Électricité en Chantier

Exercice : Installation Électrique de Chantier

Électricité en Chantier

Contexte : L'installation électrique de chantierAlimentation temporaire en énergie pour les outils, machines et l'éclairage sur un site de construction, régie par des normes de sécurité strictes..

Toute opération de construction, de la plus petite à la plus grande, nécessite une source d'énergie fiable et sécurisée. L'installation électrique temporaire, ou "de chantier", est le système nerveux du site. Elle alimente les équipements indispensables comme la grue, la centrale à béton, mais aussi la base vie des ouvriers et l'éclairage. Un dimensionnement correct est crucial non seulement pour l'efficacité du chantier, mais surtout pour la sécurité des personnes, en prévenant les risques d'électrisation et d'incendie. Cet exercice se base sur les recommandations de la norme NF C 15-100.

Remarque Pédagogique : Cet exercice vous guidera à travers les étapes clés du dimensionnement : réaliser un bilan de puissance, déterminer le courant d'emploi, et choisir la section du câble d'alimentation pour limiter la chute de tension.


Objectifs Pédagogiques

  • Savoir réaliser un bilan de puissance prévisionnel pour un chantier.
  • Appliquer les facteurs de simultanéité et d'utilisation pour optimiser le dimensionnement.
  • Calculer le courant d'emploi total et choisir une protection adaptée.
  • Déterminer la section d'un câble en fonction de la chute de tension maximale admissible.

Données de l'étude

L'étude porte sur le dimensionnement de l'alimentation électrique principale pour un chantier de construction d'un petit immeuble résidentiel. L'installation doit être raccordée à un coffret de branchement situé en limite de propriété.

Fiche Technique
Caractéristique Valeur
Type de réseau de distribution Triphasé 400V + Neutre + Terre
Distance du branchement à l'armoire 75 mètres
Chute de tension maximale admise 5%
Schéma de l'installation de chantier
Coffret de Branchement Câble L=75m Armoire Principale de Chantier Grue Base Vie Centrale Béton Éclairage...
Tableau des Récepteurs Électriques
Récepteur Puissance Utile (P) cos φ Facteur de Simultanéité (ks)
Grue à tour 30 kW 0.80 0.75
Base Vie (Bungalows) 15 kW 1.00 0.80
Centrale à béton 10 kW 0.70 0.60
Éclairage du chantier 5 kW 1.00 1.00
Prises de courant (outillage) 8 kW 0.90 0.50

Questions à traiter

  1. Calculer la puissance active totale installée (\(P_{\text{inst}}\)) sur le chantier.
  2. En appliquant les facteurs de simultanéité, déterminer la puissance active d'utilisation (\(P_{u}\)) et la puissance réactive d'utilisation (\(Q_{u}\)).
  3. En déduire la puissance apparente d'utilisation (\(S_{u}\)) et le courant d'emploi total (\(I_B\)).
  4. Choisir le calibre du disjoncteur tétrapolaire de branchement parmi les valeurs normalisées : 63A, 80A, 100A, 125A.
  5. Déterminer la section du câble d'alimentation principal (âme en cuivre) pour que la chute de tension reste inférieure à 5%. On utilisera la formule approchée et un tableau de sections normalisées.

Les bases sur le Dimensionnement Électrique

Le dimensionnement d'une installation électrique, même temporaire, repose sur des principes fondamentaux visant à assurer la continuité de service et la sécurité. On cherche à fournir la puissance nécessaire à chaque appareil sans surchauffer les câbles et en garantissant une tension stable.

1. Bilan de Puissance et Simultanéité
Il est rare que tous les appareils d'une installation fonctionnent simultanément à pleine puissance. Le bilan de puissance consiste à additionner les puissances de tous les récepteurs, puis à appliquer un facteur de simultanéité (ks) pour obtenir une puissance d'utilisation réaliste. On distingue la puissance active P (kW), qui produit un travail, la puissance réactive Q (kVAR), nécessaire aux circuits magnétiques, et la puissance apparente S (kVA), qui est la somme vectorielle des deux. \[ S = \sqrt{P^2 + Q^2} \quad \text{et} \quad P = S \cdot \cos(\varphi) \]

