Analyse d’une Machine Synchrone en Charge

Exercice : Analyse d'une Machine Synchrone

Analyse d’une Machine Synchrone en Charge

Contexte : L'étude porte sur un alternateurUne machine synchrone utilisée comme générateur pour convertir l'énergie mécanique en énergie électrique alternative. triphasé connecté à un réseau électrique de puissance infinie.

Les machines synchrones sont le cœur des réseaux de production d'électricité. Comprendre leur comportement en charge est fondamental pour tout ingénieur électricien. Cet exercice a pour but d'analyser le fonctionnement d'un alternateur débitant de la puissance sur un réseau, en utilisant le modèle équivalent par phase et le diagramme vectoriel de Behn-Eschenburg.

Remarque Pédagogique : Cet exercice vous permettra de maîtriser le calcul des grandeurs clés d'un alternateur (réactance, f.é.m., puissances) et de visualiser ses états de fonctionnement grâce au diagramme vectoriel, un outil indispensable pour l'analyse des machines tournantes.


Objectifs Pédagogiques

  • Déterminer les paramètres du modèle équivalent d'une machine synchrone à partir d'essais standards.
  • Calculer la force électromotrice (f.é.m.) interne et l'angle de puissance pour un point de fonctionnement donné.
  • Construire et interpréter le diagramme vectoriel de Behn-Eschenburg.
  • Calculer les puissances active et réactive échangées avec le réseau.
  • Analyser l'impact d'une variation de la puissance motrice sur le fonctionnement de l'alternateur.

Données de l'étude

On s'intéresse à un alternateur triphasé à pôles lisses, couplé en étoile, dont les caractéristiques nominales et les résultats d'essais sont les suivants.

Fiche Technique de l'Alternateur
Caractéristique Valeur
Puissance Apparente Nominale (\(S_n\)) 50 MVA
Tension Nominale entre Phases (\(U_n\)) 15 kV
Fréquence (\(f\)) 50 Hz
Couplage des enroulements statoriques Étoile
Modèle équivalent par phase de l'alternateur
~ E jXₛ V I
Résultats des Essais
Essai Condition Résultat
Essai à vide Courant d'excitation \(I_e = 400\) A Tension à vide \(U_v = 15\) kV
Essai en court-circuit Courant d'excitation \(I_e = 400\) A Courant de court-circuit \(I_{cc} = 2500\) A

Questions à traiter

On négligera la résistance des enroulements du stator.

  1. Calculer la réactance synchrone \(X_s\) (par phase).
  2. L'alternateur débite un courant \(I = 1200\) A dans le réseau avec un facteur de puissance de 0,85 en retard (inductif). Calculer la f.é.m. interne \(E\) (en V) et l'angle interne \(\delta\) (en degrés).
  3. Tracer le diagramme de Behn-Eschenburg correspondant à ce point de fonctionnement.
  4. Calculer les puissances active \(P\) (en MW) et réactive \(Q\) (en MVAR) fournies au réseau.
  5. Le couple moteur est augmenté de sorte que la puissance active fournie devient \(P' = 35\) MW, le courant d'excitation restant inchangé. Déterminer la nouvelle valeur du courant \(I'\), le nouveau facteur de puissance et la nouvelle puissance réactive \(Q'\).

Les bases sur la Machine Synchrone

La machine synchrone, fonctionnant en alternateur, est modélisée en régime permanent par un schéma équivalent monophasé simple. Ce modèle est essentiel pour analyser les échanges de puissance avec le réseau.

1. Modèle équivalent et Équation électrique
Le stator de l'alternateur est modélisé par une force électromotrice (f.é.m.) interne \(E\) en série avec la réactance synchroneLa réactance équivalente par phase du stator, qui tient compte de l'inductance propre des enroulements et de la réaction magnétique d'induit. \(X_s\). La tension \(V\) est la tension simple aux bornes de la machine (imposée par le réseau). L'équation vectorielle qui relie ces grandeurs est :

\[ \vec{E} = \vec{V} + jX_s \cdot \vec{I} \]

2. Puissances Active et Réactive
Les puissances sont contrôlées par deux paramètres distincts : la puissance active \(P\) par le couple moteur (via l'angle interne \(\delta\)), et la puissance réactive \(Q\) par le courant d'excitation (via la f.é.m. \(E\)). Pour un système triphasé équilibré :

\[ P = 3 \cdot V \cdot I \cdot \cos(\phi) = 3 \frac{E \cdot V}{X_s} \sin(\delta) \]
\[ Q = 3 \cdot V \cdot I \cdot \sin(\phi) = 3 \frac{V}{X_s} (E \cos(\delta) - V) \]

Correction : Analyse d’une Machine Synchrone en Charge

Question 1 : Calculer la réactance synchrone \(X_s\).

