Théorie des Poutres
La théorie des poutres est une branche fondamentale de la résistance des matériaux et de la mécanique des solides déformables. Elle vise à modéliser et à analyser le comportement mécanique (efforts internes, contraintes, déformations) des éléments de structure élancés, appelés poutres, soumis à des charges transversales ou longitudinales. Cette théorie, basée sur des hypothèses simplificatrices, fournit des outils essentiels pour la conception et le dimensionnement de nombreux éléments structuraux courants tels que les poutres de planchers, les linteaux, les éléments de charpente, les arbres de transmission, etc. Ce cours présente les concepts de base, les hypothèses fondamentales, les équations d'équilibre et de comportement, ainsi que les méthodes d'analyse des poutres.
Sommaire
- 1. Introduction et Définitions
- 2. Hypothèses Fondamentales (Euler-Bernoulli)
- 3. Sollicitations Internes : Effort Tranchant et Moment Fléchissant
- 4. Contraintes dans les Poutres Fléchies
- 4.1 Contraintes Normales dues à la Flexion (\(\sigma\))
- 4.2 Formule de Navier (\(\sigma = -M_y z / I_y\))
- 4.3 Moment Quadratique (Inertie) de la Section (\(I\))
- 4.4 Contraintes de Cisaillement dues à l'Effort Tranchant (\(\tau\))
- 4.5 Formule de Collignon-Jourawski (\(\tau = T S_y / (I_y b)\))
- 4.6 Distribution des Contraintes dans la Section
- 5. Déformation des Poutres (Déformée)
- 6. Cas Particuliers et Extensions
- 7. Applications en Génie Civil
- 8. Conclusion
1. Introduction et Définitions
1.1 Qu'est-ce qu'une Poutre ? (Géométrie, Ligne Moyenne)
En résistance des matériaux, une poutre est un solide engendré par une surface plane (la section droite) dont le centre de gravité décrit une courbe appelée ligne moyenne. La principale caractéristique d'une poutre est que ses dimensions transversales (largeur, hauteur de la section) sont petites par rapport à sa longueur le long de la ligne moyenne.
Dans ce cours, nous nous concentrerons principalement sur les poutres droites (ligne moyenne rectiligne) à section constante ou lentement variable, soumises à des charges agissant dans un plan de symétrie (flexion plane).
Schéma d'une poutre droite.
1.2 Types de Charges et d'Appuis
Les poutres peuvent être soumises à différents types de charges :
- Charges concentrées : Forces ou moments appliqués en un point précis.
- Charges réparties : Forces ou moments distribués sur une longueur de la poutre (ex: charge uniformément répartie \(q\), charge triangulaire).
Elles reposent sur des appuis qui assurent leur équilibre et introduisent des réactions :
- Appui simple (ou ponctuel) : Empêche le déplacement vertical, permet la rotation et le déplacement horizontal. Réaction : une force verticale.
- Articulation (ou rotule) : Empêche les déplacements vertical et horizontal, permet la rotation. Réactions : une force verticale et une force horizontale.
- Encastrement : Empêche tous les déplacements et la rotation. Réactions : une force verticale, une force horizontale et un moment d'encastrement.
Une poutre est isostatique si les réactions d'appuis peuvent être déterminées uniquement par les équations de la statique. Elle est hyperstatique si elle possède plus de liaisons que nécessaire, nécessitant des équations supplémentaires (basées sur les déformations) pour déterminer les réactions.
1.3 Objectifs de la Théorie des Poutres
La théorie des poutres vise à :
- Déterminer les sollicitations internes (effort normal, effort tranchant, moment fléchissant, moment de torsion) en tout point de la poutre.
- Calculer les contraintes (normales \(\sigma\) et tangentielles \(\tau\)) induites par ces sollicitations dans les sections droites.
- Calculer les déformations (flèche, rotation) de la poutre sous l'effet des charges.
- Fournir les bases pour le dimensionnement des poutres, c'est-à-dire choisir les dimensions et le matériau de la section pour qu'elle résiste en toute sécurité aux sollicitations et que les déformations restent admissibles.
2. Hypothèses Fondamentales (Euler-Bernoulli)
La théorie classique des poutres, dite d'Euler-Bernoulli, repose sur un ensemble d'hypothèses simplificatrices qui permettent de développer un modèle mathématique tractable.
2.1 Hypothèses Géométriques
- La poutre est initialement droite et sa section est constante ou varie lentement.
- La poutre possède au moins un plan de symétrie contenant la ligne moyenne.
- Les charges sont appliquées dans ce plan de symétrie (flexion plane).
- Les dimensions de la section droite sont petites devant la longueur de la poutre.
2.2 Hypothèses Cinématiques (Navier-Bernoulli)
C'est l'hypothèse clé : les sections droites planes et normales à la ligne moyenne avant déformation restent planes et normales à la ligne moyenne déformée après déformation.