2. Chute de Tension
Lorsqu'un courant traverse un câble, celui-ci oppose une résistance qui provoque une perte de tension entre le début et la fin de la ligne. Une chute de tension trop importante peut entraîner un dysfonctionnement des appareils. La norme NF C 15-100 impose des limites (ex: 5% pour un ensemble Moteur). La chute de tension dépend de la longueur du câble (L), du courant (I), et de la section (S) du câble. \[ \Delta U (\%) = \frac{100 \times \sqrt{3} \times I_B \times L \times (\rho/S \cos(\varphi) + \lambda \sin(\varphi))}{U_0} \]


Correction : Électricité en Chantier

Question 1 : Calculer la puissance active totale installée (\(P_{\text{inst}}\))

Principe

La puissance installée est la somme arithmétique de toutes les puissances nominales des appareils susceptibles de fonctionner. Elle représente la puissance maximale théorique que l'installation pourrait consommer si tous les équipements fonctionnaient simultanément à 100% de leur capacité. C'est le point de départ brut de tout dimensionnement.

Mini-Cours

La puissance active (P), mesurée en Watts (W) ou kilowatts (kW), est la seule puissance qui produit un travail réel (mouvement, chaleur, lumière). C'est la puissance "utile". Dans un bilan de puissance, on commence toujours par additionner ces puissances actives pour avoir une vision globale des besoins de l'installation.

Remarque Pédagogique

Pour cette première étape, la clé est la rigueur. Prenez le temps de lister tous les récepteurs sans en oublier. C'est comme faire une liste de courses : un oubli peut coûter cher plus tard et nécessiter de redimensionner toute l'installation.

Normes

La norme NF C 15-100 n'impose pas de méthode pour ce calcul préliminaire, car il s'agit d'un recensement. Cependant, elle stipule que l'installation doit être capable de supporter la charge demandée en toute sécurité, ce qui rend cette étape de recensement implicitement obligatoire.

Formule(s)

Somme des puissances installées

\[ P_{\text{inst}} = \sum P_i = P_{\text{grue}} + P_{\text{base\_vie}} + P_{\text{centrale}} + P_{\text{eclairage}} + P_{\text{prises}} \]
Hypothèses

Pour ce calcul, la seule hypothèse est que la liste des récepteurs fournie dans l'énoncé est complète et que les puissances indiquées sont les puissances nominales correctes des équipements.

Donnée(s)

On reprend les puissances actives (P) du tableau des récepteurs.

RécepteurPuissance Utile (P)
Grue à tour30 kW
Base Vie15 kW
Centrale à béton10 kW
Éclairage5 kW
Prises de courant8 kW
Astuces

Lorsque vous avez une longue liste, n'hésitez pas à utiliser un tableur ou même la calculatrice de votre téléphone pour vérifier votre addition. Une erreur de calcul simple à ce stade faussera tous les résultats suivants.

Schéma (Avant les calculs)
Composition de la puissance installée
Grue (30)Base (15)Béton (10)E(5)P(8)P_inst = 30+15+10+5+8
Calcul(s)

Addition des puissances

\[ \begin{aligned} P_{\text{inst}} &= 30 + 15 + 10 + 5 + 8 \\ &= 68 \,\text{kW} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Résultat de la puissance installée
P_inst = 68 kW
Réflexions

Le résultat de 68 kW représente une puissance considérable, équivalente à celle de plus de 10 maisons individuelles bien équipées. Cela confirme qu'une alimentation de chantier est une installation de forte puissance qui exige des précautions et un dimensionnement rigoureux.

Points de vigilance

L'erreur la plus commune est de confondre les puissances : ne pas additionner des kW (actifs) avec des kVA (apparents) sans conversion. Ici, toutes les données sont en kW, le calcul est donc direct.

Points à retenir
  • La puissance installée (\(P_{\text{inst}}\)) est la somme de toutes les puissances nominales.
  • Elle représente un potentiel de consommation maximal et théorique.
  • C'est la première étape indispensable avant d'affiner le calcul avec la simultanéité.
Le saviez-vous ?

L'unité "Watt" a été nommée en l'honneur de l'ingénieur écossais James Watt pour ses contributions à l'amélioration de la machine à vapeur, qui fut au cœur de la Révolution Industrielle. C'est une reconnaissance de l'importance du concept de "puissance" dans la technologie.

FAQ

Dois-je toujours additionner toutes les puissances ?

