Calcul des Zones de Poinçonnement
Contexte : Pourquoi la vérification au poinçonnement est-elle fondamentale ?
Le poinçonnementMode de rupture fragile où un poteau traverse une dalle sous l'effet d'une charge concentrée, sans flexion visible. est un mode de rupture fragile et brutal qui peut survenir dans les dalles en béton armé, particulièrement les dalles-champignons (sans poutres), au droit des appuis concentrés comme les poteaux. L'effort tranchant élevé apporté par le poteau peut "cisailler" la dalle, formant un cône de rupture. La vérification au poinçonnement, régie par l'Eurocode 2, consiste à s'assurer que la contrainte de cisaillement dans la dalle reste inférieure à la résistance du béton, avec ou sans armatures de poinçonnement spécifiques. Une conception inadéquate peut avoir des conséquences catastrophiques.
Remarque Pédagogique : Cet exercice vous guidera à travers les étapes clés de la vérification au poinçonnement selon l'Eurocode 2. Vous apprendrez à calculer la contrainte de cisaillement agissante, à définir les périmètres de contrôle critiques, à calculer la résistance du béton seul, et à déterminer si des armatures de poinçonnement sont nécessaires.
Objectifs Pédagogiques
- Comprendre le phénomène de poinçonnement et ses risques.
- Définir et calculer le périmètre de contrôle critique \(u_1\).
- Calculer la contrainte de cisaillement de calcul \(v_{\text{Ed}}\).
- Calculer la résistance au poinçonnement du béton sans armatures de cisaillement, \(v_{\text{Rd,c}}\).
- Vérifier la nécessité d'ajouter des armatures de poinçonnement.
- Calculer la résistance maximale au poinçonnement \(v_{\text{Rd,max}}\) pour éviter la rupture par compression des bielles de béton.
Données de l'étude
Schéma de la jonction dalle-poteau
- Épaisseur de la dalle : \(h = 250 \, \text{mm}\).
- Dimensions du poteau carré : \(c = 300 \, \text{mm}\).
- Effort tranchant de calcul à l'ELU : \(V_{\text{Ed}} = 650 \, \text{kN}\).
- Classe de résistance du béton : \(\text{C25/30}\) (\(f_{\text{ck}} = 25 \, \text{MPa}\)).
- Enrobage des armatures : \(c_{\text{nom}} = 30 \, \text{mm}\).
- Diamètre des armatures de flexion (moyenne des 2 lits) : \(\phi = 14 \, \text{mm}\).
- Coefficient partiel de sécurité du béton : \(\gamma_{\text{c}} = 1.5\).
- Le poteau est en position centrale (pas d'excentricité de la charge).
Questions à traiter
- Calculer la hauteur utile moyenne de la dalle (\(d\)).
- Déterminer le périmètre du poteau (\(u_0\)) et le périmètre de contrôle critique (\(u_1\)).
- Calculer la contrainte de cisaillement agissante (\(v_{\text{Ed}}\)) sur le périmètre critique.
- Vérifier si la contrainte de cisaillement maximale à la face du poteau (\(v_{\text{Ed},u0}\)) est inférieure à la résistance maximale (\(v_{\text{Rd,max}}\)).
- Calculer la résistance au poinçonnement du béton sans armatures (\(v_{\text{Rd,c}}\)) et conclure sur la nécessité d'ajouter des armatures de poinçonnement.
Correction : Calcul des Zones de Poinçonnement
Question 1 : Calculer la hauteur utile moyenne (\(d\))
Principe (le concept physique)
La hauteur utile \(d\) est la distance entre la fibre la plus comprimée du béton et le centre de gravité des armatures tendues. Elle représente le bras de levier interne pour la résistance en flexion et en cisaillement. Pour le poinçonnement, on utilise une hauteur utile moyenne, car les armatures sont disposées en deux lits perpendiculaires.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Dans une dalle, les armatures sont disposées en deux nappes orthogonales (directions x et y). Chaque nappe a sa propre hauteur utile (\(d_x\) et \(d_y\)). Pour la vérification au poinçonnement, qui est un phénomène bidimensionnel, l'Eurocode 2 prescrit d'utiliser la moyenne géométrique de ces deux hauteurs : \(d = (d_x + d_y) / 2\). Une simplification conservative et courante consiste à calculer \(d\) en se basant sur le centre de la couche d'armatures la plus éloignée de la fibre comprimée.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Point Clé : La hauteur utile \(d\) est le paramètre le plus influent dans les calculs de poinçonnement. Elle intervient au dénominateur des contraintes et à la puissance 2 (implicitement via le périmètre \(u_1\)). Une petite erreur sur \(d\) (par exemple, un mauvais enrobage sur chantier) peut avoir des conséquences importantes sur la sécurité réelle de la dalle.