Principe (le concept physique)

La réactance synchrone caractérise l'opposition de la machine au passage du courant alternatif, due aux phénomènes magnétiques. On la détermine en utilisant les résultats des essais à vide et en court-circuit, réalisés pour un même courant d'excitation. Le rapport de la tension à vide au courant de court-circuit nous donne directement cette réactance (en négligeant la résistance), car dans ces deux situations, la machine se comporte comme un simple circuit linéaire.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

La réactance synchrone \(X_s\) se compose de deux termes : la réactance de fuite \(X_l\) et la réactance de réaction magnétique d'induit \(X_{mu}\). \(X_l\) est due au flux qui ne traverse que le stator, tandis que \(X_{mu}\) modélise l'effet du champ magnétique créé par le courant statorique sur le champ principal du rotor. En effectuant les essais à un courant d'excitation qui n'entraîne pas de saturation du circuit magnétique, on obtient la réactance synchrone non saturée, qui est considérée constante pour les calculs linéaires.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

L'astuce de cette méthode est d'utiliser le même courant d'excitation (\(I_e=400\) A) pour les deux essais. Cela garantit que la f.é.m. interne "potentielle" est la même dans les deux cas. Ainsi, en divisant la tension générée à vide par le courant qu'elle produit en court-circuit, on isole l'impédance de la machine, qui se résume ici à sa réactance.

Normes (la référence réglementaire)

Les procédures pour réaliser les essais à vide et en court-circuit sur les machines tournantes sont standardisées par des normes internationales, notamment la norme IEC 60034-4. Ces normes garantissent que les paramètres calculés, comme la réactance synchrone, sont fiables et comparables entre différents constructeurs.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Formule de la réactance synchrone

\[ X_s = \frac{V_{\text{vide par phase}}}{I_{cc}} = \frac{U_v / \sqrt{3}}{I_{cc}} \]
Hypothèses (le cadre du calcul)
  • La résistance des enroulements statoriques est négligée (\(R_s \approx 0\)).
  • Le circuit magnétique est considéré comme non saturé pour le courant d'excitation utilisé lors des essais.
  • La machine a un comportement linéaire dans ces conditions.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
ParamètreSymboleValeurUnité
Tension à vide (composée)\(U_v\)15kV
Courant de court-circuit\(I_{cc}\)2500A
Astuces(Pour aller plus vite)

Pour une vérification rapide, on peut calculer la réactance en "per unit" (p.u.), un système d'unités normalisé. L'impédance de base est \(Z_b = U_n^2 / S_n = (15000^2) / (50 \cdot 10^6) = 4.5 \, \Omega\). Alors \(X_s \text{ [p.u.]} = 3.46 / 4.5 \approx 0.77\) p.u. Cette valeur est typique pour un alternateur de cette taille (souvent entre 0.8 et 2.0 p.u.).

Schéma (Avant les calculs)
Circuit équivalent pour les essais
Essai à Vide ~Eₐᵥ jXₛ Uᵥ (I = 0) Essai en Court-Circuit ~Eₐᵥ jXₛ Icc (V = 0)
Calcul(s) (l'application numérique)

Étape 1 : Calcul de la tension simple à vide

\[ \begin{aligned} V_v &= \frac{U_v}{\sqrt{3}} \\ &= \frac{15000}{\sqrt{3}} \\ &\approx 8660,25 \, \text{V} \end{aligned} \]