Oui, pour la puissance *installée*, il s'agit toujours d'une somme complète. C'est à l'étape suivante que nous nuancerons ce total pour refléter un usage réaliste.

Résultat Final
La puissance active totale installée sur le chantier est de 68 kW.
A vous de jouer

Le chef de chantier décide d'ajouter un compresseur d'air de 12 kW. Quelle devient la nouvelle puissance installée ?

Question 2 : Calculer les puissances d'utilisation (\(P_u\) et \(Q_u\))

Principe

Pour obtenir une estimation réaliste de la puissance réellement appelée, on applique un "facteur de simultanéité" (\(k_s\)) à chaque appareil ou groupe d'appareils. Ce facteur, toujours inférieur ou égal à 1, représente la probabilité que l'appareil fonctionne à pleine charge en même temps que les autres. On calcule ensuite séparément la somme des puissances actives utilisées (\(P_u\)) et la somme des puissances réactives utilisées (\(Q_u\)).

Mini-Cours

Toute charge électrique qui n'est pas purement résistive (comme les moteurs) consomme deux types de puissance :
- Active (P) en kW : Celle qui est transformée en travail utile.
- Réactive (Q) en kVAR : Celle qui est utilisée pour créer les champs magnétiques indispensables au fonctionnement des moteurs.
Cette puissance réactive, bien que ne produisant pas de travail, "pèse" sur le réseau. On doit donc en tenir compte. La relation entre P, Q et le facteur de puissance \(\cos(\varphi)\) est \(Q = P \cdot \tan(\varphi)\).

Remarque Pédagogique

La clé ici est de traiter les puissances P et Q séparément. Ne mélangez jamais les kW et les kVAR dans une simple addition arithmétique. Pensez à deux paniers différents : un pour les puissances actives (P) et un pour les réactives (Q). Vous ne ferez la synthèse des deux qu'à la question suivante.

Normes

La norme NF C 15-100 fournit des tableaux de facteurs de simultanéité (\(k_s\)) pour les installations résidentielles et tertiaires. Pour les installations industrielles ou de chantier, ces facteurs sont souvent déterminés par l'expérience et l'analyse du processus. Ceux donnés dans l'énoncé sont des valeurs courantes pour ce type d'application.

Formule(s)

Formule de la puissance active d'utilisation

\[ P_u = \sum (P_i \times k_{s,i}) \]

Formule de la puissance réactive d'utilisation

\[ Q_u = \sum (P_i \cdot \tan(\varphi_i) \times k_{s,i}) \]
Hypothèses

On suppose que les facteurs de simultanéité fournis sont pertinents pour le type de chantier étudié et qu'ils reflètent correctement le cycle de travail des équipements.

Donnée(s)

On utilise toutes les données du tableau des récepteurs : Puissance (P), cos φ, et Facteur de Simultanéité (ks).

Astuces

Pour calculer \(\tan(\varphi)\) à partir de \(\cos(\varphi)\), utilisez la touche \(\cos^{-1}\) (ou acos) de votre calculatrice pour trouver l'angle \(\varphi\), puis calculez sa tangente. Ou bien, utilisez la relation mathématique \(\tan(\varphi) = \sqrt{1/\cos^2(\varphi) - 1}\) pour éviter de manipuler les angles.

Schéma (Avant les calculs)
Application des facteurs de simultanéité
P_inst (Grue)ks=0.75P_u (Grue)+ ...
Calcul(s)

Calcul de \(P_u\) (Puissance active d'utilisation)

\[ \begin{aligned} P_u &= (30 \times 0.75) + (15 \times 0.8) + (10 \times 0.6) + (5 \times 1) + (8 \times 0.5) \\ &= 22.5 + 12 + 6 + 5 + 4 \\ &= 49.5 \,\text{kW} \end{aligned} \]

Calcul des \(\tan(\varphi)\) intermédiaires

\[ \text{Grue : }\cos(\varphi)=0.8 \Rightarrow \tan(\varphi)=0.75 \]
\[ \text{Centrale : }\cos(\varphi)=0.7 \Rightarrow \tan(\varphi)=1.02 \]
\[ \text{Prises : }\cos(\varphi)=0.9 \Rightarrow \tan(\varphi)=0.48 \]

