{voirie}} \cdot C_{\text{voirie}} + A_{\text{verts}} \cdot C_{\text{verts}}}{A_{\text{total}}} \]
Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose que les surfaces sont bien délimitées et que les coefficients de ruissellement choisis sont représentatifs de la réalité du terrain. On néglige les autres types de surface (toitures, etc.) qui sont implicitement incluses dans les deux grandes catégories.

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • \(L = 150 \, \text{m}\)
  • \(l_{\text{voirie}} = 12 \, \text{m}\)
  • \(l_{\text{verts}} = 14 \, \text{m}\)
  • \(C_{\text{voirie}} = 0.90\)
  • \(C_{\text{verts}} = 0.20\)
Astuces(Pour aller plus vite)

Pour le coefficient pondéré, on peut aussi raisonner en pourcentages de surface. \(A_{\text{voirie}}\) représente \(1800/3900 \approx 46\%\) de la surface totale, et \(A_{\text{verts}}\) représente \(2100/3900 \approx 54\%\). Le calcul devient : \(C_{\text{pond}} = (0.46 \times 0.9) + (0.54 \times 0.2) \approx 0.414 + 0.108 \approx 0.522\). C'est une bonne façon de vérifier son calcul.

Schéma (Avant les calculs)
Composition des Surfaces
Voirie (A=?)Verts (A=?)Surface Totale A = ?
Calcul(s) (l'application numérique)

1. Calcul des surfaces :

\[ A_{\text{voirie}} = 150 \, \text{m} \cdot 12 \, \text{m} = 1800 \, \text{m}^2 \]
\[ A_{\text{verts}} = 150 \, \text{m} \cdot 14 \, \text{m} = 2100 \, \text{m}^2 \]
\[ A_{\text{total}} = 1800 \, \text{m}^2 + 2100 \, \text{m}^2 = 3900 \, \text{m}^2 \]

2. Calcul du coefficient pondéré :

\[ \begin{aligned} C_{\text{pond}} &= \frac{1800 \cdot 0.90 + 2100 \cdot 0.20}{3900} \\ &= \frac{1620 + 420}{3900} \\ &= \frac{2040}{3900} \\ &\approx 0.523 \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Répartition et Coefficient Moyen
1800 m²2100 m²A = 3900 m²C_pond ≈ 0.523
Réflexions (l'interprétation du résultat)

La surface totale du projet est de 3900 m² (soit 0.39 hectare). Le coefficient de ruissellement moyen est de 0.523. Cela signifie qu'en moyenne, sur l'ensemble de la zone, 52.3% de la pluie qui tombe va ruisseler et devra être collectée par le réseau. Cette valeur est logique, car les surfaces imperméables et perméables sont en proportions similaires.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

L'erreur classique est de faire une moyenne simple des coefficients ( (0.9 + 0.2) / 2 = 0.55 ) sans tenir compte du poids de chaque surface. Cette erreur est d'autant plus grande que les surfaces sont déséquilibrées. La pondération est une étape indispensable.

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • Identifier tous les types de surface du bassin versant.
  • Calculer la superficie de chaque type.
  • Appliquer la formule du coefficient pondéré (moyenne barycentrique).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Face à l'imperméabilisation croissante, les villes développent des "techniques alternatives" pour la gestion des eaux pluviales. Celles-ci visent à réduire le ruissellement à la source en favorisant l'infiltration : noues paysagères, chaussées drainantes, toitures végétalisées... L'objectif est de réduire le coefficient C global d'un aménagement.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
La surface totale du bassin versant est de 3900 m² et le coefficient de ruissellement pondéré est d'environ 0.523.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Si la largeur de la voirie était de 20 m et celle des jardins de 6 m, quel serait le nouveau C pondéré ?