Normes (la référence réglementaire)
Eurocode 2 (NF EN 1992-1-1), Clause 6.4.2 (4) : La norme spécifie que la hauteur utile de la dalle \(d\) doit être prise comme la moyenne des hauteurs utiles dans les deux directions orthogonales (\(d_x\) et \(d_y\)).
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que le diamètre \(\phi\) est représentatif de la moyenne des deux lits d'armatures et que l'enrobage \(c_{\text{nom}}\) est respecté. La simplification \(d = h - c_{\text{nom}} - \phi\) est acceptée pour cet exercice.
Formule(s) (l'outil mathématique)
Formule de la hauteur utile :
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Épaisseur de la dalle \(h\) : \(250 \, \text{mm}\)
- Enrobage nominal \(c_{\text{nom}}\) : \(30 \, \text{mm}\)
- Diamètre des armatures \(\phi\) : \(14 \, \text{mm}\)
Calcul(s) (l'application numérique)
Calcul de la hauteur utile :
Réflexions (l'interprétation du résultat)
La hauteur utile de 206 mm représente environ 82% de l'épaisseur totale de la dalle. Cette valeur est cohérente. Elle montre que près de 18% de l'épaisseur du béton (44 mm) est "perdue" pour la résistance mécanique au profit de la protection des aciers (enrobage).
Justifications (le pourquoi de cette étape)
Le calcul de \(d\) est la première étape indispensable. Toutes les vérifications ultérieures (calcul des périmètres de contrôle, des contraintes et des résistances) dépendent directement de cette valeur. Une erreur ici se propage à l'ensemble du calcul.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Erreur classique : Confondre la hauteur totale \(h\) et la hauteur utile \(d\). L'effort tranchant est repris sur la hauteur utile \(d\). Utiliser \(h\) conduirait à une sous-estimation de la contrainte agissante et à un dimensionnement non sécuritaire.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
À vous de jouer !
Question 2 : Déterminer les périmètres de contrôle (\(u_0\) et \(u_1\))
Principe (le concept physique)
L'Eurocode 2 définit plusieurs périmètres de contrôle. \(u_0\) est le périmètre du poteau lui-même, où l'on vérifie la contrainte maximale pour éviter l'écrasement du béton. \(u_1\) est le périmètre de contrôle de base, situé à une distance de \(2d\) des faces du poteau. C'est sur ce périmètre que l'on vérifie la résistance du béton au cisaillement.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
La position du périmètre critique \(u_1\) à \(2d\) des faces du poteau n'est pas arbitraire. Elle correspond à l'hypothèse d'une fissure de poinçonnement qui se propage à travers la dalle avec un angle d'environ 26.6° par rapport à l'horizontale (\(\cot(\theta) = 2\)). Ce périmètre \(u_1\) représente la base d'un tronc de cône de rupture, et c'est sa surface latérale (\(u_1 \times d\)) qui est considérée comme la surface de cisaillement pertinente pour le calcul.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Point Clé : Visualisez bien la forme du périmètre \(u_1\). Pour un poteau rectangulaire, il est composé de segments droits et d'arcs de cercle centrés sur les coins du poteau. Une erreur fréquente est d'oublier les parties circulaires et de ne considérer qu'un simple rectangle agrandi, ce qui sous-estime la longueur du périmètre et surestime donc la contrainte.
Normes (la référence réglementaire)
Eurocode 2 (NF EN 1992-1-1), Clause 6.4.2 : Cette clause définit la géométrie des périmètres de contrôle de base. Elle précise que le périmètre est situé à une distance de \(2d\) et doit être construit de manière à minimiser sa longueur.