Calcul de \(Q_u\) (Puissance réactive d'utilisation)

\[ \begin{aligned} Q_u &= (30 \cdot 0.75 \cdot 0.75) + (15 \cdot 0 \cdot 0.8) + (10 \cdot 1.02 \cdot 0.6) + (5 \cdot 0 \cdot 1) + (8 \cdot 0.48 \cdot 0.5) \\ &= 16.875 + 0 + 6.12 + 0 + 1.92 \\ &= 24.915 \,\text{kVAR} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Triangle des puissances d'utilisation
Pu = 49.5 kWQu = 24.9 kVARSu = ?φ
Réflexions

La puissance active utilisée (49.5 kW) est bien inférieure à la puissance installée (68 kW). Cela montre l'impact majeur des facteurs de simultanéité, qui permettent de ne pas surdimensionner l'installation et donc de réduire les coûts (abonnement, section des câbles...). La valeur de puissance réactive (24.9 kVAR) est significative par rapport à la puissance active, ce qui est typique des sites avec de gros moteurs.

Points de vigilance

Attention à bien appliquer le \(k_s\) à chaque ligne *avant* de faire la somme. Une erreur fréquente est de sommer toutes les puissances P et Q d'abord, et d'appliquer un \(k_s\) moyen ensuite, ce qui est mathématiquement incorrect et moins précis. Une autre erreur est de mal calculer \(\tan(\varphi)\) ou d'oublier que pour les charges résistives (chauffage, éclairage incandescent), Q est nulle.

Points à retenir
  • La puissance d'utilisation est une estimation réaliste de la demande de puissance.
  • Elle s'obtient en pondérant chaque puissance installée par un facteur de simultanéité.
  • Les calculs des puissances actives (P) et réactives (Q) doivent être menés séparément.
Le saviez-vous ?

Les fournisseurs d'électricité facturent parfois des pénalités aux industriels qui consomment trop de puissance réactive (c'est-à-dire qui ont un mauvais facteur de puissance). Pour éviter cela, les entreprises installent des batteries de condensateurs qui "fournissent" localement la puissance réactive nécessaire aux moteurs, soulageant ainsi le réseau public.

FAQ

D'où viennent ces facteurs de simultanéité ?

Ils sont issus de l'expérience et de l'analyse statistique des usages. Pour un chantier, on sait par exemple que la grue n'est pas utilisée en permanence à 100% de sa charge, d'où un \(k_s\) de 0.75. Pour la base vie, on considère que le chauffage, les plaques de cuisson et les prises ne sont pas tous utilisés en même temps au maximum.

Résultat Final
La puissance active d'utilisation est \(P_u = 49.5\) kW et la puissance réactive d'utilisation est \(Q_u \approx 24.9\) kVAR.
A vous de jouer

Si l'on considère que la base vie sera finalement peu utilisée (\(k_s=0.4\)), quelle devient la nouvelle puissance active d'utilisation \(P_u\) ?

Question 3 : Calculer la puissance apparente (\(S_u\)) et le courant d'emploi (\(I_B\))

Principe

La puissance apparente (\(S_u\)) est la "somme vectorielle" des puissances active et réactive. Elle représente la puissance totale que le transformateur et les câbles doivent supporter. À partir de cette puissance apparente, on peut calculer le courant d'emploi (\(I_B\)), qui est le courant réel qui circulera dans le câble d'alimentation principal. Ce courant est la valeur de base pour dimensionner les protections et les câbles.

Mini-Cours

Le triangle des puissances est une représentation géométrique des trois puissances. La puissance active P est le côté adjacent, la puissance réactive Q est le côté opposé, et la puissance apparente S est l'hypoténuse. Le théorème de Pythagore s'applique donc : \(S^2 = P^2 + Q^2\). En régime triphasé équilibré, la puissance apparente est liée à la tension entre phases (U) et au courant de ligne (I) par la formule \(S = U \cdot I \cdot \sqrt{3}\).

Remarque Pédagogique

Ne soyez pas intimidé par la racine carrée et le \(\sqrt{3}\). Ce sont des formules fondamentales en électricité. L'important est de comprendre pourquoi on les utilise : Pythagore pour combiner P et Q, et le \(\sqrt{3}\) parce que c'est un système triphasé (trois signaux déphasés de 120°).

Normes

La norme NF C 15-100 désigne le courant d'emploi par le symbole \(I_B\). Toute la suite du dimensionnement (choix du disjoncteur \(I_n\), vérification du câble d'intensité admissible \(I_z\)) se base sur cette valeur de \(I_B\).