Question 2 : Calculer le débit de pointe

Principe (le concept physique)

Le débit de pointe est le débit maximal instantané que le réseau devra évacuer. La méthode rationnelle suppose que ce pic est atteint lorsque l'ensemble du bassin versant contribue à l'écoulement à l'exutoire. Le calcul est simple, mais la principale difficulté réside dans la conversion des unités, en particulier celle de l'intensité de la pluie, qui est presque toujours donnée en mm/h.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

La méthode rationnelle a une hypothèse forte : elle suppose que l'intensité de la pluie est constante pendant une durée au moins égale au "temps de concentration" du bassin versant (le temps que met l'eau de la goutte la plus éloignée pour atteindre l'exutoire). C'est pour cela qu'elle est limitée aux petits bassins, où ce temps est court.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Pensez à la formule \(Q = C \cdot i \cdot A\) comme une recette de cuisine. Vous prenez votre surface A (l'ingrédient de base), vous appliquez un "rendement" C (seule une partie de la pluie ruisselle), et vous multipliez par le "débit de l'averse" i. Le plus grand piège est de mélanger les unités, comme mélanger des grammes et des litres sans conversion !

Normes (la référence réglementaire)

L'intensité de pluie \(i\) n'est pas une valeur inventée. Elle est issue de données statistiques de Météo-France, analysées pour une région donnée. Ces analyses produisent des courbes Intensité-Durée-Fréquence (IDF) qui donnent l'intensité \(i\) pour une durée de pluie et une période de retour choisies. Pour les petits projets, on utilise souvent des valeurs forfaitaires régionales.

Formule(s) (l'outil mathématique)

La méthode rationnelle :

\[ Q_{\text{p}} = C_{\text{pond}} \cdot i \cdot A_{\text{total}} \]
Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose que l'intensité de pluie de 180 mm/h est uniforme sur tout le bassin versant et constante pendant le temps de concentration. On admet que la méthode rationnelle est applicable pour un bassin de 0.39 ha.

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • \(C_{\text{pond}} \approx 0.523\)
  • \(A_{\text{total}} = 3900 \, \text{m}^2\)
  • \(i = 180 \, \text{mm/h}\)
Astuces(Pour aller plus vite)

Les ingénieurs utilisent souvent une formule directe qui intègre la conversion : \( Q_{\text{p}} \, (\text{L/s}) = \frac{C \cdot i \, (\text{mm/h}) \cdot A \, (\text{ha})}{360} \). Dans notre cas : \(A = 0.39 \, \text{ha}\). Le calcul devient : \( Q_{\text{p}} = \frac{0.523 \cdot 180 \cdot 0.39}{360} \approx 0.102 \, \text{m}^3/\text{s} = 102 \, \text{L/s}\). C'est beaucoup plus rapide et moins source d'erreurs de zéros.

Schéma (Avant les calculs)
Transformation Pluie -> Débit
Pluie (i)Bassin (C, A)Débit Qp = ?
Calcul(s) (l'application numérique)

1. Conversion de l'intensité en m/s :

\[ \begin{aligned} i &= \frac{180 \, \text{mm/h}}{3600 \cdot 1000} \\ &= \frac{180}{3600000} \\ &= 0.00005 \, \text{m/s} \end{aligned} \]

2. Calcul du débit de pointe :

\[ \begin{aligned} Q_{\text{p}} &= 0.523 \cdot 0.00005 \, \text{m/s} \cdot 3900 \, \text{m}^2 \\ &\approx 0.101985 \, \text{m}^3/\text{s} \end{aligned} \]

3. Conversion en litres par seconde pour une meilleure représentation (1 m³/s = 1000 L/s) :

\[ Q_{\text{p}} \approx 0.102 \, \text{m}^3/\text{s} \times 1000 \approx 102 \, \text{L/s} \]
Schéma (Après les calculs)
Débit de Projet Calculé
180 mm/h3900 m², C=0.523Qp ≈ 102 L/s
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Le débit que notre future canalisation devra pouvoir évacuer sans problème est de 102 L/s. C'est la valeur de référence pour le dimensionnement. Si la canalisation est trop petite, il y aura une mise en charge (l'eau montera dans les regards) et potentiellement un débordement en surface.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

L'erreur la plus commune est de se tromper dans la conversion de l'intensité de pluie. Pour obtenir un débit en m³/s avec une surface en m², l'intensité doit être en m/s. La conversion est : \( i \, (\text{m/s}) = \frac{i \, (\text{mm/h})}{1000 \cdot 3600} \). Ne jamais multiplier directement des mm/h par des m² !