Hypothèses (le cadre du calcul)
On suppose que le poteau est en position intérieure, loin des bords de la dalle ou d'ouvertures. Si des bords libres ou des trous se trouvaient à moins de \(6d\) du poteau, il faudrait réduire le périmètre de contrôle.
Formule(s) (l'outil mathématique)
Périmètre du poteau \(u_0\):
Périmètre de contrôle critique \(u_1\):
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Côté du poteau \(c\) : \(300 \, \text{mm}\)
- Hauteur utile \(d\) : \(206 \, \text{mm}\)
Calcul(s) (l'application numérique)
Calcul du périmètre du poteau \(u_0\) :
Calcul du périmètre critique \(u_1\) :
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Le périmètre critique \(u_1\) est plus de trois fois plus grand que le périmètre du poteau \(u_0\). Cela montre à quel point l'effort se diffuse dans la dalle. La contrainte de cisaillement diminue donc rapidement à mesure qu'on s'éloigne du poteau.
Justifications (le pourquoi de cette étape)
La définition de ces deux périmètres permet de vérifier deux modes de rupture distincts : l'écrasement des bielles de béton comprimé contre le poteau (vérification sur \(u_0\)) et la rupture par cisaillement de la dalle (vérification sur \(u_1\)). Les deux sont nécessaires pour une conception sécuritaire.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Erreur sur \(u_1\): Pour un poteau rectangulaire de côtés \(c_1\) et \(c_2\), la formule devient \(u_1 = 2(c_1+c_2) + 2\pi(2d)\). Il est crucial d'adapter la formule à la géométrie réelle de la zone chargée.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
À vous de jouer !
Question 3 : Calculer la contrainte de cisaillement agissante (\(v_{\text{Ed}}\))
Principe (le concept physique)
La contrainte de cisaillement agissante, \(v_{\text{Ed}}\), représente l'intensité de l'effort tranchant réparti sur la surface de contrôle critique. On l'obtient en divisant l'effort tranchant total \(V_{\text{Ed}}\) par l'aire de la surface de cisaillement, qui est le produit du périmètre critique \(u_1\) par la hauteur utile \(d\). C'est la valeur que le béton doit être capable de supporter.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Le coefficient \(\beta\) est crucial pour les cas non symétriques. Il est calculé par la formule \(\beta = 1 + k \frac{M_{\text{Ed}}}{V_{\text{Ed}}} \frac{u_1}{W_1}\), où \(M_{\text{Ed}}\) est le moment transmis et \(W_1\) est le module de résistance du périmètre critique. Pour les poteaux de rive ou de coin, \(\beta\) est directement donné par des valeurs forfaitaires (1.4 pour la rive, 1.5 pour le coin) pour simplifier les calculs en l'absence d'une analyse précise des moments.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Point Clé : Pensez aux unités ! Le moyen le plus sûr d'éviter les erreurs est de tout convertir en unités de base du SI avant le calcul : Newtons (N) pour les forces, et millimètres (mm) pour les longueurs. Le résultat sera alors directement en MégaPascals (MPa), car 1 MPa = 1 N/mm².
Normes (la référence réglementaire)
Eurocode 2 (NF EN 1992-1-1), Clause 6.4.3 (1) : La norme donne l'expression de la contrainte de cisaillement de calcul \(v_{\text{Ed}}\) et définit le coefficient \(\beta\) pour tenir compte des effets des charges excentrées.
Hypothèses (le cadre du calcul)
On est dans le cas le plus simple : un poteau intérieur sans transmission de moment significatif. On peut donc supposer que la charge est parfaitement centrée, ce qui nous autorise à prendre \(\beta = 1.0\).
Formule(s) (l'outil mathématique)
Formule de la contrainte de cisaillement agissante :
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- Effort tranchant \(V_{\text{Ed}}\) : \(650 \, \text{kN} = 650'000 \, \text{N}\)
- Périmètre critique \(u_1\) : \(3788.6 \, \text{mm}\)
- Hauteur utile \(d\) : \(206 \, \text{mm}\)
- Coefficient \(\beta\) : \(1.0\)
Calcul(s) (l'application numérique)
Calcul de la contrainte agissante \(v_{\text{Ed}}\) :
Réflexions (l'interprétation du résultat)
Une contrainte de 0.833 MPa peut sembler faible par rapport à la résistance en compression du béton (25 MPa). Cependant, la résistance du béton au cisaillement est beaucoup plus faible que sa résistance en compression. Ce résultat doit donc être comparé non pas à \(f_{\text{ck}}\), mais à la résistance au cisaillement spécifique, \(v_{\text{Rd,c}}\), que nous calculerons plus tard.