Étape 2 : Calcul de la réactance synchrone

\[ \begin{aligned} X_s &= \frac{V_v}{I_{cc}} \\ &= \frac{8660,25}{2500} \\ &\approx 3,464 \, \Omega \end{aligned} \]
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Une réactance de \(3,46 \, \Omega\) peut sembler faible, mais elle est significative par rapport à l'impédance de base de la machine. C'est cette réactance qui va créer une chute de tension interne et un déphasage entre la f.é.m. \(E\) et la tension au réseau \(V\) lorsque l'alternateur est en charge. Elle est cruciale pour déterminer la stabilité et la capacité de la machine à fournir de la puissance réactive.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

L'erreur la plus commune est d'oublier de convertir la tension composée \(U_v\) en tension simple \(V_v\) en la divisant par \(\sqrt{3}\). Le modèle équivalent est toujours "par phase", donc tous les calculs doivent utiliser des grandeurs de phase (tension simple, courant de phase).

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • La réactance synchrone \(X_s\) est un paramètre fondamental du modèle équivalent d'un alternateur.
  • Elle se détermine expérimentalement à l'aide d'un essai à vide et d'un essai en court-circuit réalisés pour le même courant d'excitation.
  • La formule à retenir est \(X_s = V_{\text{vide (simple)}} / I_{cc}\).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

La première centrale hydroélectrique utilisant le courant alternatif, conçue par Nikola Tesla aux chutes du Niagara en 1895, utilisait des alternateurs géants de 5000 chevaux. La compréhension de concepts comme la réactance synchrone, bien que formalisée plus tard, était déjà essentielle pour la conception et l'exploitation de ces machines révolutionnaires.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
La réactance synchrone par phase est \(X_s \approx 3,46 \, \Omega\).
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant par rapport a la question)

Si un autre essai en court-circuit avec \(I_e = 500\) A donnait un courant \(I_{cc} = 3125\) A, la réactance synchrone changerait-elle ?

Question 2 : Calculer la f.é.m. interne \(E\) et l'angle interne \(\delta\).

Principe (le concept physique)

La f.é.m. interne \(E\) est la tension "source" de l'alternateur, créée par le champ tournant du rotor. En charge, elle est différente de la tension \(V\) aux bornes à cause de la chute de tension due au courant \(I\) traversant la réactance \(X_s\). L'angle \(\delta\) entre \(E\) et \(V\) est la conséquence directe de la transmission de puissance active : sans puissance, cet angle serait nul.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

L'équation \(\vec{E} = \vec{V} + jX_s \vec{I}\) est une loi de Kirchhoff appliquée au modèle équivalent. L'opérateur "\(j\)" représente un déphasage de \(+90^\circ\). La chute de tension \(jX_s\vec{I}\) est donc toujours en quadrature avance par rapport au courant \(\vec{I}\). L'utilisation des nombres complexes est la méthode la plus efficace pour résoudre cette équation vectorielle en manipulant les modules et les phases.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Pour résoudre ce genre de problème, il faut toujours poser une référence de phase. Le choix le plus judicieux est de prendre la tension du réseau \(\vec{V}\) comme référence, car elle est commune à tous les générateurs connectés. On la place donc sur l'axe des réels : \(\vec{V} = V \angle 0^\circ\). Tous les autres vecteurs (\(\vec{I}\), \(\vec{E}\)) seront alors définis par rapport à elle.

Normes (la référence réglementaire)

La convention de signe pour les angles et les puissances est définie par la norme CEI. En convention générateur (ce qui est le cas ici), un facteur de puissance "en retard" (ou "inductif") signifie que le courant est en retard sur la tension, et que la machine fournit de la puissance réactive au réseau. L'angle du courant \(\phi\) est donc négatif.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Équation vectorielle de la machine

\[ \vec{E} = \vec{V} + jX_s \cdot \vec{I} \]
Hypothèses (le cadre du calcul)
  • Le régime de fonctionnement est permanent et équilibré.
  • La réactance synchrone \(X_s\) est constante et égale à la valeur calculée précédemment.
  • La tension du réseau \(V\) est parfaitement stable en module et en phase.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
ParamètreSymboleValeurUnité
Tension réseau (composée)\(U\)15kV
Courant débité\(I\)1200A
Facteur de puissance\(\cos(\phi)\)0,85(inductif)
Réactance synchrone\(X_s\)3,464\(\Omega\)
Astuces(Pour aller plus vite)

Plutôt que de convertir \(\vec{I}\) en forme rectangulaire, on peut faire le calcul vectoriel en polaire. On calcule \(jX_s\vec{I} = (X_s \angle 90^\circ) \times (I \angle -\phi) = (X_s \cdot I) \angle (90^\circ - \phi)\). Ensuite, on convertit \(\vec{V}\) et \(jX_s\vec{I}\) en rectangulaire pour les additionner. Cela peut parfois être plus rapide si les angles sont simples.