Formule(s)

Formule de la Puissance Apparente (Pythagore)

\[ S_u = \sqrt{P_u^2 + Q_u^2} \]

Formule du Courant d'Emploi en Triphasé

\[ I_B = \frac{S_u \times 1000}{U \times \sqrt{3}} \]
Hypothèses

Pour le calcul du courant, on suppose que le réseau est équilibré, c'est-à-dire que les charges sont réparties de manière égale sur les trois phases. C'est une hypothèse de conception pour une armoire de chantier bien conçue.

Donnée(s)

On utilise : \(P_u = 49.5\) kW, \(Q_u = 24.915\) kVAR et \(U = 400\) V.

Astuces

Attention aux unités ! La formule du courant d'emploi fonctionne avec S en Volt-Ampères (VA) et U en Volts. Comme notre \(S_u\) est en kVA, il faut bien penser à multiplier par 1000. Pour la tension, \(U \times \sqrt{3}\) avec \(U=400\)V vaut environ 693V. C'est une valeur utile à retenir.

Schéma (Avant les calculs)
Triangle des puissances d'utilisation
Pu = 49.5 kWQu = 24.9 kVARSuφ
Calcul(s)

Calcul de \(S_u\)

\[ \begin{aligned} S_u &= \sqrt{49.5^2 + 24.915^2} \\ &= \sqrt{2450.25 + 620.75} \\ &= \sqrt{3071} \\ &\approx 55.42 \,\text{kVA} \end{aligned} \]

Calcul de \(I_B\)

\[ \begin{aligned} I_B &= \frac{55.42 \times 1000}{400 \times \sqrt{3}} \\ &= \frac{55420}{692.8} \\ &\approx 80.0 \,\text{A} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Courant d'emploi dans le câble principal
SourceI_B = 80 ACharge
Réflexions

Un courant de 80 A est un courant très important. À titre de comparaison, une prise domestique standard est protégée par un disjoncteur de 16 A ou 20 A. Ce résultat confirme que l'alimentation de chantier relève de la haute puissance et nécessite des câbles de forte section et des protections industrielles.

Points de vigilance

L'erreur classique est d'oublier le facteur \(\sqrt{3}\) dans la formule du courant en triphasé, ce qui mènerait à un courant sous-estimé et donc à un dimensionnement dangereux. Une autre erreur est d'utiliser P (kW) au lieu de S (kVA) dans la formule du courant, ce qui est incorrect pour des charges non résistives.

Points à retenir
  • \(S_u\) est la "somme" de \(P_u\) et \(Q_u\) via le théorème de Pythagore.
  • \(I_B\) se calcule à partir de \(S_u\) et de la tension de réseau \(U\).
  • Ne jamais oublier le \(\sqrt{3}\) pour les calculs de puissance ou de courant en triphasé.
Le saviez-vous ?

Le transport d'électricité sur de longues distances se fait en triphasé à très haute tension. Pourquoi ? Car pour une même puissance transportée, augmenter la tension permet de diminuer l'intensité du courant (\(P = U \cdot I \cdot \sqrt{3}\)). Un courant plus faible signifie moins de pertes par effet Joule dans les lignes (\(P_{\text{pertes}} = R \cdot I^2\)), et donc un meilleur rendement énergétique.

FAQ

Pourquoi la puissance apparente S est-elle en kVA et non en kW ?

Pour bien différencier la puissance totale transitant dans le câble (S, en kVA) de la puissance réellement transformée en travail (P, en kW). Un transformateur ou un disjoncteur se moque de savoir si la puissance est active ou réactive ; il doit juste supporter le courant total, qui dépend de S.

Résultat Final
La puissance apparente d'utilisation est d'environ 55.4 kVA, ce qui correspond à un courant d'emploi \(I_B\) de 80 A.
A vous de jouer

Avec la nouvelle puissance de \(P_u=43.5\) kW (voir "A vous de jouer" Q2) et en gardant \(Q_u=24.9\) kVAR, quel serait le nouveau courant d'emploi \(I_B\) ?

