Sélection et Calcul de Fondations Superficielles
Contexte : L'interface cruciale entre la structure et le sol.
Toute structure de génie civil, qu'il s'agisse d'un bâtiment, d'un pont ou d'un barrage, repose sur le sol par l'intermédiaire de fondations. Le rôle de la fondation est de transmettre les charges de la structure au sol en toute sécurité, sans causer de rupture du sol (effondrement) ni de tassements excessifs qui pourraient endommager la structure. Le dimensionnement d'une fondation superficielle (ou semelle) est un exercice d'équilibre entre la résistance du sol et les charges appliquées. Cet exercice vous guidera à travers les étapes de calcul et de vérification d'une semelle carrée sous une charge centrée, conformément aux approches réglementaires.
Remarque Pédagogique : Cet exercice est au cœur du métier d'ingénieur en géotechnique. Il combine la mécanique des structures (descente de charges) et la mécanique des sols (capacité portante, tassements). Nous allons appliquer la célèbre théorie de la capacité portante de Terzaghi et vérifier le dimensionnement vis-à-vis des deux états limites principaux : l'État Limite Ultime (ELU) pour la sécurité à la rupture, et l'État Limite de Service (ELS) pour le confort et la durabilité de l'ouvrage.
Objectifs Pédagogiques
- Calculer les charges de calcul à l'État Limite Ultime (ELU) et à l'État Limite de Service (ELS).
- Déterminer la capacité portante d'un sol sous une fondation superficielle à l'aide de la formule de Terzaghi.
- Dimensionner la largeur d'une semelle pour satisfaire le critère de non-poinçonnement à l'ELU.
- Calculer le tassement de la fondation sous les charges de service.
- Vérifier que le tassement reste dans les limites admissibles à l'ELS.
Données de l'étude
Schéma de la fondation superficielle
Paramètre | Symbole | Valeur | Unité |
---|---|---|---|
Charge permanente | \(G\) | 600 | \(\text{kN}\) |
Charge d'exploitation | \(Q\) | 250 | \(\text{kN}\) |
Poids volumique du sol | \(\gamma\) | 18 | \(\text{kN/m}^3\) |
Cohésion effective du sol | \(c'\) | 15 | \(\text{kPa}\) |
Angle de frottement effectif | \(\phi'\) | 25 | \(\text{degrés}\) |
Tassement admissible | \(s_{\text{adm}}\) | 25 | \(\text{mm}\) |
Questions à traiter
- Calculer la charge de calcul à l'État Limite Ultime (ELU).
- Déterminer la largeur minimale de la semelle carrée (B) pour vérifier la condition de portance à l'ELU. On adoptera une largeur multiple de 10 cm.
- Calculer la charge de calcul à l'État Limite de Service (ELS).
- Vérifier que le tassement sous la charge de service est inférieur au tassement admissible.
- Conclure sur les dimensions finales à adopter pour la semelle.
Les bases du calcul de fondations
Avant la correction, rappelons quelques principes de la mécanique des sols appliquée aux fondations.
1. États Limites (ELU et ELS) :
Le calcul aux états limites est une approche de conception qui garantit la sécurité d'une structure.
- L'**État Limite Ultime (ELU)** correspond à la ruine de l'ouvrage (ex: rupture du sol par poinçonnement). On utilise des charges majorées (\(1.35G + 1.5Q\)) pour s'assurer d'avoir une marge de sécurité suffisante contre la catastrophe.
- L'**État Limite de Service (ELS)** correspond à des conditions qui rendent l'ouvrage inapte à son usage normal (ex: tassements excessifs, fissures). On utilise des charges non majorées (\(G+Q\)) car on s'intéresse au comportement de la structure en conditions d'utilisation normales.
2. Capacité Portante de Terzaghi :
La capacité portante ultime (\(q_{\text{ult}}\)) est la contrainte maximale que le sol peut supporter avant de rompre. La formule de Terzaghi pour une semelle carrée est une méthode classique pour l'estimer :
\[ q_{\text{ult}} = 1.3c'N_c + q_0 N_q + 0.4\gamma B N_\gamma \]
Où \(N_c, N_q, N_\gamma\) sont des facteurs de portance qui dépendent uniquement de l'angle de frottement \(\phi'\), et \(q_0 = \gamma D_f\) est la contrainte due au poids des terres à la base de la fondation.