Illustration de l'hypothèse de Navier-Bernoulli.
Cette hypothèse implique que le glissement transversal (distorsion due à l'effort tranchant) est négligé. Elle conduit à une variation linéaire de la déformation normale \(\epsilon_x\) sur la hauteur de la section.
2.3 Hypothèses sur le Matériau
- Homogénéité : Les propriétés du matériau sont les mêmes en tout point.
- Isotropie : Les propriétés du matériau sont les mêmes dans toutes les directions.
- Élasticité linéaire : Le matériau suit la loi de Hooke (\(\sigma = E \epsilon\)), où \(E\) est le module d'Young. Les déformations sont réversibles.
2.4 Domaine de Validité
La théorie d'Euler-Bernoulli donne de bons résultats pour les poutres élancées (longueur >> dimensions transversales) soumises à de petites déformations. Elle est moins précise lorsque l'effort tranchant est important par rapport au moment fléchissant (poutres courtes et épaisses, zones proches des appuis ou des charges concentrées), car elle néglige la déformation due au cisaillement (voir théorie de Timoshenko).
3. Sollicitations Internes : Effort Tranchant et Moment Fléchissant
3.1 Torseur de Cohésion (Rappel)
En coupant la poutre par une section droite S d'abscisse \(x\), les efforts internes exercés par la partie droite sur la partie gauche sont représentés par le torseur de cohésion \(\{ \mathcal{T}_{II/I} \}_G\), composé de la résultante \(\vec{R} = N\vec{x} + T_y\vec{y} + T_z\vec{z}\) et du moment résultant \(\vec{M_G} = M_t\vec{x} + M_{fy}\vec{y} + M_{fz}\vec{z}\).
3.2 Effort Normal (N), Effort Tranchant (T), Moment Fléchissant (M)
Dans le cas de la flexion plane dans le plan (x, z), les seules composantes non nulles du torseur de cohésion sont :
- L'effort normal \(N(x)\) (peut être nul en flexion simple).
- L'effort tranchant \(T_z(x)\) (souvent noté simplement \(T(x)\) ou \(V(x)\)).
- Le moment fléchissant \(M_{fy}(x)\) (souvent noté simplement \(M(x)\)).
3.3 Conventions de Signes
Rappel de la convention courante (cf. section 1.4) :
- \(T(x)\) positif si la résultante des forces à gauche de la coupure est vers le haut.
- \(M(x)\) positif si le moment des forces à gauche de la coupure tend à tendre les fibres inférieures (sens anti-horaire).
3.4 Relations Différentielles
Rappel des relations fondamentales (avec \(q(x)\) charge répartie positive vers le bas) :
On peut aussi écrire :
3.5 Diagrammes des Efforts Internes (DET, DMF)
Ce sont les graphiques représentant la variation de l'effort tranchant \(T(x)\) (Diagramme des Efforts Tranchants - DET) et du moment fléchissant \(M(x)\) (Diagramme des Moments Fléchissants - DMF) le long de la poutre. Leur tracé, basé sur la méthode des coupures et les relations différentielles, est essentiel pour identifier les valeurs maximales des sollicitations.
4. Contraintes dans les Poutres Fléchies
4.1 Contraintes Normales dues à la Flexion (\(\sigma\))
Sous l'effet du moment fléchissant \(M\), les fibres de la poutre s'allongent (traction) ou se raccourcissent (compression), générant des contraintes normales \(\sigma_x\) perpendiculaires à la section droite.
L'hypothèse de Navier-Bernoulli (sections planes restent planes) implique que la déformation \(\epsilon_x\) varie linéairement avec la distance \(z\) à l'axe neutre : \(\epsilon_x = z / \rho\), où \(\rho\) est le rayon de courbure de la ligne moyenne déformée.
En utilisant la loi de Hooke (\(\sigma_x = E \epsilon_x\)), on obtient une variation linéaire des contraintes normales : \(\sigma_x = (E / \rho) z\).
4.2 Formule de Navier
L'équilibre des moments internes dans la section (\(M = \int_A \sigma_x z dA\)) permet de relier le moment fléchissant appliqué \(M\) (ici \(M_y\)) à la courbure et aux contraintes. En introduisant le moment quadratique \(I_y = \int_A z^2 dA\), on obtient la relation fondamentale : \[ \frac{1}{\rho} = \frac{M_y}{E I_y} \] En substituant dans l'expression de \(\sigma_x\), on arrive à la formule de Navier pour la contrainte normale de flexion : \[ \sigma_x(z) = \frac{M_y}{I_y} z \] (Le signe dépend de la convention choisie pour M et z. Avec M positif tendant les fibres inférieures (z<0), on a \(\sigma_x = - \frac{M_y}{I_y} z\) pour avoir \(\sigma_x > 0\) en traction pour \(z<0\)).