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • La formule est \(Q = C \cdot i \cdot A\).
  • La plus grande attention doit être portée à la cohérence des unités.
  • Le débit calculé est un débit de "pointe", le maximum à transiter.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

La méthode rationnelle est simple, mais elle tend à surestimer les débits car elle est très conservatrice. Pour les grands bassins versants ou les études d'impact détaillées, les ingénieurs utilisent des modèles hydrologiques plus complexes qui simulent l'écoulement de l'eau au fil du temps en fonction de la forme de l'averse (hydrogramme).

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
Le débit de pointe à l'exutoire est d'environ 102 L/s (ou 0.102 m³/s).
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Si une pluie exceptionnelle de 250 mm/h survenait, quel serait le débit de pointe en L/s ?

Question 3 : Déterminer le diamètre de la canalisation

Principe (le concept physique)

La formule de Manning-Strickler nous donne la capacité d'écoulement d'une conduite en fonction de sa taille, sa pente et sa rugosité. Ici, nous allons l'utiliser "à l'envers" : nous connaissons le débit requis (\(Q_{\text{p}}\)), la pente et la rugosité, et nous cherchons la taille (le diamètre D). Le calcul suppose que la conduite fonctionne "à pleine section", c'est-à-dire complètement remplie, mais sans être sous pression.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

Pour une conduite circulaire de diamètre D coulant à pleine section :
- La section mouillée est la surface du disque : \(S = \frac{\pi D^2}{4}\).
- Le périmètre mouillé est la circonférence : \(P = \pi D\).
- Le rayon hydraulique est donc : \(R_{\text{h}} = \frac{S}{P} = \frac{\pi D^2 / 4}{\pi D} = \frac{D}{4}\).
En substituant ces termes dans la formule de Manning-Strickler, on peut isoler D.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Le dimensionnement est un jeu d'équilibre. Un tuyau plus gros est plus sûr mais plus cher. Une pente plus forte augmente la capacité d'un tuyau mais peut nécessiter des terrassements plus coûteux. Le travail de l'ingénieur est de trouver le meilleur compromis technique et économique en jouant sur ces paramètres.

Normes (la référence réglementaire)

Les diamètres des canalisations ne sont pas quelconques. Ils suivent des normes (par exemple, la norme NF EN 1401 pour le PVC) qui définissent des diamètres nominaux (DN) standards. Cela garantit l'interchangeabilité des pièces (coudes, regards, etc.) et simplifie la production. On calcule un diamètre théorique, puis on choisit le DN commercial immédiatement supérieur.

Formule(s) (l'outil mathématique)

La formule de Manning-Strickler est :

\[ Q = K \cdot \left(\frac{\pi D^2}{4}\right) \cdot \left(\frac{D}{4}\right)^{2/3} \cdot I^{1/2} \]

Après réarrangement pour isoler D, on obtient :

\[ D = \left( \frac{4^{5/3} \cdot Q}{K \cdot \pi \cdot I^{1/2}} \right)^{3/8} \]
Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose un écoulement uniforme et permanent à pleine section. Le coefficient de Strickler K=100 est une valeur standard pour des conduites en PVC neuves.