3. Calcul du Tassement :
Le tassement est la déformation verticale du sol sous la charge de la fondation. Pour une semelle rigide sur un sol cohérent, une méthode simplifiée couramment utilisée est :
\[ s = \frac{\pi}{4} \frac{q_{\text{net}} B}{E_{\text{oed}}} (1 - \nu^2) \]
Où \(q_{\text{net}}\) est la contrainte nette appliquée par la fondation, \(E_{\text{oed}}\) est le module oedométrique du sol (une mesure de sa rigidité) et \(\nu\) est son coefficient de Poisson.
Correction : Sélection et Calcul de Fondations Superficielles
Question 1 : Calculer la charge de calcul à l'État Limite Ultime (ELU)
Principe (le concept physique)
L'État Limite Ultime (ELU) représente la condition de sécurité maximale, celle qui prévient la ruine de l'ouvrage. Pour s'assurer que la structure ne s'effondrera jamais, même dans les conditions les plus défavorables, on majore les charges par des coefficients de sécurité. Les charges permanentes (G), qui sont bien connues (poids propre), sont moins majorées que les charges d'exploitation (Q), qui sont plus variables et incertaines (personnes, mobilier, neige).
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Cette approche de pondération des charges est au cœur des normes de calcul modernes comme les Eurocodes. Elle remplace l'ancienne méthode de la contrainte admissible unique. L'idée est de séparer les incertitudes liées aux charges (coefficients \(\gamma_G, \gamma_Q\)) de celles liées à la résistance des matériaux (facteurs partiels sur c', tan(\(\phi'\)), etc.). Cela permet une gestion plus rationnelle et économique de la sécurité.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Pensez à l'ELU comme à un scénario "catastrophe". On imagine que le bâtiment est chargé au maximum de sa capacité (fête avec beaucoup de monde, forte chute de neige, etc.) et on s'assure que même dans ce cas extrême, la fondation ne poinçonne pas le sol. C'est le calcul de la **résistance**.
Normes (la référence réglementaire)
La combinaison de charges pour l'ELU est définie par l'Eurocode 0 (EN 1990) - Bases de calcul des structures. Pour les bâtiments, la combinaison fondamentale la plus courante est \(1.35G + 1.5Q\).
Formule(s) (l'outil mathématique)
La charge de calcul à l'ELU, notée \(P_{\text{ELU}}\), est donnée par :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que les valeurs de G et Q fournies sont les charges caractéristiques (non pondérées) et que la combinaison \(1.35G + 1.5Q\) est la plus défavorable pour ce cas de figure.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Charge permanente, \(G = 600 \, \text{kN}\)
- Charge d'exploitation, \(Q = 250 \, \text{kN}\)
Astuces(Pour aller plus vite)
Ce calcul est une première étape systématique dans tout projet de structure. Il est simple mais fondamental. Assurez-vous de ne pas inverser les coefficients ; le coefficient le plus élevé (1.5) s'applique toujours à la charge la plus incertaine (Q).
Schéma (Avant les calculs)
Pondération des Charges à l'ELU
Calcul(s) (l'application numérique)
Schéma (Après les calculs)
Résultat de la Charge de Calcul ELU
Réflexions (l'interprétation du résultat)
La charge de calcul de 1185 kN est la force que la fondation devra être capable de transmettre au sol sans risque de rupture. C'est cette valeur, et non la somme simple des charges (850 kN), qui sera utilisée pour le dimensionnement à la résistance.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Ne jamais utiliser les charges de l'ELU pour un calcul de tassement, et inversement. Les tassements sont un phénomène de déformation à long terme qui se produit sous les charges de service normales, pas sous des charges extrêmes hypothétiques.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- L'ELU concerne la **sécurité** et la **résistance**.
- On utilise des charges majorées par des coefficients de sécurité.