Justifications (le pourquoi de cette étape)
Cette étape quantifie la "demande" ou la "sollicitation" sur la dalle. C'est la valeur de référence à laquelle toutes les résistances calculées (la "capacité") seront comparées. Sans connaître la contrainte agissante, il est impossible de juger de la sécurité de l'élément.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Oublier \(\beta\): Même si \(\beta=1.0\) dans ce cas simple, il est crucial de ne pas l'oublier dans la formule. Pour un poteau de rive ou de coin, ignorer \(\beta\) (c'est-à-dire le prendre égal à 1.0 au lieu de 1.4 ou 1.5) conduirait à une sous-estimation dangereuse de la contrainte.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
À vous de jouer !
Question 4 : Vérifier la contrainte maximale (\(v_{\text{Rd,max}}\))
Principe (le concept physique)
Cette vérification est une sécurité ultime. Elle garantit que le béton ne sera pas écrasé par compression excessive au voisinage immédiat du poteau. On compare la contrainte de cisaillement calculée sur le périmètre du poteau (\(u_0\)) à une contrainte maximale admissible \(v_{\text{Rd,max}}\). Si cette condition n'est pas respectée, la conception doit être revue (poteau plus grand, dalle plus épaisse ou béton plus résistant), car aucune quantité d'armatures ne peut empêcher ce type de rupture.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
Le modèle de calcul pour \(v_{\text{Rd,max}}\) est basé sur la résistance d'une bielle de compression en béton. L'effort tranchant est supposé être transmis par des bielles inclinées. La vérification sur \(u_0\) limite la contrainte de compression dans ces bielles pour éviter leur écrasement. Le facteur \(\nu\) réduit la résistance de calcul du béton (\(f_{\text{cd}}\)) pour tenir compte du fait que le béton est déjà fissuré par la flexion et soumis à un état de contraintes biaxial.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Point Clé : C'est la toute première vérification de résistance à effectuer. Si elle ne passe pas, inutile d'aller plus loin. C'est une vérification de "conception" qui valide la géométrie et les matériaux choisis, avant de s'intéresser au ferraillage.
Normes (la référence réglementaire)
Eurocode 2 (NF EN 1992-1-1), Clause 6.4.5 (3) : La norme stipule que la contrainte de cisaillement de calcul sur n'importe quel périmètre de contrôle \(v_{\text{Ed}}\) ne doit pas dépasser la résistance maximale \(v_{\text{Rd,max}}\). La vérification est la plus critique sur le périmètre le plus petit, c'est-à-dire \(u_0\).
Hypothèses (le cadre du calcul)
Les formules pour \(f_{\text{cd}}\) et \(\nu\) sont directement issues de l'Annexe Nationale française de l'Eurocode 2. D'autres pays peuvent avoir des coefficients légèrement différents.
Formule(s) (l'outil mathématique)
Condition de vérification :
Résistance maximale au poinçonnement \(v_{\text{Rd,max}}\):
Coefficient de réduction pour le béton fissuré \(\nu\):
Résistance de calcul en compression du béton \(f_{\text{cd}}\):
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- \(V_{\text{Ed}}\) : \(650'000 \, \text{N}\)
- \(u_0\) : \(1200 \, \text{mm}\)
- \(d\) : \(206 \, \text{mm}\)
- \(f_{\text{ck}}\) : \(25 \, \text{MPa}\)
- \(\gamma_{\text{c}}\) : \(1.5\)
Calcul(s) (l'application numérique)
Calcul de la résistance de calcul du béton \(f_{\text{cd}}\) :
Calcul du coefficient réducteur \(\nu\) :
Calcul de la résistance maximale au poinçonnement \(v_{\text{Rd,max}}\) :
Calcul de la contrainte agissante sur le périmètre \(u_0\) :
Vérification finale :
Réflexions (l'interprétation du résultat)
La contrainte agissante (2.63 MPa) est significativement inférieure à la contrainte maximale admissible (3.60 MPa). Nous avons une marge de sécurité d'environ 37%. Cela indique que les dimensions de la dalle et du poteau ainsi que la qualité du béton sont adéquates pour éviter une rupture par compression des bielles.