Schéma (Avant les calculs)

Le schéma suivant illustre la relation vectorielle à calculer pour trouver le vecteur \(\vec{E}\).

Relation vectorielle fondamentale
Re Im V I jXₛI E
Calcul(s) (l'application numérique)

Définition de la tension de référence \(\vec{V}\)

\[ \vec{V} = \frac{15000}{\sqrt{3}} \angle 0^\circ = 8660 \angle 0^\circ \, \text{V} \]

Calcul de l'angle du courant \(\phi\)

\[ \phi = \arccos(0,85) \approx 31,79^\circ \]

Définition du vecteur courant \(\vec{I}\)

\[ \begin{aligned} \vec{I} &= 1200 \angle -31,79^\circ \, \text{A} \\ &= 1020 - j629,5 \, \text{A} \end{aligned} \]

Calcul de la chute de tension \(jX_s \vec{I}\) en polaire

\[ \begin{aligned} jX_s \vec{I} &= (3,464 \angle 90^\circ) \times (1200 \angle -31,79^\circ) \\ &= 4157 \angle 58,21^\circ \, \text{V} \end{aligned} \]

Conversion de la chute de tension en rectangulaire

\[ jX_s \vec{I} = 2192 + j3533 \, \text{V} \]

Calcul du vecteur \(\vec{E}\) par somme

\[ \begin{aligned} \vec{E} &= \vec{V} + jX_s \vec{I} \\ &= 8660 + (2192 + j3533) \\ &= 10852 + j3533 \, \text{V} \end{aligned} \]

Calcul du module de la f.é.m. \(E\)

\[ E = |\vec{E}| = \sqrt{10852^2 + 3533^2} \approx 11413 \, \text{V} \]

Calcul de l'angle interne \(\delta\)

\[ \delta = \arg(\vec{E}) = \arctan\left(\frac{3533}{10852}\right) \approx 18,06^\circ \]
Schéma (Après les calculs)

Le diagramme de Behn-Eschenburg est la représentation graphique de la somme vectorielle \(\vec{E} = \vec{V} + jX_s \vec{I}\). Il illustre les relations de phase calculées.

Diagramme de Behn-Eschenburg
Re Im V I jXₛI E φ=31.8° δ=18.1°
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Le module de la f.é.m. interne (\(E \approx 11,4\) kV) est supérieur à celui de la tension du réseau (\(V \approx 8,7\) kV). C'est normal pour un alternateur qui fournit de la puissance réactive (sur-excité). L'angle \(\delta \approx 18,1^\circ\) est positif, ce qui confirme le fonctionnement en générateur (la f.é.m. interne est en avance sur la tension du réseau). Cet angle est une mesure électrique du décalage angulaire mécanique entre le rotor de la machine et le champ tournant du réseau.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Attention au signe de l'angle \(\phi\) ! Un facteur de puissance de 0,85 en retard (inductif) se traduit par un angle \(\phi\) positif, mais l'angle du vecteur courant est négatif (\(\angle \vec{I} = -\phi\)) car le courant est en RETARD sur la tension de référence.

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • L'équation vectorielle \(\vec{E} = \vec{V} + jX_s \vec{I}\) est la clé de l'analyse en charge.
  • Le module de \(E\) est lié à l'excitation ; l'angle \(\delta\) est lié à la puissance active.
  • La maîtrise des nombres complexes (forme rectangulaire et polaire) est indispensable.
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

La stabilité d'un réseau électrique repose sur la capacité de tous les alternateurs à maintenir leur synchronisme. Si, suite à un défaut, l'angle \(\delta\) d'une machine dépasse \(90^\circ\), la puissance active qu'elle peut fournir diminue, et elle risque de "décrocher" du réseau, provoquant une panne en cascade. C'est le "pôle de la stabilité".