- La combinaison standard pour les bâtiments est \(1.35G + 1.5Q\).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Dans certains cas (par exemple, pour vérifier la stabilité au soulèvement d'une structure légère), la combinaison de charges la plus défavorable peut être \(0.9G\), où l'on minore la charge permanente pour simuler le cas où elle n'aide pas à stabiliser l'ouvrage.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Si G = 800 kN et Q = 400 kN, quelle serait la charge \(P_{\text{ELU}}\) en kN ?
Question 2 : Déterminer la largeur minimale de la semelle (B)
Principe (le concept physique)
Le sol sous la fondation a une capacité de résistance limitée, appelée capacité portante. Si la contrainte appliquée par la fondation (\(P_{\text{ELU}} / B^2\)) dépasse cette capacité portante, le sol "cèdera" sous la charge, un phénomène appelé poinçonnement. Notre objectif est de rendre la surface de la semelle (B²) suffisamment grande pour que la contrainte appliquée reste inférieure à la résistance du sol, avec une marge de sécurité.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
La formule de Terzaghi décompose la résistance du sol en trois termes : un terme lié à la cohésion (\(c'\)), un terme lié à la surcharge (\(q_0\)) et un terme lié au poids du sol lui-même et à la largeur de la fondation (B). Les facteurs de portance \(N_c, N_q, N_\gamma\) sont des coefficients adimensionnels qui traduisent la manière dont le sol se mobilise pour résister à l'enfoncement. Ils augmentent très rapidement avec l'angle de frottement \(\phi'\).
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
C'est un calcul itératif. La capacité portante dépend de la largeur B (via le terme \(N_\gamma\)), mais on a besoin de la capacité portante pour trouver B. En pratique, on fait une première estimation de B (par exemple 2m), on calcule la portance, on en déduit un nouveau B, et on recommence jusqu'à ce que la valeur converge. Pour simplifier ici, on fera une seule itération.
Normes (la référence réglementaire)
L'Eurocode 7 (Calcul géotechnique) fournit les méthodes de calcul pour la capacité portante. Il introduit des facteurs partiels de sécurité à appliquer sur les propriétés du sol (\(\gamma_{c'}\), \(\gamma_{\phi'}\)) et sur la résistance (\(\gamma_R\)). Pour cet exercice, nous utiliserons une approche globale simplifiée avec un facteur de sécurité global (généralement pris égal à 3 sur la portance ultime).
Formule(s) (l'outil mathématique)
Condition de résistance à l'ELU : \( \sigma_{\text{sol}} \le q_{\text{adm}} \). Avec \(\sigma_{\text{sol}} = \frac{P_{\text{ELU}}}{B^2}\) et \(q_{\text{adm}} = \frac{q_{\text{ult}}}{FS}\). La formule de Terzaghi pour une semelle carrée est :
Avec \(q_0 = \gamma D_f\). Pour \(\phi' = 25^\circ\), les abaques donnent \(N_c \approx 20.7\), \(N_q \approx 10.7\), \(N_\gamma \approx 10.9\).
Hypothèses (le cadre du calcul)
On utilise la formule de Terzaghi, valable pour une fondation rigide sur un sol homogène avec une charge centrée. On néglige le poids propre de la semelle en première approche (on le compensera par le poids des terres excavées). On utilise un facteur de sécurité global \(FS = 3\).
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- \(P_{\text{ELU}} = 1185 \, \text{kN}\)
- \(\gamma = 18 \, \text{kN/m}^3\), \(c' = 15 \, \text{kPa} = 15 \, \text{kN/m}^2\), \(\phi' = 25^\circ\)
- \(D_f = 1.0 \, \text{m}\)
- Facteurs de portance : \(N_c=20.7, N_q=10.7, N_\gamma=10.9\)
Astuces(Pour aller plus vite)
Pour la première itération, on peut négliger le troisième terme (\(0.4\gamma B N_\gamma\)) qui est souvent plus faible que les deux autres, surtout pour des largeurs B modérées. Cela donne une première estimation rapide de la surface requise.
Schéma (Avant les calculs)
Équilibre des contraintes sous la semelle
Calcul(s) (l'application numérique)
1. Calcul de la surcharge \(q_0\) :
2. Estimation de B en négligeant le 3ème terme :
3. On choisit \(B = 2.5 \, \text{m}\) et on vérifie avec la formule complète :
Vérification : \(189.6 \, \text{kPa} \le 264.15 \, \text{kPa}\). La condition est vérifiée.