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • \(Q_{\text{p}} = 0.102 \, \text{m}^3/\text{s}\)
  • \(K = 100\)
  • \(I = 1.0\% = 0.01 \, \text{m/m}\)
Astuces(Pour aller plus vite)

Pour éviter les calculs complexes avec les puissances, les ingénieurs utilisent des abaques ou des réglettes de calcul (aujourd'hui des logiciels) qui donnent directement le diamètre en fonction du débit et de la pente pour un K donné. C'est plus rapide et limite les risques d'erreur de calcul.

Schéma (Avant les calculs)
Recherche du Diamètre
D = ?Pour Q = 102 L/s et Pente = 1%
Calcul(s) (l'application numérique)

1. Calcul du diamètre théorique en mètres :

\[ \begin{aligned} D &= \left( \frac{4^{5/3} \cdot 0.102}{100 \cdot \pi \cdot \sqrt{0.01}} \right)^{3/8} \\ &= \left( \frac{10.079 \cdot 0.102}{100 \cdot \pi \cdot 0.1} \right)^{3/8} \\ &= \left( \frac{1.028}{31.416} \right)^{3/8} \\ &= (0.03272)^{3/8} \\ &\approx 0.345 \, \text{m} \end{aligned} \]

2. Conversion en millimètres :

\[ D \approx 345 \, \text{mm} \]

3. Choix du diamètre normalisé : Les diamètres de canalisation sont standardisés. On choisit toujours le diamètre commercial immédiatement supérieur au diamètre théorique calculé. Les diamètres courants sont ...250, 300, 400, 500 mm...
On choisit donc un diamètre normalisé DN 400 mm.

Schéma (Après les calculs)
Choix du Diamètre Normalisé
DN 300 (trop petit)DN 400 (OK)D=400mm
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Le calcul nous donne un diamètre théorique de 345 mm. Comme ce diamètre n'existe pas commercialement, on doit prendre la taille supérieure disponible, soit 400 mm. Utiliser un DN 300 serait insuffisant et provoquerait un débordement. Le choix du diamètre supérieur nous donne une marge de sécurité.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Attention à bien utiliser des unités du Système International (mètres, m³/s) dans la formule de Manning-Strickler. La pente doit être en m/m (ex: 1% = 0.01), et non en pourcentage. Une erreur ici fausserait complètement le résultat.

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • La formule de Manning-Strickler relie le débit, la pente et la géométrie.
  • Pour une conduite circulaire, le rayon hydraulique \(R_{\text{h}} = D/4\).
  • On calcule un diamètre théorique et on choisit le diamètre normalisé supérieur.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Le coefficient K de Strickler diminue avec le temps. Une vieille conduite en béton peut avoir un K de 60 ou 70 à cause des dépôts et de l'usure, réduisant sa capacité de près de 30% par rapport à une conduite neuve. C'est un paramètre crucial dans les diagnostics de réseaux existants.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
Le diamètre théorique requis est de 345 mm. On choisit un diamètre normalisé commercial de DN 400 mm.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Si la pente était de 0.5% seulement, quel diamètre normalisé faudrait-il choisir ? (DN 400, 500 ou 600 ?)

Question 4 : Vérifier la vitesse et l'auto-curage

Principe (le concept physique)

Une fois le diamètre choisi (DN 400), il faut vérifier que la vitesse de l'eau à l'intérieur sera suffisante pour éviter que les sables et autres débris ne se déposent et n'obstruent la canalisation. C'est la condition d'auto-curage. Une vitesse trop faible entraîne une sédimentation, réduisant la capacité de la conduite et augmentant les coûts de maintenance. On calcule donc la vitesse réelle pour le débit de pointe dans notre conduite de 400 mm.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

La condition d'auto-curage est une contrainte de fonctionnement, pas seulement de capacité. On vérifie généralement deux conditions : une vitesse minimale pour le débit de pointe (pour les grosses pluies) et parfois aussi une vitesse minimale pour un débit moyen (pour les pluies fréquentes mais faibles). Une pente suffisante est le meilleur garant d'une bonne vitesse.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Pensez à une rivière. Une rivière avec une forte pente et un courant rapide a un lit de galets propres : le courant emporte tout. Une rivière de plaine avec une pente très faible a un lit vaseux et s'envase : le courant est trop lent pour transporter les sédiments. C'est exactement le même principe dans nos tuyaux !