Justifications (le pourquoi de cette étape)
Cette étape est une justification de la capacité portante ultime de la jonction dalle-poteau. C'est une condition nécessaire qui garantit que la géométrie de base est viable avant de se préoccuper de la quantité d'armatures de cisaillement à ajouter.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Ne pas oublier le facteur \(\nu\): Omettre le coefficient réducteur \(\nu\) et utiliser directement \(f_{\text{cd}}\) surestimerait grandement la résistance maximale et pourrait conduire à accepter une conception dangereuse.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
À vous de jouer !
Question 5 : Calculer la résistance (\(v_{\text{Rd,c}}\)) et conclure
Principe (le concept physique)
On calcule maintenant la résistance propre du béton au cisaillement, \(v_{\text{Rd,c}}\). C'est la capacité de la dalle à résister au poinçonnement sans aucune aide d'armatures spécifiques. Cette résistance dépend de la qualité du béton (\(f_{\text{ck}}\)), de l'effet de taille (via le facteur \(k\)) et de la présence d'armatures de flexion (\(\rho_l\)) qui aident à "recoudre" les fissures. Si la contrainte agissante \(v_{\text{Ed}}\) est supérieure à cette résistance, des armatures de poinçonnement sont obligatoires.
Mini-Cours (approfondissement théorique)
La formule de \(v_{\text{Rd,c}}\) est empirique. Le terme \((100 \cdot \rho_{\text{l}} \cdot f_{\text{ck}})^{1/3}\) montre que la résistance augmente avec le taux d'armatures de flexion et la résistance du béton, mais de façon non linéaire (racine cubique), ce qui signifie que les gains sont de moins en moins importants. Le facteur \(k\) prend en compte "l'effet d'échelle" : proportionnellement, les dalles plus épaisses sont plus fragiles au cisaillement, donc \(k\) diminue quand \(d\) augmente, réduisant la résistance unitaire.
Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)
Point Clé : Le taux d'armatures \(\rho_{\text{l}}\) à utiliser est celui réellement présent dans la dalle. En phase de projet, on peut faire une première itération avec une valeur supposée (ex: 0.5% à 1.0%), puis affiner le calcul une fois le ferraillage de flexion précisément défini. La valeur de \(\rho_{\text{l}}\) est plafonnée à 2% dans la formule, car un excès d'armatures de flexion ne contribue plus à augmenter la résistance au poinçonnement.
Normes (la référence réglementaire)
Eurocode 2 (NF EN 1992-1-1), Clause 6.4.4 (1) : La norme fournit l'expression de calcul de la résistance au poinçonnement pour les éléments ne comportant pas d'armatures de poinçonnement, \(v_{\text{Rd,c}}\). Elle inclut également une valeur minimale \(v_{\text{min}}\) à ne pas descendre en dessous.
Hypothèses (le cadre du calcul)
Pour cet exercice, n'ayant pas le plan de ferraillage, on suppose un taux d'armatures de flexion moyen et réaliste de \(\rho_{\text{l}} = 0.8\%\) (\(0.008\)). C'est une hypothèse courante en phase de pré-dimensionnement.
Formule(s) (l'outil mathématique)
Résistance au poinçonnement sans armatures de cisaillement \(v_{\text{Rd,c}}\):
Facteur d'échelle \(k\):
Taux d'armatures de flexion \(\rho_l\):
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
- \(d\) : \(206 \, \text{mm}\)
- \(f_{\text{ck}}\) : \(25 \, \text{MPa}\)
- \(\rho_{\text{l}}\) : \(0.008\) (hypothèse)
- \(\gamma_{\text{c}}\) : \(1.5\)
Calcul(s) (l'application numérique)
Calcul du coefficient \(C_{\text{Rd,c}}\) :
Calcul du facteur d'échelle \(k\) :
Calcul de la résistance au poinçonnement du béton \(v_{\text{Rd,c}}\) :
Comparaison finale :
Réflexions (l'interprétation du résultat)
La contrainte demandée par l'effort tranchant (0.833 MPa) dépasse la capacité de résistance du béton seul (0.647 MPa) d'environ 29%. L'écart n'est pas énorme, mais il est clair et net. Le béton seul ne peut pas reprendre l'effort en toute sécurité.
