Dimensionnement d'une panne de couverture en profilé à froid
Contexte : L'Optimisation de la Matière
Les profilés formés à froidProfilés métalliques (en forme de C, Z, Sigma...) obtenus par pliage à température ambiante d'une tôle d'acier mince. Ils sont légers et très optimisés pour un usage spécifique. (PAF) sont des éléments de structure très courants pour les pannes de couverture ou les lisses de bardage. Fabriqués à partir de tôles d'acier minces, ils offrent un excellent rapport résistance/poids. Cependant, leur faible épaisseur les rend sensibles à des phénomènes d'instabilité locale, comme le voilementPhénomène d'instabilité qui affecte les parois minces et comprimées d'un profilé, se manifestant par des ondulations. Le voilement peut empêcher la section d'atteindre sa pleine résistance.. Le dimensionnement selon l'Eurocode 3 (partie 1-3) ne se base donc pas sur la section brute, mais sur une section efficaceSection géométrique réduite d'un profilé à parois minces, utilisée pour les calculs de résistance. Elle ne prend en compte que les parties de la section qui travaillent efficacement sans voiler., qui représente la partie de la section réellement capable de reprendre les efforts.
Remarque Pédagogique : Le calcul de la section efficace est au cœur du dimensionnement des profilés à froid. L'idée est simple : si une paroi est trop large et trop mince, seule une partie de sa largeur (autour des zones rigides comme les plis) va réellement travailler en compression. Le reste va "voiler" et ne contribuera pas à la résistance. Cet exercice a pour but d'appliquer cette méthode pour vérifier une panne.
Objectifs Pédagogiques
- Calculer les charges de calcul sur une panne de toiture.
- Décomposer les charges selon les axes forts et faibles du profilé.
- Calculer les moments fléchissants de calcul (\(M_{y,Ed}\) et \(M_{z,Ed}\)).
- Comprendre le concept de section efficace pour les profilés minces.
- Vérifier la résistance en flexion bi-axiale d'une panne.
Données de l'étude
Schéma de la panne et des charges
- Combinaison d'actions à l'ELU : \(1.35 G_k + 1.5 S_k\)
- Coefficient partiel de sécurité : \(\gamma_{M0} = 1.0\)
- Acier S350GD : limite d'élasticité \(f_y = 350 \, \text{MPa}\)
- Profilé Z 200 (hauteur 200 mm), épaisseur 2.0 mm.
- Module de flexion efficace (calculé selon l'EC3) : \(W_{eff,y} = 65.4 \, \text{cm}^3\).
Questions à traiter
- Calculer la charge répartie de calcul (\(q_d\)) sur la panne, perpendiculairement à la toiture.
- Décomposer cette charge selon les axes forts (y-y) et faibles (z-z) de la panne.
- Calculer les moments fléchissants de calcul maximaux (\(M_{y,Ed}\) et \(M_{z,Ed}\)).
- Vérifier la résistance de la panne en flexion bi-axiale.
Correction : Dimensionnement d'une panne en profilé à froid
Question 1 : Charge de Calcul (\(q_d\))
Principe :
On calcule d'abord la charge surfacique de calcul (\(p_d\)) en appliquant la combinaison ELU. Ensuite, on multiplie cette charge surfacique par l'entraxe des pannes pour obtenir la charge linéaire (\(q_d\)) supportée par une seule panne.
Remarque Pédagogique :
De la surface à la ligne : C'est une étape clé de la "descente de charges". On transforme une charge qui s'applique sur toute la toiture (en kN/m²) en une charge qui s'applique le long d'une seule ligne (la panne, en kN/m). Chaque panne reprend une "bande" de toiture correspondant à son entraxe.