Normes (la référence réglementaire)

La vitesse minimale d'auto-curage est une règle de l'art. La valeur de 0.6 m/s pour les eaux pluviales est une valeur communément admise en France. Pour les eaux usées, qui contiennent plus de matières solides, on exige souvent des vitesses plus élevées (ex: 0.7 m/s) et des pentes minimales plus fortes.

Formule(s) (l'outil mathématique)

La vitesse d'écoulement est donnée par la relation de base :

\[ V = \frac{Q}{S} \]

Ou directement depuis Manning-Strickler :

\[ V = K \cdot R_{\text{h}}^{2/3} \cdot I^{1/2} \]

On vérifiera que \(V_{\text{pleine}} > V_{\text{min}}\) (avec \(V_{\text{min}} = 0.6 \, \text{m/s}\)).

Hypothèses (le cadre du calcul)

On calcule la vitesse pour une conduite fonctionnant à pleine section. En réalité, pour le débit de pointe de 102 L/s, la conduite de 400 mm ne sera pas totalement pleine. Cependant, la vitesse maximale dans une conduite circulaire est atteinte pour un remplissage d'environ 80%, et elle reste très proche de la vitesse à pleine section. Le calcul à pleine section est donc une approximation simple et légèrement conservative.

Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Diamètre réel choisi, \(D = 400 \, \text{mm} = 0.4 \, \text{m}\)
  • \(K = 100\)
  • \(I = 0.01 \, \text{m/m}\)
Astuces(Pour aller plus vite)

Puisque la vitesse ne dépend que de la géométrie, de la pente et de la rugosité (et non du débit), on peut la calculer avant même de connaître le débit. C'est une caractéristique intrinsèque de la conduite pour une pente donnée. Cela permet de vérifier rapidement si une pente est "auto-curante" quel que soit le débit.

Schéma (Avant les calculs)
Vérification de la Vitesse
V = ?Condition: V > 0.6 m/s ?
Calcul(s) (l'application numérique)

1. Calcul du rayon hydraulique pour la conduite DN 400 :

\[ \begin{aligned} R_{\text{h}} &= \frac{D}{4} \\ &= \frac{0.4 \, \text{m}}{4} \\ &= 0.1 \, \text{m} \end{aligned} \]

2. Calcul de la vitesse à pleine section :

\[ \begin{aligned} V_{\text{pleine}} &= K \cdot R_{\text{h}}^{2/3} \cdot I^{1/2} \\ &= 100 \cdot (0.1)^{2/3} \cdot \sqrt{0.01} \\ &= 100 \cdot 0.2154 \cdot 0.1 \\ &\approx 2.15 \, \text{m/s} \end{aligned} \]

3. Vérification de la condition d'auto-curage :

\[ V_{\text{pleine}} \approx 2.15 \, \text{m/s} > 0.6 \, \text{m/s} \quad (\text{Condition VÉRIFIÉE}) \]
Schéma (Après les calculs)
Vitesse d'Écoulement Validée
V = 2.15 m/sAuto-curage OK ✔️
Réflexions (l'interprétation du résultat)

La vitesse dans la conduite de 400 mm sera de 2.15 m/s. C'est bien supérieur à la vitesse minimale requise de 0.6 m/s, ce qui garantit un bon auto-curage. Il existe aussi une vitesse maximale à ne pas dépasser (généralement 4 m/s) pour éviter l'érosion de la conduite, condition qui est également respectée ici. Notre conception est donc validée.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Ne pas oublier cette vérification ! Une conduite parfaitement dimensionnée pour le débit mais qui ne s'auto-cure pas est une mauvaise conception qui engendrera des problèmes d'exploitation et de maintenance coûteux. C'est une étape aussi importante que le calcul du diamètre.