Justifications (le pourquoi de cette étape)
C'est la justification finale qui détermine la stratégie de ferraillage. Si \(v_{\text{Ed}} \le v_{\text{Rd,c}}\), le ferraillage de flexion de la dalle est suffisant. Si \(v_{\text{Ed}} > v_{\text{Rd,c}}\), comme c'est le cas ici, cela déclenche l'obligation réglementaire et technique de concevoir, calculer et mettre en place un ferraillage spécifique pour le poinçonnement.
Points de vigilance (les erreurs à éviter)
Erreur sur \(\rho_{\text{l}}\): Utiliser le pourcentage directement dans la formule (ex: 0.8 au lieu de 0.008) est une erreur fréquente qui fausse complètement le résultat. Il faut toujours utiliser la valeur décimale.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
À vous de jouer !
Outil Interactif : Calculateur de Poinçonnement
Modifiez les paramètres pour voir leur influence sur la nécessité d'armatures de poinçonnement.
Paramètres du Projet
Contraintes (MPa)
Pour Aller Plus Loin : Calcul des Armatures
Dimensionnement des aciers : Lorsque la vérification montre que des armatures de poinçonnement sont requises, l'étape suivante consiste à les dimensionner. L'Eurocode 2 fournit des formules pour calculer la section d'acier nécessaire (\(A_{\text{sw}}\)) par nappe d'armatures (étriers, goujons...). Il faut ensuite répartir ces armatures sur plusieurs périmètres autour du poteau, jusqu'à une distance où la contrainte de cisaillement devient inférieure à la résistance du béton seul.
Le Saviez-Vous ?
L'effondrement du centre commercial "Sleipner" en Norvège en 1994 est un cas d'école tragique de rupture par poinçonnement. Une erreur dans le calcul de la hauteur utile d'une dalle a conduit à une sous-estimation de la contrainte de cisaillement, provoquant une réaction en chaîne et l'effondrement d'une partie de la structure. Cet événement a souligné l'importance cruciale de cette vérification.
Foire Aux Questions (FAQ)
Que se passe-t-il si le poteau n'est pas au centre (charge excentrée) ?
Une charge excentrée crée un moment qui est transmis de la dalle au poteau. Ce moment génère une distribution non uniforme des contraintes de cisaillement sur le périmètre de contrôle. L'Eurocode 2 en tient compte avec le coefficient \(\beta > 1\), qui majore la contrainte de cisaillement de calcul. Le calcul de \(\beta\) dépend de la géométrie et des moments appliqués.
Et pour un poteau de rive ou de coin ?
Pour un poteau de rive ou de coin, le périmètre de contrôle est réduit car il ne peut pas se développer sur 360°. Le coefficient \(\beta\) est également ajusté pour tenir compte de la position du poteau. Ces cas sont plus défavorables que celui d'un poteau intérieur.
Quiz Final : Testez vos connaissances
1. Si on augmente l'épaisseur de la dalle (h), comment évoluent la contrainte agissante \(v_{\text{Ed}}\) et la résistance \(v_{\text{Rd,c}}\) ?
2. Que se passe-t-il si la vérification \(v_{\text{Ed},u0} \le v_{\text{Rd,max}}\) n'est pas satisfaite ?
- Poinçonnement
- Mode de rupture par cisaillement d'un élément surfacique (dalle) sous l'effet d'une charge ou d'une réaction d'appui concentrée.
- Périmètre de Contrôle
- Contour géométrique défini par l'Eurocode 2, sur lequel les contraintes de cisaillement sont vérifiées. Le périmètre critique de base (\(u_1\)) est situé à une distance de 2d des faces de l'appui.
- Hauteur Utile (d)
- Distance entre la fibre la plus comprimée d'une section en béton et le centre de gravité des armatures tendues. C'est le bras de levier des forces internes.
- Armatures de Poinçonnement
- Aciers (généralement des étriers, des goujons ou des armatures pliées) ajoutés verticalement dans la dalle autour du poteau pour augmenter sa résistance au cisaillement-poinçonnement.
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