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
La f.é.m. interne est \(E \approx 11413\) V et l'angle interne est \(\delta \approx 18,1^\circ\).
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant par rapport a la question)

Recalculez \(E\) et \(\delta\) si le courant était de 1000 A avec un facteur de puissance unitaire (\(\cos\phi = 1\)).

Question 3 : Tracer le diagramme de Behn-Eschenburg.

Principe

Le diagramme de Behn-Eschenburg est la représentation graphique dans le plan complexe de l'équation vectorielle \(\vec{E} = \vec{V} + jX_s \vec{I}\). Il permet de visualiser les relations de phase entre la tension, le courant et la f.é.m. interne. C'est un outil puissant pour comprendre qualitativement le comportement de la machine.

Schéma

On trace les vecteurs \(\vec{V}\), \(\vec{I}\), \(jX_s \vec{I}\) et \(\vec{E}\) en respectant leurs modules et leurs déphasages. On place \(\vec{V}\) sur l'axe réel. \(\vec{I}\) est en retard de \(\phi=31,8^\circ\). Le vecteur \(jX_s \vec{I}\) est en avance de \(90^\circ\) sur \(\vec{I}\). La somme de \(\vec{V}\) et \(jX_s \vec{I}\) donne le vecteur \(\vec{E}\), qui est en avance de \(\delta=18,1^\circ\) sur \(\vec{V}\).

Diagramme de Behn-Eschenburg
Re Im V I jXₛI E φ=31.8° δ=18.1°

Question 4 : Calculer les puissances active \(P\) et réactive \(Q\).

Principe (le concept physique)

La puissance active \(P\) représente l'énergie réellement transférée du moteur mécanique au réseau électrique par seconde. La puissance réactive \(Q\) est une grandeur qui caractérise l'énergie échangée entre la machine et le réseau pour maintenir les champs magnétiques ; elle ne produit pas de travail utile mais est essentielle au fonctionnement des équipements inductifs.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

La puissance complexe totale est donnée par \(\vec{S} = P + jQ = 3 \cdot \vec{V} \cdot \vec{I}^*\), où \(\vec{I}^*\) est le conjugué du vecteur courant. Cette formule est la plus rigoureuse. \(P\) est la partie réelle de \(\vec{S}\) et \(Q\) en est la partie imaginaire. Une valeur de \(Q > 0\) signifie que l'alternateur fournit de la puissance réactive (comportement inductif), tandis que \(Q < 0\) signifie qu'il en absorbe (comportement capacitif).

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Faites toujours attention aux unités. Les formules de base donnent \(P\) en Watts (W) et \(Q\) en Volt-Ampères Réactifs (VAR). Les énoncés demandent souvent des résultats en Mégawatts (MW) et Mégavars (MVAR). N'oubliez pas le facteur de conversion \(10^6\). De même, utilisez toujours les tensions composées (\(U\)) dans les formules de puissance triphasée avec le facteur \(\sqrt{3}\).

Normes (la référence réglementaire)

La définition des puissances P et Q en régime sinusoïdal est un fondement de l'électrotechnique, défini par la Commission Électrotechnique Internationale (CEI). La convention de signe (générateur/récepteur) et la terminologie (inductif/capacitif, en avance/en retard) sont également normalisées pour éviter toute ambiguïté.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Formule de la puissance active triphasée

\[ P = \sqrt{3} \cdot U \cdot I \cdot \cos(\phi) \]

Formule de la puissance réactive triphasée

\[ Q = \sqrt{3} \cdot U \cdot I \cdot \sin(\phi) \]
Hypothèses (le cadre du calcul)
  • Le système triphasé est parfaitement équilibré.
  • La tension et le courant sont purement sinusoïdaux (pas d'harmoniques).
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
ParamètreSymboleValeurUnité
Tension réseau (composée)\(U\)15kV
Courant de ligne\(I\)1200A
Facteur de puissance\(\cos(\phi)\)0,85(inductif)
F.é.m. interne (calculée)\(E\)11413V
Angle interne (calculé)\(\delta\)18,06°
Astuces(Pour aller plus vite)

Une fois que vous avez calculé la puissance apparente \(S = \sqrt{3} \cdot U \cdot I\), vous pouvez trouver \(P\) et \(Q\) rapidement : \(P = S \cdot \cos(\phi)\) et \(Q = S \cdot \sin(\phi)\). Ici, \(S = \sqrt{3} \times 15000 \times 1200 \approx 31,2\) MVA. Donc \(P = 31,2 \times 0.85 \approx 26,5\) MW.