Schéma (Après les calculs)
Vérification de la Portance
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Une semelle carrée de 2.5m de côté est nécessaire pour répartir la charge de calcul ELU sur une surface suffisante afin que la contrainte transmise au sol (189.6 kPa) soit inférieure à la résistance admissible du sol (264.15 kPa). La marge de sécurité est confortable.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Attention aux unités ! Les charges sont en kN, les dimensions en m, les propriétés du sol en kPa (kN/m²) et kN/m³. Il faut être très rigoureux pour ne pas mélanger les unités. Par exemple, c' = 15 kPa doit être utilisé comme 15 kN/m² dans les calculs.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- Le dimensionnement à l'ELU consiste à vérifier que \(\sigma_{\text{sol}} \le q_{\text{adm}}\).
- La capacité portante \(q_{\text{ult}}\) dépend des propriétés du sol (c', \(\phi'\)) et de la géométrie de la fondation (B, Df).
- Le calcul est souvent itératif car \(q_{\text{ult}}\) dépend de B.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
La présence d'une nappe phréatique près de la surface peut réduire considérablement la capacité portante. En effet, le poids volumique du sol à utiliser dans les calculs devient le poids volumique déjaugé (\(\gamma' = \gamma_{sat} - \gamma_w\)), qui est presque deux fois plus faible que le poids volumique total. C'est un point de vigilance majeur dans tout projet de fondation.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Si la cohésion du sol était nulle (c'=0, un sable pur), la portance admissible \(q_{\text{adm}}\) (en kPa) pour B=2.5m serait-elle plus grande ou plus faible ? Calculez-la.
Question 3 : Calculer la charge de calcul à l'État Limite de Service (ELS)
Principe (le concept physique)
L'État Limite de Service (ELS) s'intéresse au comportement de la structure dans ses conditions normales d'utilisation. On ne cherche plus à éviter la ruine, mais à garantir le confort des usagers et la durabilité de l'ouvrage (éviter les fissures, les problèmes de pente, etc.). Pour cela, on utilise les charges réelles, non majorées, car ce sont elles qui provoquent les déformations (tassements) au quotidien.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
La combinaison de charges à l'ELS est dite "quasi-permanente" ou "fréquente" selon les vérifications. Pour le calcul des tassements à long terme, la combinaison la plus simple et la plus courante est la combinaison caractéristique (ou rare), qui est simplement la somme des charges non pondérées. Cette charge représente une situation d'exploitation normale mais chargée.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Pensez à l'ELS comme au calcul du **confort** et de l'**apparence**. Une porte qui coince à cause d'un tassement excessif ne met pas le bâtiment en danger de s'effondrer (problème d'ELU), mais elle le rend impropre à son usage (problème d'ELS). C'est pourquoi les deux vérifications sont complémentaires et indispensables.
Normes (la référence réglementaire)
La combinaison de charges à l'ELS est également définie par l'Eurocode 0 (EN 1990). Pour les tassements, la combinaison caractéristique est \(G + Q\).
Formule(s) (l'outil mathématique)
La charge de calcul à l'ELS, notée \(P_{\text{ELS}}\), est donnée par :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On considère la combinaison de charges caractéristique comme pertinente pour la vérification du tassement total.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Charge permanente, \(G = 600 \, \text{kN}\)
- Charge d'exploitation, \(Q = 250 \, \text{kN}\)
Astuces(Pour aller plus vite)
Il n'y a pas d'astuce particulière ici, c'est une simple addition. L'important est de ne pas se tromper et d'utiliser cette charge ELS pour les calculs de déformation, et non la charge ELU.
Schéma (Avant les calculs)
Combinaison des Charges à l'ELS
Calcul(s) (l'application numérique)
Schéma (Après les calculs)
Résultat de la Charge de Calcul ELS
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Cette charge de 850 kN représente la force "normale" maximale que la fondation transmettra au sol au cours de sa vie. C'est cette charge qui va causer le tassement à long terme de la fondation. Elle est significativement plus faible que la charge ELU (1185 kN).