Question 4 : Choisir le calibre du disjoncteur de branchement

Principe

Le disjoncteur principal (ou disjoncteur de branchement) a un double rôle : protéger les personnes et les biens contre les défauts électriques (surcharges, courts-circuits) et servir de coupure d'urgence. Son calibre nominal (\(I_n\)) doit être choisi juste au-dessus du courant d'emploi (\(I_B\)) pour permettre le fonctionnement normal de l'installation tout en assurant une protection efficace en cas d'anomalie.

Mini-Cours

Un disjoncteur magnétothermique possède deux mécanismes :
- Thermique : Un bilame qui s'échauffe avec le courant. Si le courant dépasse le calibre \(I_n\) pendant un certain temps (surcharge), il se déforme et déclenche.
- Magnétique : Une bobine qui crée un champ magnétique proportionnel au courant. En cas de court-circuit (courant très élevé et brutal), elle déclenche instantanément pour couper le circuit.

Remarque Pédagogique

Le choix est un compromis. Trop petit (\(I_n < I_B\)), le disjoncteur déclenchera sans arrêt ("disjonctions intempestives"). Trop grand, il ne protégera plus efficacement le câble en cas de surcharge modérée, créant un risque d'incendie. La règle est donc simple : on prend le premier calibre normalisé supérieur ou égal à \(I_B\).

Normes

La norme NF C 15-100 impose la règle de coordination entre le courant d'emploi, le calibre du disjoncteur et l'intensité admissible du câble (\(I_z\)) : \(I_B \le I_n \le I_z\). Pour cette question, nous nous concentrons sur la première partie : \(I_B \le I_n\).

Formule(s)

Règle de choix du calibre

\[ \text{Choisir } I_n \text{ tel que } I_n \ge I_B \]
Hypothèses

On suppose que le disjoncteur est de type standard pour une installation de distribution (Courbe C ou D).

Donnée(s)

Le courant d'emploi calculé est \(I_B = 80\) A. Les calibres normalisés disponibles sont 63A, 80A, 100A, 125A.

Astuces

Face à une liste de calibres, éliminez d'abord ceux qui sont strictement inférieurs à votre courant d'emploi. Ensuite, parmi ceux qui restent, prenez le plus petit. C'est la méthode la plus sûre et la plus économique.

Schéma (Avant les calculs)
Symbole Disjoncteur Tétrapolaire
xIn
Calcul(s)

Il n'y a pas de calcul, mais une comparaison :
- 63 A < 80 A \(\Rightarrow\) Insuffisant.
- 80 A = 80 A \(\Rightarrow\) Techniquement possible.
- 100 A > 80 A \(\Rightarrow\) Possible et offre une marge.
- 125 A > 80 A \(\Rightarrow\) Possible mais probablement surdimensionné.
Le choix se porte entre 80A et 100A. Compte tenu des forts courants de démarrage possibles des moteurs (grue, centrale), prendre une marge est une bonne pratique d'ingénieur pour garantir la continuité de service. On choisit donc 100A.

Schéma (Après les calculs)
Choix du calibre du disjoncteur
xIn = 100A
Réflexions

Le choix de 100 A au lieu de 80 A n'est pas une obligation normative stricte mais un choix de conception. Il assure que l'installation ne disjonctera pas lors du démarrage simultané de plusieurs machines, un événement courant sur un chantier. Ce "surcalibrage" modéré doit cependant être compatible avec le câble qui sera choisi à l'étape suivante (qui devra supporter au moins 100A).

Points de vigilance

Le principal point de vigilance est de ne jamais choisir un calibre inférieur à \(I_B\). Ne pas non plus choisir un calibre beaucoup trop élevé (par ex. 125A ici), car le rôle de protection contre les surcharges du câble ne serait plus correctement assuré.

Points à retenir
  • Le calibre du disjoncteur, \(I_n\), doit toujours être supérieur ou égal au courant d'emploi, \(I_B\).
  • On choisit toujours un calibre normalisé.
  • Une marge de sécurité est souvent prise pour accommoder les courants de démarrage.
Le saviez-vous ?

Il existe différentes "courbes de déclenchement" pour les disjoncteurs (B, C, D, etc.). Une courbe C (la plus courante) déclenche magnétiquement entre 5 et 10 fois \(I_n\), tandis qu'une courbe D (pour les forts courants de démarrage) déclenche entre 10 et 20 fois \(I_n\). Pour un chantier avec de gros moteurs, un disjoncteur courbe D est souvent recommandé.