Schéma (Avant les calculs)

Le triangle des puissances illustre la relation géométrique entre P (côté adjacent), Q (côté opposé) et S (hypoténuse), avec l'angle \(\phi\).

Triangle des puissances (principe)
P (W) Q (VAR) S (VA) φ
Calcul(s) (l'application numérique)

Calcul de la puissance active P

Calcul de la puissance réactive Q

\[ \begin{aligned} Q &= \sqrt{3} \cdot U \cdot I \cdot \sin(\phi) \\ &= \sqrt{3} \times 15000 \times 1200 \times 0,527 \\ &= 16418800 \, \text{VAR} \\ &\approx 16,4 \, \text{MVAR} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)

Le triangle des puissances est une représentation graphique des relations entre la puissance active P, la puissance réactive Q et la puissance apparente S.

Triangle des puissances (valeurs calculées)
26,5 MW 16,4 MVAR 31,2 MVA φ
Réflexions (l'interprétation du résultat)

La machine fournit 26,5 MW de puissance "utile" au réseau. Simultanément, elle fournit 16,4 MVAR de puissance réactive. Cela signifie qu'elle se comporte non seulement comme un générateur d'énergie, mais aussi comme un compensateur synchrone qui aide à soutenir la tension du réseau en fournissant du "magnétisme".

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Le signe de la puissance réactive est crucial. Comme le facteur de puissance est inductif (retard), la machine fournit du réactif, donc \(Q\) est positif. Si le facteur de puissance avait été capacitif (en avance), la machine aurait absorbé du réactif, et \(Q\) aurait été négatif.

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • Les formules de puissance triphasée utilisent la tension composée \(U\) et le courant de ligne \(I\) avec un facteur \(\sqrt{3}\).
  • \(P\) est associée à \(\cos(\phi)\), \(Q\) est associée à \(\sin(\phi)\).
  • Un fonctionnement inductif (en retard) correspond à une fourniture de Q (\(Q>0\)).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Dans un grand réseau électrique, la gestion de la puissance réactive est aussi importante que celle de la puissance active. Les gestionnaires de réseau (comme RTE en France) paient certains producteurs non pas pour leur production de MW, mais pour leur capacité à fournir ou absorber des MVAR afin de maintenir la tension du réseau dans une plage stable de fonctionnement.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
Les puissances fournies sont \(P = 26,5\) MW et \(Q = 16,4\) MVAR.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant par rapport a la question)

Calculez P et Q pour un courant de 1500 A et un \(\cos\phi = 0.9\) capacitif (en avance).

Question 5 : Déterminer \(I'\), \(\cos(\phi')\) et \(Q'\) pour \(P' = 35\) MW.

Principe (le concept physique)

La puissance active \(P\) est directement liée au couple moteur appliqué à l'arbre de l'alternateur. Le courant d'excitation \(I_e\) fixe la f.é.m. interne \(E\). Si on augmente le couple moteur sans toucher à l'excitation, \(P\) augmente et \(E\) reste constant. L'alternateur doit trouver un nouveau point d'équilibre. L'angle interne \(\delta\), qui lie \(P\) et \(E\), va donc augmenter, ce qui modifiera le courant \(I'\) et le facteur de puissance.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