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
L'erreur classique est d'utiliser la mauvaise combinaison de charges. Toujours se demander : "Est-ce que je calcule une résistance (ELU) ou une déformation (ELS) ?". La réponse à cette question dicte la combinaison à utiliser.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- L'ELS concerne le **confort**, l'**aptitude au service** et la **durabilité**.
- On utilise des charges non majorées (ou avec des coefficients proches de 1).
- La combinaison standard pour les tassements est \(G + Q\).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Pour les calculs de fluage à long terme du béton, on utilise une autre combinaison ELS dite "quasi-permanente", qui est \(G + \psi_2 Q\), où \(\psi_2\) est un coefficient réducteur (ex: 0.3 pour un bâtiment résidentiel) car seule une petite partie de la charge d'exploitation est présente en permanence.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Si G = 800 kN et Q = 400 kN, quelle serait la charge \(P_{\text{ELS}}\) en kN ?
Question 4 : Vérifier le tassement à l'ELS
Principe (le concept physique)
Sous l'effet de la charge de service, le sol se comprime comme une éponge, ce qui entraîne un enfoncement de la fondation appelé tassement. Ce tassement doit rester faible pour ne pas causer de désordres dans la structure (fissures, problème d'ouverture des portes, etc.). On calcule donc le tassement attendu sous la charge ELS et on le compare à une limite jugée acceptable pour le type d'ouvrage.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Le tassement a trois composantes : le tassement immédiat (élastique), le tassement de consolidation (expulsion de l'eau des pores, pour les sols fins saturés) et le tassement secondaire (fluage du squelette solide). Les formules simplifiées, comme celle utilisée ici, estiment principalement le tassement élastique et de consolidation à long terme. Le module oedométrique \(E_{\text{oed}}\) est une mesure de la raideur du sol en compression verticale, il est souvent estimé par des corrélations empiriques. Une corrélation courante pour les sables argileux est \(E_{\text{oed}} \approx 500 \cdot c'\).
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Le calcul de tassement est l'une des tâches les plus délicates en géotechnique, car il dépend de nombreux paramètres difficiles à mesurer précisément. Les formules simples donnent un ordre de grandeur. Pour les projets importants, on utilise des méthodes plus complexes (sommation des couches) ou des modèles numériques.
Normes (la référence réglementaire)
L'Eurocode 7 fournit des méthodes de calcul de tassement. Les tassements admissibles ne sont pas fixés de manière absolue mais dépendent du type de structure. Pour un bâtiment courant en béton armé, un tassement total de 25 à 50 mm est souvent considéré comme acceptable, avec un tassement différentiel (différence de tassement entre deux points) encore plus restrictif.
Formule(s) (l'outil mathématique)
On utilise une formule de tassement pour semelle rigide :
Où \(q_{\text{net}} = \frac{P_{\text{ELS}}}{B^2} - q_0\) est la contrainte nette. \(\mu_0\) et \(\mu_1\) sont des coefficients de forme et de profondeur (on prendra \(\mu_0 \approx 0.88\) pour un carré et \(\mu_1 \approx 0.8\) pour Df/B=1/2.5=0.4).
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que le sol est un milieu élastique semi-infini. On estime le module oedométrique par la corrélation \(E_{\text{oed}} = 500 \cdot c'\). On néglige le tassement de consolidation secondaire.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- \(P_{\text{ELS}} = 850 \, \text{kN}\)
- \(B = 2.5 \, \text{m}\)
- \(q_0 = 18 \, \text{kPa}\)
- \(c' = 15 \, \text{kPa}\)
- \(s_{\text{adm}} = 25 \, \text{mm}\)
Astuces(Pour aller plus vite)
La contrainte nette \(q_{\text{net}}\) est la surcharge "réelle" apportée par la structure au niveau de la fondation, une fois qu'on a retiré le poids des terres qui ont été excavées pour construire la fondation. C'est cette surcharge nette qui cause le tassement.