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • La vitesse se calcule avec la formule \(V = K \cdot R_{\text{h}}^{2/3} \cdot I^{1/2}\).
  • Elle doit être supérieure à une valeur minimale pour assurer l'auto-curage.
  • Une pente suffisante est le principal levier pour obtenir une bonne vitesse.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Les grands collecteurs d'assainissement parisiens, construits au 19ème siècle sous la direction de l'ingénieur Eugène Belgrand, ont été conçus avec des formes ovoïdes. Cette forme astucieuse permet de maintenir une vitesse d'écoulement suffisante même pour des très faibles débits (temps sec), car le fond du "huit" est étroit et concentre le flux.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
La vitesse à pleine section sera de 2.15 m/s. Cette valeur est supérieure à 0.6 m/s, la condition d'auto-curage est donc respectée.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)

Quelle serait la vitesse d'auto-curage (en m/s) pour une conduite DN 800 mm avec la même pente de 1% ?


Outil Interactif : Capacité des Canalisations

Utilisez le graphique pour visualiser la capacité d'évacuation (débit maximal) de différentes canalisations en fonction de leur diamètre pour la pente de l'exercice (1%). La ligne rouge représente le débit que nous devons évacuer.

Paramètres d'Entrée
1.0 %
102 L/s
Résultats Clés
Diamètre Théorique Requis -
Diamètre Normalisé à Choisir -
Vitesse dans le Tuyau Choisi -

Le Saviez-Vous ?

La formule de Manning-Strickler a été développée à la fin du 19ème siècle. L'ingénieur irlandais Robert Manning l'a proposée en 1890, et l'ingénieur suisse Albert Strickler l'a validée et complétée en 1923. Plus de 100 ans plus tard, malgré l'arrivée de modèles informatiques complexes, cette formule empirique reste l'outil de base utilisé quotidiennement par les ingénieurs du monde entier pour concevoir les réseaux d'assainissement.


Foire Aux Questions (FAQ)

Qu'est-ce qu'une "période de retour" de 10 ans ?

Cela ne signifie pas que la pluie arrivera exactement tous les 10 ans. C'est une notion statistique : une pluie de cette intensité a, chaque année, une probabilité de 1/10 (soit 10%) de se produire. Pour des ouvrages critiques (comme la protection d'une autoroute), on utilise des périodes de retour bien plus longues (50, 100 ans ou plus).

Pourquoi ne pas simplement surdimensionner les tuyaux pour être tranquille ?

Pour deux raisons principales. La première est économique : des tuyaux plus gros coûtent plus cher à l'achat et à la pose (tranchées plus larges et plus profondes). La seconde est technique : un tuyau trop grand pour les débits habituels aura une vitesse d'écoulement très faible, ce qui empêchera l'auto-curage. Il se remplirait de sédiments et perdrait son efficacité.


Quiz Final : Testez vos connaissances

1. Si on remplaçait toutes les zones de pelouse par du parking (C=0.9), le débit de pointe serait...

2. Si la pente de la canalisation est doublée (passant de 1% à 2%), sa capacité à évacuer l'eau (débit maximal)...


Bassin Versant
Surface géographique qui collecte les eaux de pluie et les dirige vers un même point de sortie (exutoire).
Coefficient de Ruissellement (C)
Ratio sans dimension (entre 0 et 1) représentant la part de la pluie qui ruisselle au lieu de s'infiltrer. Plus la surface est imperméable, plus C est proche de 1.
Auto-curage
Capacité d'un écoulement dans une canalisation à générer une vitesse suffisante pour transporter les sédiments et éviter leur dépôt.
Conception d’un Système de Drainage Urbain

D’autres exercices de Vrd:

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2 Commentaires
  1. Arnaud Luders Bruny

    c’est un travail excelent, que vous faites sur ce plateforme, je suis ravis de faire partie de cette communaute.

    Réponse
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