FAQ

Pourquoi ne pas prendre 80A pile ? Ce serait moins cher.

C'est possible si le budget est très serré et que l'on est certain que les appels de courant au démarrage ne dépasseront pas les seuils de déclenchement. Cependant, une seule disjonction qui paralyse le chantier pendant une heure peut coûter bien plus cher que la différence de prix entre deux disjoncteurs.

Résultat Final
On choisit un disjoncteur de calibre \(I_n = 100\) A pour protéger l'installation, offrant une marge de sécurité par rapport au courant d'emploi de 80 A.
A vous de jouer

Si votre courant d'emploi \(I_B\) avait été de 61 A, quel calibre auriez-vous choisi dans la liste (63, 80, 100, 125) ?

Question 5 : Déterminer la section du câble principal

Principe

La section d'un câble (son "diamètre") est cruciale. Elle doit être choisie pour satisfaire deux conditions :
1. L'échauffement : Le câble doit être assez gros pour supporter le courant de protection (\(I_n=100A\)) sans fondre (son intensité admissible \(I_z\) doit être > \(I_n\)).
2. La chute de tension : Le câble doit être assez gros pour que la tension à son extrémité ne soit pas trop faible, ce qui est critique pour les longues distances.

Mini-Cours

La chute de tension dans un câble est due à son impédance, qui a deux composantes : sa résistance (R, liée à la résistivité \(\rho\)) et sa réactance (X, liée à l'effet inductif \(\lambda\)). Pour un câble triphasé, la formule complète prend en compte ces deux aspects ainsi que le déphasage du courant (cos φ). Le but est de trouver la plus petite section normalisée (S) qui maintient la chute de tension en dessous de la limite réglementaire.

Remarque Pédagogique

Pour les câbles longs comme ici (75m), c'est presque toujours la chute de tension qui est le critère le plus sévère. Ne vous contentez pas de choisir un câble qui supporte juste le courant. Faites toujours le calcul de chute de tension, c'est une étape non négociable pour un travail d'ingénieur de qualité.

Normes

La norme NF C 15-100 (partie 5-52) spécifie que la chute de tension entre l'origine de l'installation et tout point d'utilisation ne doit pas excéder certaines valeurs. Pour un chantier (considéré comme une installation Moteur/Autres usages), une limite de 5% est une valeur de conception courante et sûre.

Formule(s)

Calcul de la chute de tension maximale admissible

\[ \begin{aligned} \Delta U_{\text{max}} &= 5\% \times 400\,\text{V} \\ &= 20\,\text{V} \end{aligned} \]

Formule de la chute de tension triphasée

\[ \Delta U = \sqrt{3} \cdot I_B \cdot L \cdot \left(\frac{\rho}{S} \cos(\varphi) + \lambda \sin(\varphi)\right) \le \Delta U_{\text{max}} \]
Hypothèses

On suppose que le câble est en cuivre et que sa température en fonctionnement est de 70°C (ce qui justifie la valeur de résistivité choisie). On suppose également une pose standard du câble qui correspond à la valeur de réactance linéique donnée.

Donnée(s)

On utilise : L = 75 m, \(I_B\) = 80 A, \(\Delta U_{\text{max}}\) = 20 V, \(\cos(\varphi)\) = 0.89, \(\sin(\varphi)\) = 0.45, \(\rho = 0.0225 \, \Omega \cdot \text{mm}^2/\text{m}\), \(\lambda = 0.00008 \, \Omega/\text{m}\). Les sections normalisées sont : 16, 25, 35, 50, 70 mm²...

Astuces

Comme on ne peut pas résoudre directement pour S, la méthode la plus simple est de tester les sections normalisées en partant de la plus petite plausible et de voir laquelle passe sous la limite. Un câble de 16mm² supporte environ 80A (selon les conditions de pose), c'est donc un bon point de départ pour le test.

Schéma (Avant les calculs)
Modèle de Chute de Tension
SourceU_sourceCâble L=75mChargeU_chargeΔU = U_source - U_charge
Calcul(s)

Test avec S = 25 mm² :

\[ \begin{aligned} \Delta U &= \sqrt{3} \cdot 80 \cdot 75 \cdot \left(\frac{0.0225}{25} \cdot 0.89 + 0.00008 \cdot 0.45\right) \\ &= 10392 \cdot (0.000801 + 0.000036) \\ &= 10392 \cdot 0.000837 \\ &\approx 8.7 \,\text{V} \end{aligned} \]

Vérification de la condition

\[ 8.7\,\text{V} < 20\,\text{V} \quad (\text{soit } \frac{8.7}{400} \approx 2.2\% < 5\%) \]

La section de 25 mm² convient pour la chute de tension. Son intensité admissible (\(I_z \approx 104\)A) est bien supérieure à \(I_n=100\)A. Cette section est donc validée.