Schéma (Avant les calculs)
Phénomène de Tassement
Calcul(s) (l'application numérique)
1. Calcul du module oedométrique \(E_{\text{oed}}\) :
2. Calcul de la contrainte nette \(q_{\text{net}}\) :
3. Calcul du tassement \(s\) :
4. Vérification :
Schéma (Après les calculs)
Vérification du Tassement
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Le tassement calculé (27.7 mm) est légèrement supérieur au tassement admissible (25 mm). La fondation de 2.5m x 2.5m, bien que parfaitement sûre vis-à-vis de la rupture (ELU), ne satisfait pas au critère de confort et de service (ELS). En tant qu'ingénieur, il faut donc revoir le dimensionnement.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
L'estimation du module du sol (\(E_{\text{oed}}\)) est la plus grande source d'incertitude. Une petite variation de ce module a un impact direct et proportionnel sur le tassement calculé. Il est crucial d'utiliser des corrélations prudentes ou, idéalement, des résultats d'essais in situ (pressiomètre, etc.).
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- Le dimensionnement à l'ELS consiste à vérifier que \(s_{\text{calculé}} \le s_{\text{admissible}}\).
- Le tassement dépend de la contrainte nette, de la largeur de la semelle et de la rigidité du sol.
- Une fondation peut être sûre à l'ELU mais inacceptable à l'ELS.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
La Tour de Pise penche à cause d'un tassement différentiel. Le sol sous le côté sud de la tour est plus compressible que sous le côté nord. Au fil des siècles, ce tassement inégal a provoqué l'inclinaison célèbre. Les travaux de stabilisation modernes ont consisté à extraire une petite quantité de sol du côté nord pour faire "redresser" légèrement la tour.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Quelle serait la nouvelle largeur B (en m, multiple de 0.1m) à adopter pour que le tassement soit juste inférieur à 25 mm ? (Indice: le tassement est proportionnel à B, mais aussi à q_net qui dépend de 1/B²...)
Question 5 : Conclure sur les dimensions finales
Principe (le concept physique)
La conception d'une fondation est un processus de synthèse. Après avoir effectué les vérifications séparées à l'ELU (résistance) et à l'ELS (déformation), il faut choisir les dimensions qui satisfont **toutes** les conditions. La dimension finale sera la plus grande des dimensions requises par chaque vérification.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Dans la plupart des cas pour les fondations sur des sols de qualité moyenne à bonne, c'est la vérification à l'ELU (capacité portante) qui dimensionne la fondation. Cependant, pour les sols très compressibles (argiles molles, tourbes) ou pour les structures très sensibles aux tassements (bâtiments avec des façades en verre, équipements de précision), c'est souvent la vérification à l'ELS (tassement) qui devient le critère le plus contraignant et qui impose la taille de la fondation.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
C'est ici que l'ingénieur prend sa décision finale. Le calcul nous a montré que la sécurité à la rupture est assurée avec B=2.5m, mais que le confort n'est pas garanti. Il faut donc augmenter la taille de la fondation, non pas pour la rendre plus "solide", mais pour mieux répartir la charge et limiter l'enfoncement.
Normes (la référence réglementaire)
Les normes de conception exigent que toutes les conditions pertinentes (ELU, ELS, et parfois d'autres comme la fatigue ou les états limites accidentels) soient satisfaites. Le rapport de calcul final doit présenter chaque vérification et justifier le choix des dimensions finales sur la base du critère le plus défavorable.
Formule(s) (l'outil mathématique)
La dimension finale à retenir est le maximum des dimensions requises par chaque état limite :
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que les deux états limites (portance et tassement) sont les seuls à considérer pour ce projet simple.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Largeur requise par l'ELU, \(B_{\text{ELU}} = 2.50 \, \text{m}\)
- Largeur requise par l'ELS (calculée à la question précédente ou "à vous de jouer"), \(B_{\text{ELS}} \approx 2.80 \, \text{m}\)
Astuces(Pour aller plus vite)
En pratique, on arrondit toujours les dimensions des fondations à des valeurs constructibles, généralement au 5 ou 10 cm supérieur. Une semelle de 2.74 m sera construite avec une largeur de 2.75 m ou 2.80 m.
Schéma (Avant les calculs)
Comparaison des Dimensions Requises
Calcul(s) (l'application numérique)
On compare les deux largeurs minimales requises :
On choisit donc une semelle carrée de 2.80 m de côté.