La contrainte est maximale (en valeur absolue) aux fibres les plus éloignées de l'axe neutre (\(z_{max}\)) : \[ \sigma_{max} = \frac{|M_y|}{I_y / |z_{max}|} = \frac{|M_y|}{W_{el,y}} \] où \(W_{el,y} = I_y / |z_{max}|\) est le module de flexion élastique de la section.
Distribution linéaire de la contrainte normale \(\sigma_x\) due à la flexion.
4.3 Moment Quadratique (Inertie) de la Section (\(I\))
Le moment quadratique (souvent appelé improprement moment d'inertie) représente la résistance géométrique de la section à la flexion. Il dépend de la forme et des dimensions de la section.
Pour une section rectangulaire de base \(b\) et hauteur \(h\) : \(I_y = b h^3 / 12\).
Pour une section circulaire de diamètre \(D\) : \(I_y = I_z = \pi D^4 / 64\).
Pour des sections composées, on utilise le théorème de Huygens.
4.4 Contraintes de Cisaillement dues à l'Effort Tranchant (\(\tau\))
L'effort tranchant \(T\) induit des contraintes tangentielles (ou de cisaillement) \(\tau_{xz}\) (et \(\tau_{zx}\) par réciprocité) dans la section droite. Ces contraintes sont nécessaires pour équilibrer la variation de la contrainte normale de flexion le long de la poutre (\(dM = T dx\)).
4.5 Formule de Collignon-Jourawski
Pour une section droite, la contrainte de cisaillement \(\tau_{xz}\) à une distance \(z\) de l'axe neutre est donnée par la formule de Collignon-Jourawski : \[ \tau_{xz}(z) = \frac{T_z(x) S_y^*(z)}{I_y b(z)} \] où :
- \(T_z(x)\) est l'effort tranchant dans la section.
- \(I_y\) est le moment quadratique de la section totale par rapport à l'axe neutre y.
- \(b(z)\) est la largeur de la section à la cote \(z\).
- \(S_y^*(z)\) est le moment statique par rapport à l'axe neutre y, de la partie de la section située au-delà de la cote \(z\) (du côté où l'on calcule \(\tau\)). \(S_y^*(z) = \int_{A^*} z' dA\), où \(A^*\) est l'aire de cette partie.
4.6 Distribution des Contraintes
Contrairement à la contrainte normale \(\sigma_x\) qui est maximale aux fibres extrêmes, la contrainte de cisaillement \(\tau_{xz}\) est nulle aux fibres extrêmes (car le moment statique \(S_y^*\) y est nul) et est maximale au niveau de l'axe neutre (où le moment statique est maximal).
Pour une section rectangulaire (\(b \times h\)), la distribution est parabolique : \[ \tau_{xz}(z) = \frac{T}{2I_y} \left( \frac{h^2}{4} - z^2 \right) b \] La valeur maximale à l'axe neutre (\(z=0\)) est : \(\tau_{max} = \frac{T b h^2 / 8}{I_y} = \frac{T b h^2 / 8}{b h^3 / 12} = \frac{3}{2} \frac{T}{bh} = 1.5 \frac{T}{A}\).
Distribution parabolique de la contrainte de cisaillement \(\tau_{xz}\) dans une section rectangulaire.
5. Déformation des Poutres (Déformée)
5.1 Équation Différentielle de la Ligne Élastique
La déformation d'une poutre sous l'effet de la flexion est décrite par la forme de sa ligne moyenne déformée, appelée ligne élastique ou simplement déformée. Son équation \(y(x)\) (si la flexion est dans le plan xy) ou \(z(x)\) (si la flexion est dans le plan xz) est régie par une équation différentielle.
En utilisant la relation entre la courbure \(1/\rho\) et le moment fléchissant \(M\), et en approximant la courbure par la dérivée seconde de la déformée (\(1/\rho \approx y''\) pour de petites déformations), on obtient l'équation différentielle de la ligne élastique (pour une flexion dans le plan xy, moment \(M_z\)) : \[ E I_z y''(x) = M_z(x) \] Ou pour une flexion dans le plan xz (cas le plus fréquent avec charges verticales, moment \(M_y\)) : \[ E I_y z''(x) = -M_y(x) \] (Le signe moins vient de la convention de signe pour M et l'orientation de l'axe z). \(EI\) est la rigidité de flexion de la poutre.
5.2 Méthode de la Double Intégration
Cette méthode consiste à intégrer deux fois l'équation différentielle pour obtenir l'équation de la déformée \(z(x)\) (ou \(y(x)\)).
- Première intégration : donne l'équation de la rotation de la section \(\theta(x) \approx z'(x)\). \[ E I_y z'(x) = - \int M_y(x) dx + C_1 \]
- Seconde intégration : donne l'équation de la flèche \(z(x)\). \[ E I_y z(x) = - \iint M_y(x) dx dx + C_1 x + C_2 \]
Les constantes d'intégration \(C_1\) et \(C_2\) sont déterminées à l'aide des conditions aux limites.