Le point de fonctionnement de l'alternateur se situe à l'intersection de deux lieux géométriques dans le plan de Behn-Eschenburg : le cercle de f.é.m. constante (centré en \(-\vec{V}\), de rayon \(E\)) et la droite de puissance active constante (une droite verticale dans le plan des puissances, ou une droite oblique dans le plan de Behn-Eschenburg). Changer P tout en gardant E constant fait "glisser" le point de fonctionnement le long du cercle de f.é.m. constante.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Cette question illustre le découplage des commandes P et Q. Le motoriste (qui gère la turbine) contrôle \(P\) via le couple. L'électricien (qui gère l'alternateur) contrôle \(Q\) via l'excitation (\(I_e\)). Dans cet exercice, seul le motoriste agit. Nous allons voir comment cela impacte les grandeurs électriques vues par l'électricien.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Formule de la puissance active en fonction de \(\delta\)

\[ P' = 3 \frac{E \cdot V}{X_s} \sin(\delta') \Rightarrow \delta' = \arcsin\left(\frac{P' \cdot X_s}{3 \cdot E \cdot V}\right) \]

Formule du courant en fonction de E et V

\[ \vec{I'} = \frac{\vec{E'} - \vec{V}}{jX_s} \quad \text{avec } \vec{E'} = E \angle \delta' \]
Hypothèses (le cadre du calcul)
  • Le module de la f.é.m. \(E\) est constant car le courant d'excitation ne change pas (\(E = 11413\) V).
  • La tension réseau \(V\) reste stable à 8660 V par phase.
  • La réactance synchrone \(X_s\) est inchangée.
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
ParamètreSymboleValeurUnité
Nouvelle puissance active\(P'\)35MW
F.é.m. interne (module)\(E\)11413V
Tension simple réseau\(V\)8660V
Réactance synchrone\(X_s\)3,464\(\Omega\)
Schéma (Avant les calculs)

Le point de fonctionnement initial (E1) va se déplacer sur le cercle à E constant pour atteindre le nouveau point (E2) correspondant à la nouvelle puissance P'.

Évolution du point de fonctionnement
V Lieu à E = cst E₁ (P=26.5MW) E₂ (P'=35MW) δ₁ δ₂
Calcul(s) (l'application numérique)

Calcul de \(\sin(\delta')\)

\[ \begin{aligned} \sin(\delta') &= \frac{P' \cdot X_s}{3 \cdot E \cdot V} \\ &= \frac{35 \times 10^6 \times 3,464}{3 \times 11413 \times 8660} \\ &\approx 0,4096 \end{aligned} \]

Calcul du nouvel angle interne \(\delta'\)

\[ \delta' = \arcsin(0,4096) \approx 24,19^\circ \]

Calcul du nouveau vecteur \(\vec{E'}\)

\[ \begin{aligned} \vec{E'} &= 11413 \angle 24,19^\circ \\ &= 10418 + j4674 \, \text{V} \end{aligned} \]

Calcul du nouveau vecteur courant \(\vec{I'}\)

\[ \begin{aligned} \vec{I'} &= \frac{\vec{E'} - \vec{V}}{jX_s} \\ &= \frac{(10418 + j4674) - 8660}{3,464 \angle 90^\circ} \\ &= \frac{1758 + j4674}{3,464 \angle 90^\circ} \\ &= \frac{4996 \angle 69,37^\circ}{3,464 \angle 90^\circ} \\ &\approx 1442 \angle -20,63^\circ \, \text{A} \end{aligned} \]

Calcul du module du courant \(I'\)

\[ I' = |\vec{I'}| \approx 1442 \, \text{A} \]

Calcul du nouveau facteur de puissance

\[ \cos(\phi') = \cos(-20,63^\circ) \approx 0,936 \, \text{(en retard)} \]

Calcul de \(\sin(\phi')\)

\[ \sin(\phi') = \sin(20,63^\circ) \approx 0,3523 \]

Calcul de la nouvelle puissance réactive \(Q'\)

\[ \begin{aligned} Q' &= \sqrt{3} \cdot U \cdot I' \cdot \sin(\phi') \\ &= \sqrt{3} \times 15000 \times 1442 \times 0,3523 \\ &= 13196144 \, \text{VAR} \\ &\approx 13,2 \, \text{MVAR} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)

Le schéma compare le point de fonctionnement initial (indice 1) au nouveau point (indice 2). On voit que pour une même longueur de \(E\), l'augmentation de \(\delta\) modifie l'extrémité du vecteur, changeant ainsi le vecteur \(jX_sI\) et par conséquent le courant \(I\).