Schéma (Après les calculs)
Dimension Finale de la Semelle
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Dans ce cas de figure, c'est le critère de tassement (ELS) qui est dimensionnant. Bien qu'une semelle de 2.50m soit assez solide, elle n'est pas assez rigide pour limiter les déformations. Il faut l'élargir à 2.80m. Cela garantit que la fondation est non seulement sûre, mais aussi qu'elle se comportera correctement en service.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Ne jamais conclure après une seule vérification. Un projet de fondation n'est complet que lorsque tous les états limites pertinents ont été vérifiés et que la dimension retenue satisfait le cas le plus défavorable.
Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
- Le dimensionnement final est le résultat d'une synthèse des différentes vérifications.
- La dimension retenue doit satisfaire **à la fois** l'ELU et l'ELS.
- On choisit toujours la dimension la plus grande (la plus sûre) issue des différents calculs.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Pour les très grands bâtiments comme les gratte-ciels, les fondations sont souvent des "radiers", d'immenses dalles de béton qui couvrent toute la surface du bâtiment. Pour le Burj Khalifa à Dubaï, le radier de 3.7m d'épaisseur repose sur plus de 192 pieux forés à plus de 50m de profondeur pour trouver un sol suffisamment résistant.
FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant parrapport a la question)
Si le tassement admissible avait été de 30 mm, quelle aurait été la dimension finale de la semelle (en m) ?
Outil Interactif : Stabilité d'un Sol
Modifiez les contraintes et les propriétés du sol pour voir leur influence sur le cercle de Mohr et la sécurité.
Paramètres d'Entrée
Résultats Clés
Le Saviez-Vous ?
Karl von Terzaghi (1883-1963) est considéré comme le "père de la mécanique des sols moderne". C'est lui qui a développé le concept de "contrainte effective", qui stipule que la résistance d'un sol ne dépend que de la contrainte transmise par le squelette solide, et non de la pression de l'eau dans les pores. Cette idée a révolutionné la géotechnique et reste la pierre angulaire de tous les calculs de stabilité aujourd'hui.
Foire Aux Questions (FAQ)
Pourquoi le cisaillement \(\tau_{\text{xy}}\) est-il positif sur un axe et négatif sur l'autre ?
Pour que le petit élément de sol soit en équilibre statique (ne tourne pas sur lui-même), la somme des moments doit être nulle. Cela impose que les contraintes de cisaillement sur les faces adjacentes soient égales en magnitude mais de sens opposé. Sur le cercle de Mohr, cela se traduit par des points diamétralement opposés \((\sigma_{\text{x}}, \tau_{\text{xy}})\) et \((\sigma_{\text{y}}, -\tau_{\text{xy}})\).
Que se passe-t-il si le cercle de Mohr est entièrement à gauche de l'axe vertical ?
Cela signifie que la contrainte principale majeure \(\sigma_1\) est négative. En mécanique des sols, la compression est positive, donc un \(\sigma\) négatif signifie une traction. La plupart des sols (sable, argile) ont une résistance à la traction quasi nulle et se fissureraient immédiatement dans une telle situation.
Quiz Final : Testez vos connaissances
1. Si la cohésion (c') d'un sol augmente, la droite de rupture de Mohr-Coulomb...
2. Un état de contrainte où \(\sigma_{\text{x}} = \sigma_{\text{y}} = 100 \, \text{kPa}\) et \(\tau_{\text{xy}} = 0 \, \text{kPa}\) est représenté sur le diagramme de Mohr par...
- Contraintes Principales (\(\sigma_1, \sigma_3\))
- Les valeurs extrêmes (maximale et minimale) de la contrainte normale en un point. Elles agissent sur des plans où le cisaillement est nul.
- Critère de Mohr-Coulomb
- Un modèle mathématique qui définit la limite de résistance d'un sol en fonction de la contrainte normale, de la cohésion et de l'angle de frottement.
- Cohésion (c')
- La résistance au cisaillement d'un sol lorsque la contrainte normale est nulle. C'est la "colle" entre les particules de sol, particulièrement importante pour les argiles.
- Angle de Frottement (\(\phi'\))
- Un paramètre qui décrit comment la résistance au cisaillement d'un sol augmente avec la contrainte normale. Il représente la friction entre les grains de sol.
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