5.3 Conditions aux Limites
Elles traduisent le comportement de la poutre au niveau de ses appuis :
- Appui simple ou articulation : Déplacement nul (\(z=0\)).
- Encastrement : Déplacement nul (\(z=0\)) ET rotation nulle (\(z'=0\)).
- Extrémité libre : Moment nul (\(M=0 \Rightarrow z''=0\)) ET effort tranchant nul (\(T=0 \Rightarrow z'''=0\)).
- Continuité : En un point de raccordement ou de charge/moment concentré, la déformée et la rotation sont continues (\(z\) et \(z'\) sont les mêmes de part et d'autre).
5.4 Calcul des Flèches et des Rotations
Une fois l'équation de la déformée \(z(x)\) obtenue, on peut calculer la flèche (déplacement vertical) et la rotation en tout point \(x\) de la poutre. La flèche maximale est souvent un critère de dimensionnement important à l'ELS.
5.5 Autres Méthodes
D'autres méthodes existent pour calculer les déformées, parfois plus pratiques pour des cas de chargement complexes :
- Méthode de Macaulay : Utilise une fonction unique pour le moment sur toute la poutre, en utilisant des crochets de Macaulay pour gérer les discontinuités.
- Théorèmes de Mohr (Moment-Aire) : Relient les aires et les moments des aires du diagramme \(M/EI\) aux rotations et aux flèches. Méthode graphique ou semi-graphique.
- Principe de superposition : Pour des chargements complexes, on peut calculer la déformée due à chaque charge simple séparément et additionner les résultats (valable en élasticité linéaire).
- Méthodes énergétiques (Castigliano, Travaux Virtuels).
6. Cas Particuliers et Extensions
6.1 Poutres Hyperstatiques
Lorsque les réactions d'appuis ne peuvent pas être déterminées par la seule statique, la poutre est hyperstatique. Il faut utiliser des équations supplémentaires basées sur la compatibilité des déformations (ex: méthode des forces, méthode des déplacements) pour résoudre le problème. Les efforts internes dépendent alors de la rigidité \(EI\) de la poutre.
6.2 Flexion Déviée
Lorsque les charges ne sont pas appliquées dans un plan de symétrie, ou que la section n'a pas de plan de symétrie, la poutre est soumise à des moments fléchissants autour des deux axes principaux (\(M_y\) et \(M_z\)). On calcule les contraintes par superposition : \(\sigma_x = (M_y/I_y)z - (M_z/I_z)y\). L'axe neutre n'est plus parallèle à l'axe du moment résultant.
6.3 Théorie de Timoshenko
Pour les poutres courtes et épaisses, la déformation due à l'effort tranchant n'est plus négligeable. La théorie de Timoshenko en tient compte, modifiant l'hypothèse de Navier-Bernoulli (les sections planes restent planes mais ne restent pas nécessairement normales à la ligne moyenne déformée). Les calculs sont plus complexes mais plus précis dans ces cas.
6.4 Comportement Plastique des Poutres
Au-delà de la limite d'élasticité du matériau (notamment pour l'acier), la théorie élastique n'est plus valable. L'analyse plastique étudie la formation de rotules plastiques et la capacité ultime de la poutre avant formation d'un mécanisme de ruine.
7. Applications en Génie Civil
La théorie des poutres est appliquée quotidiennement pour le dimensionnement de très nombreux éléments structuraux :
- Poutres et linteaux en béton armé, précontraint, métallique ou bois.
- Poteaux soumis à la flexion composée.
- Dalles (souvent modélisées comme un réseau de poutres ou par la théorie des plaques).
- Éléments de charpentes métalliques ou bois (pannes, chevrons...).
- Tabliers de ponts.
- Certains éléments de fondation (longrines, semelles filantes).
8. Conclusion
La théorie des poutres d'Euler-Bernoulli, malgré ses hypothèses simplificatrices, constitue un outil puissant et fondamental pour l'analyse et la conception des éléments structuraux élancés soumis à la flexion. Elle permet de déterminer les efforts internes (effort tranchant, moment fléchissant), les contraintes (normales, tangentielles) et les déformations (flèches, rotations) nécessaires au dimensionnement.
La maîtrise des relations différentielles entre charges, effort tranchant et moment fléchissant, ainsi que des méthodes de calcul des diagrammes et des déformées, est une compétence essentielle pour tout ingénieur ou technicien en structure. Bien que des théories plus avancées existent pour des cas spécifiques (Timoshenko, plasticité), la théorie classique reste la base de la plupart des calculs courants en résistance des matériaux.
Exercices et Corrigés de Rdm:
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