Formule(s) utilisée(s) :
Donnée(s) :
- \(G_k = 0.25 \, \text{kN/m}^2\)
- \(S_k = 0.60 \, \text{kN/m}^2\)
- Entraxe = 1.80 m
Calcul(s) :
Points de vigilance :
Charges de vent : Pour simplifier, cet exercice ne considère que les charges gravitaires (dites "de pesanteur"). Dans un cas réel, il faudrait aussi vérifier le cas du soulèvement dû au vent, qui peut être dimensionnant pour les pannes et leurs fixations.
Le saviez-vous ?
Question 2 : Décomposition des Charges
Principe :
La charge de toiture est verticale, mais la panne est inclinée. Pour le calcul, on doit décomposer cette charge verticale en deux composantes : une perpendiculaire à l'axe fort de la panne (\(q_{y,d}\)) et une perpendiculaire à son axe faible (\(q_{z,d}\)). Cela se fait par une simple projection trigonométrique en utilisant l'angle de la pente.
Remarque Pédagogique :
Pourquoi décomposer ? Un profilé en Z ou en C a une très grande résistance selon son axe fort (verticalement) mais une très faible résistance selon son axe faible (latéralement). Il est donc crucial de connaître précisément la part de la charge qui sollicite chaque axe pour vérifier la résistance.
Formule(s) utilisée(s) :
Donnée(s) :
- \(q_d = 2.23 \, \text{kN/m}\)
- Angle de pente \(\alpha = 20^\circ\)
Calcul(s) :
Points de vigilance :
Le bon angle : Il faut s'assurer d'utiliser l'angle de la pente de la toiture et non un autre angle. Une erreur sur l'angle peut modifier significativement la répartition des efforts entre les deux axes.
Le saviez-vous ?
Question 3 : Moments Fléchissants de Calcul (\(M_{y,Ed}\) et \(M_{z,Ed}\))
Principe :
Chaque composante de la charge crée un moment fléchissant. On calcule le moment maximal pour chaque axe en utilisant la formule classique de la poutre sur deux appuis. Le moment selon l'axe fort (\(M_{y,Ed}\)) est dû à la charge \(q_{y,d}\), et le moment selon l'axe faible (\(M_{z,Ed}\)) est dû à la charge \(q_{z,d}\).
Remarque Pédagogique :
La flexion bi-axiale : La panne est simultanément fléchie selon ses deux axes principaux. Elle se courbe "vers le bas" et "sur le côté" en même temps. La vérification finale devra tenir compte de cette double sollicitation.
Formule(s) utilisée(s) :
Donnée(s) :
- \(q_{y,d} = 2.10 \, \text{kN/m}\) ; \(q_{z,d} = 0.76 \, \text{kN/m}\)
- Portée \(L = 6.0 \, \text{m}\)
Calcul(s) :
Points de vigilance :
Le cas des pannes continues : Si les pannes sont continues sur plusieurs travées (ce qui est courant), le moment maximal n'est plus au milieu. Il y a un moment positif en travée (environ \(qL^2/14\)) et un moment négatif sur les appuis intermédiaires (environ \(qL^2/8\)). Il faut vérifier les deux sections.
Le saviez-vous ?
Question 4 : Vérification en Flexion Bi-axiale
Principe :
Pour vérifier une section soumise à une flexion selon ses deux axes, on utilise une formule d'interaction. Elle additionne les "taux de travail" de chaque flexion. Le taux de travail pour un axe est le rapport entre le moment appliqué et le moment résistant. La somme de ces ratios ne doit pas dépasser 1.
Remarque Pédagogique :
Une "jauge" de consommation de la résistance : On peut voir cette formule comme une jauge de carburant. La poutre a une capacité totale de 100%. La flexion selon l'axe y "consomme" une partie de cette capacité. La flexion selon l'axe z consomme le reste. Si la somme des deux consommations dépasse 100%, la jauge est vide et la poutre cède.