Schéma (Après les calculs)
Section du câble validée
S = 25mm²(Cuivre)
Réflexions

Le résultat de 2.2% est très confortable par rapport à la limite de 5%. Cela signifie que l'installation est robuste et que même si le courant augmente un peu, la chute de tension restera dans des limites acceptables. On a validé les deux critères : échauffement (\(I_z > I_n\)) et chute de tension (\(\Delta U < 5\%\)).

Points de vigilance

Attention à être cohérent avec les unités ! La résistivité \(\rho\) est en \(\Omega \cdot \text{mm}^2/\text{m}\) donc S doit être en mm². La réactance \(\lambda\) est souvent donnée en m\(\Omega\)/m, il faut la convertir en \(\Omega\)/m (diviser par 1000) pour le calcul.

Points à retenir
  • Le choix d'une section de câble repose sur deux vérifications : \(I_n \le I_z\) et \(\Delta U \le \Delta U_{\text{max}}\).
  • Pour les grandes longueurs, la chute de tension est souvent le critère le plus contraignant.
  • La formule de la chute de tension prend en compte la résistance et la réactance du câble.
Le saviez-vous ?

Pour des courants très importants (plusieurs centaines d'ampères), on utilise parfois plusieurs câbles en parallèle pour chaque phase plutôt qu'un seul câble énorme, qui serait trop rigide et difficile à manipuler. La mise en parallèle doit suivre des règles strictes pour que le courant se répartisse équitablement.

FAQ

Et si j'utilisais un câble en aluminium pour que ce soit moins cher ?

C'est possible. L'aluminium est moins cher et plus léger, mais il est moins bon conducteur que le cuivre. Sa résistivité est plus élevée (environ \(0.036 \, \Omega \cdot \text{mm}^2/\text{m}\)). À courant égal, il faudrait donc une section plus grosse (par exemple 35 ou 50 mm²) pour obtenir la même chute de tension. Il faut refaire le calcul !

Résultat Final
La section de 25 mm² pour le câble en cuivre est suffisante. On choisira donc un câble de type U1000 R2V 4G25 mm².
A vous de jouer

Avec la section validée de 25 mm², quelle serait la chute de tension en Volts si le câble faisait 120 mètres de long ?


Outil Interactif : Simulateur de Chute de Tension

Utilisez cet outil pour visualiser l'impact de la longueur du câble et du courant sur la chute de tension pour une section de 25 mm².

Paramètres d'Entrée
75 m
80 A
Résultats Clés (pour S=25mm²)
Chute de tension (V) -
Chute de tension (%) -

Quiz Final : Testez vos connaissances

1. Quel est l'objectif principal du facteur de simultanéité (\(k_s\)) ?

2. Si la longueur d'un câble double, que devient approximativement la chute de tension (à courant et section constants) ?

3. Que représente le cosinus phi (\(\cos(\varphi)\)) d'un moteur ?

4. Pour un courant d'emploi \(I_B=95\) A, quel calibre de disjoncteur normalisé choisiriez-vous ?

5. Une chute de tension trop importante dans une installation de chantier peut provoquer :


Glossaire

Bilan de Puissance
Inventaire de toutes les puissances des appareils électriques d'une installation pour déterminer la puissance totale à souscrire.
Chute de Tension
Diminution de la tension électrique le long d'un conducteur due à sa résistance. Elle est exprimée en Volts ou en pourcentage de la tension d'origine.
Facteur de Simultanéité (ks)
Coefficient (inférieur à 1) appliqué à la puissance d'un groupe d'appareils pour tenir compte du fait qu'ils ne fonctionnent jamais tous en même temps à pleine puissance.
Courant d'Emploi (IB)
Le courant maximal qu'une installation est susceptible de consommer en fonctionnement normal. C'est la valeur de calcul pour le choix des protections et des câbles.
Électricité en Chantier

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