Évolution du point de fonctionnement
V Lieu à E = cst E₁ (P=26.5MW) E₂ (P'=35MW) δ₁ δ₂
Réflexions (l'interprétation du résultat)

En augmentant la puissance mécanique, l'angle \(\delta\) a logiquement augmenté (de 18,1° à 24,2°). Le courant débité \(I'\) a également augmenté pour transporter cette puissance supplémentaire. Fait intéressant, bien que nous n'ayons pas touché à l'excitation, la puissance réactive \(Q'\) a diminué (de 16,4 à 13,2 MVAR). Cela montre qu'il existe un "couplage" entre les commandes P et Q : une action sur P a un effet secondaire sur Q.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

L'erreur classique est de penser que si l'excitation ne change pas, la puissance réactive ne change pas. C'est faux. Comme le montre la formule \(Q = 3 (EV\cos\delta - V^2)/X_s\), si \(\delta\) change, \(Q\) change aussi. Seul le module de \(E\) reste constant.

Points à retenir (permettre a l'apprenant de maitriser la question)
  • La puissance active est principalement fonction de l'angle interne \(\delta\).
  • La f.é.m. \(E\) est principalement fonction du courant d'excitation.
  • Une variation de P à E constant modifie \(\delta\), et par conséquent \(I\) et \(Q\).
Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)

Les compensateurs synchrones sont de grosses machines synchrones qui ne sont couplées à aucune turbine. Elles tournent "à vide" sur le réseau et leur seul but est de fournir ou d'absorber de la puissance réactive en jouant uniquement sur leur courant d'excitation. Ils agissent comme des condensateurs ou des inductances variables géants pour réguler la tension du réseau.

FAQ (pour lever les doutes)
Résultat Final (la conclusion chiffrée)
Le nouveau courant est \(I' \approx 1442\) A, le nouveau facteur de puissance est \(\cos(\phi') \approx 0,936\) (inductif) et la nouvelle puissance réactive est \(Q' \approx 13,2\) MVAR.
A vous de jouer(pour verifier la comprehension de l'etudiant par rapport a la question)

Que se passerait-il si le couple moteur était réduit pour fournir seulement \(P''=15\) MW (E toujours constant) ? Calculez le nouvel angle \(\delta''\).


Outil Interactif : Simulateur de l'Alternateur

Utilisez cet outil pour explorer l'influence du courant débité et du facteur de puissance sur les grandeurs internes de l'alternateur. Les calculs sont basés sur la réactance synchrone de \(3,46 \, \Omega\) déterminée dans l'exercice.

Paramètres d'Entrée
1200 A
0.85 Inductif
Résultats Clés
F.é.m. interne (\(E\)) (V) -
Angle interne (\(\delta\)) (°) -
Puissance Active (\(P\)) (MW) -
Puissance Réactive (\(Q\)) (MVAR) -

Quiz Final : Testez vos connaissances

1. Sur un alternateur couplé au réseau, comment contrôle-t-on principalement la puissance active fournie ?

2. Que se passe-t-il si on augmente le courant d'excitation d'un alternateur débitant sur le réseau, à puissance active constante ?

3. Dans le diagramme de Behn-Eschenburg, l'angle interne \(\delta\) représente le déphasage entre :

4. Si un alternateur fonctionne avec un facteur de puissance de 0,9 capacitif, cela signifie qu'il :


Glossaire

Réactance Synchrone (\(X_s\))
Représente l'opposition totale au passage du courant alternatif dans le stator, combinant l'effet de l'inductance de fuite et de la réaction magnétique d'induit.
Force Électromotrice Interne (E)
Tension générée par le champ magnétique du rotor dans les enroulements du stator. Son module est directement lié au courant d'excitation.
Angle Interne (\(\delta\))
Déphasage angulaire entre le vecteur de la f.é.m. interne \(\vec{E}\) et le vecteur de la tension aux bornes \(\vec{V}\). Il est directement lié à la puissance active transmise.
Diagramme de Behn-Eschenburg
Représentation vectorielle de l'équation électrique de la machine synchrone, permettant de visualiser les relations entre \(\vec{E}\), \(\vec{V}\), et \(\vec{I}\).
Analyse d’une Machine Synchrone en Charge

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