Formule(s) utilisée(s) :
Donnée(s) :
- \(M_{y,Ed} = 9.45 \, \text{kN.m}\) ; \(M_{z,Ed} = 3.42 \, \text{kN.m}\)
- \(W_{eff,y} = 65.4 \, \text{cm}^3 = 65400 \, \text{mm}^3\)
- \(f_y = 350 \, \text{MPa}\) ; \(\gamma_{M0} = 1.0\)
- On admettra, pour simplifier, que la résistance selon l'axe faible \(M_{c,z,Rd}\) est de 5.0 kN.m.
Calcul(s) :
Vérification de l'interaction :
Points de vigilance :
Ne pas négliger l'axe faible : Même si le moment selon l'axe faible (\(M_{z,Ed}\)) est petit, la résistance de la panne dans ce sens est également très faible. Le ratio de travail selon l'axe faible est souvent très élevé et peut être la cause de la non-conformité de la panne, comme c'est le cas ici (0.684).
Le saviez-vous ?
Simulation Interactive : Dimensionnement de la Panne
Faites varier les paramètres pour voir leur influence sur la sécurité de la panne. L'objectif est de garder le ratio d'interaction en dessous de 100%.
Paramètres de Conception
Résultats du Dimensionnement
Pour Aller Plus Loin : Vérification à l'État Limite de Service (ELS)
En plus de la résistance (ELU), il est impératif de vérifier la déformation (flèche) de la panne à l'ELS. Une panne trop souple, même si elle est résistante, peut entraîner une stagnation d'eau, une fissuration des éléments de couverture ou un inconfort visuel. La flèche est calculée avec les charges de service (non pondérées) et comparée à une limite admissible (souvent L/200 ou L/250). C'est fréquemment la vérification de la flèche qui impose le choix d'un profilé plus grand, et non la résistance.
Le Saviez-Vous ?
Les profilés en Z sont conçus pour être "emboîtables". En retournant un profilé sur deux, on peut les manchonner au niveau des appuis. Ce manchonnage crée une continuité et réduit considérablement le moment fléchissant maximal dans les pannes, permettant d'utiliser des sections plus petites et de franchir de plus grandes portées. C'est un système très ingénieux et économique.
Foire Aux Questions (FAQ)
Pourquoi utiliser un profilé en Z plutôt qu'un IPE pour une panne ?
Pour une même hauteur, un profilé en Z est beaucoup plus léger qu'un IPE car ses parois sont bien plus minces. Pour les pannes de toiture qui supportent des charges relativement faibles sur de grandes portées, le poids propre est un facteur important. Le profilé à froid est donc bien plus optimisé et économique pour cet usage.
Que se passe-t-il si la panne n'est pas maintenue contre la rotation ?
Si la panne n'est pas bloquée en rotation à ses appuis (par exemple par des éclisses anti-dévers), la charge \(q_{z,d}\) va la faire tourner sur elle-même. Ce phénomène, appelé torsion, doit être pris en compte dans les calculs et est généralement très défavorable. Les systèmes de pannes modernes incluent presque toujours des dispositifs pour empêcher cette rotation.
Quiz Final : Testez vos connaissances
1. Si l'on augmente l'entraxe des pannes, la charge sur chaque panne :
2. Le calcul avec une "section efficace" au lieu de la section brute est nécessaire à cause du risque de :
Glossaire
- Profilé Formé à Froid (PAF)
- Profilé métallique (en forme de C, Z, Sigma...) obtenu par pliage à température ambiante d'une tôle d'acier mince. Ils sont légers et très optimisés pour un usage spécifique.
- Voilement
- Phénomène d'instabilité qui affecte les parois minces et comprimées d'un profilé, se manifestant par des ondulations. Le voilement peut empêcher la section d'atteindre sa pleine résistance.
- Section Efficace
- Section géométrique réduite d'un profilé à parois minces, utilisée pour les calculs de résistance. Elle ne prend en compte que les parties de la section qui travaillent efficacement sans voiler.
- Eurocode 3, partie 1-3
- Partie de la norme européenne de calcul des structures en acier spécifiquement dédiée aux éléments et structures en acier formés à froid.
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