Calcul de la force de précontrainte

Calcul de la Force de Précontrainte en Béton Précontraint

Calcul de la Force de Précontrainte d'une Poutre

Contexte : Pourquoi précontraindre le béton ?

Le béton armé classique est efficace, mais pour de grandes portées (ponts, dalles de grande surface), le poids propre de la structure devient un problème majeur. La précontrainteTechnique consistant à introduire des efforts de compression internes dans le béton avant l'application des charges de service, afin de compenser les tractions futures. est une technique ingénieuse qui consiste à "comprimer à l'avance" le béton. On tend des câbles en acier à haute résistance à l'intérieur de la poutre, ce qui la met en compression. Ainsi, lorsque les charges de service (poids propre, trafic, etc.) sont appliquées, elles doivent d'abord "vaincre" cette compression initiale avant de pouvoir générer de la traction. Cela permet d'utiliser le béton de manière beaucoup plus efficace, de réduire les hauteurs de poutre et d'éviter la fissuration en service.

Remarque Pédagogique : Cet exercice vous guidera dans le dimensionnement de la force de précontrainte nécessaire pour une poutre de pont simplement appuyée. L'objectif est de s'assurer que, sous les charges de service, la poutre reste entièrement comprimée ou que les contraintes de traction restent inférieures à la limite admissible du béton.


Objectifs Pédagogiques

  • Calculer les caractéristiques géométriques d'une section de poutre.
  • Déterminer les moments fléchissants dus aux charges permanentes et d'exploitation.
  • Établir les équations de contraintes aux fibres supérieure et inférieure de la poutre.
  • Dimensionner la force de précontrainte minimale requise pour respecter les conditions de non-traction en service.
  • Vérifier les contraintes à la mise en tension de la précontrainte.

Données de l'étude

On étudie une poutre de pont en I de portée \(L = 30 \, \text{m}\), simplement appuyée à ses extrémités. La précontrainte est appliquée par un câble unique à excentricité constante.

Schéma de la poutre et de la section
L = 30 m e_p P P h = 1.0 m b = 0.8 m

Caractéristiques géométriques, matériaux et charges :

  • Section en I symétrique :
    • Hauteur totale : \(h = 1.0 \, \text{m}\)
    • Largeur des semelles : \(b = 0.8 \, \text{m}\)
    • Épaisseur des semelles : \(t_{\text{f}} = 0.20 \, \text{m}\)
    • Épaisseur de l'âme : \(t_{\text{w}} = 0.20 \, \text{m}\)
  • Béton : Classe C40/50 (\(f_{\text{ck}} = 40 \, \text{MPa}\))
  • Contraintes limites en service (ELS) :
    • Compression : \(\sigma_{\text{c,max}} = 0.6 \cdot f_{\text{ck}} = 24 \, \text{MPa}\)
    • Traction : \(\sigma_{\text{t,max}} = 0 \, \text{MPa}\) (pas de traction admise en fibre inférieure)
  • Charges permanentes (hors poids propre) : \(g_{\text{k}} = 10 \, \text{kN/m}\)
  • Charges d'exploitation : \(q_{\text{k}} = 15 \, \text{kN/m}\)
  • Masse volumique du béton : \(\rho_{\text{b}} = 25 \, \text{kN/m}^3\)
  • Excentricité du câble de précontrainte : \(e_{\text{p}} = 0.35 \, \text{m}\) (constante)
  • Pertes de précontrainte estimées : 20%

Questions à traiter

  1. Calculer l'aire, la position du centre de gravité et l'inertie de la section.
  2. Calculer le moment maximal dû aux charges permanentes (\(M_{\text{G}}\)) et d'exploitation (\(M_{\text{Q}}\)).
  3. Établir l'inéquation de contrainte en fibre inférieure à l'ELS quasi-permanent.
  4. Déterminer la force de précontrainte initiale minimale \(P_{\text{0}}\) à appliquer.

Correction : Calcul de la Force de Précontrainte

Question 1 : Calculer les caractéristiques de la section

Principe avec image animée (le concept physique)
Section = Semelle sup. + Âme + Semelle inf.

Avant tout calcul de contrainte, il est indispensable de connaître les propriétés géométriques de la section transversale de la poutre. Il s'agit de son aire (qui résiste à l'effort normal), de la position de son centre de gravité (l'axe neutre pour la flexion) et de son moment d'inertie (sa capacité à résister à la flexion). Pour une section composée comme un I, on la décompose en rectangles simples.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

Le moment d'inertie (\(I\)) représente la rigidité en flexion d'une section. Plus sa valeur est élevée, plus la poutre est rigide. Les formes en "I" sont optimisées pour la flexion car elles concentrent la matière (les semelles) le plus loin possible de l'axe neutre, là où elle est la plus efficace pour reprendre les contraintes, maximisant ainsi l'inertie pour une aire donnée.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Point Clé : La première étape de tout calcul de RDM est de s'assurer que les caractéristiques géométriques sont correctes. Une petite erreur ici invalidera tous les calculs qui suivent. Prenez l'habitude de toujours vérifier vos calculs d'aire et d'inertie.

Normes (la référence réglementaire)

Les formules de calcul des propriétés géométriques des sections sont issues des principes fondamentaux de la mécanique des solides et sont la base de toutes les réglementations de calcul de structure, y compris l'Eurocode 2.

Hypothèses (le cadre du calcul)

Pour ce calcul purement géométrique, on considère la section de béton comme un matériau homogène et non fissuré.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Aire d'un rectangle :

\[ A = b \times h \]

Moment d'inertie d'un rectangle par rapport à son centre :

\[ I_{\text{G}} = \frac{bh^3}{12} \]
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Hauteur \(h = 1.0 \, \text{m}\)
  • Largeur semelles \(b = 0.8 \, \text{m}\)
  • Épaisseur semelles \(t_{\text{f}} = 0.20 \, \text{m}\)
  • Épaisseur âme \(t_{\text{w}} = 0.20 \, \text{m}\)
Calcul(s) (l'application numérique)

Calcul de l'aire de la section (\(A\)) :

\[ \begin{aligned} A &= 2 \times (b \times t_{\text{f}}) + ((h - 2 \times t_{\text{f}}) \times t_{\text{w}}) \\ &= 2 \times (0.80 \times 0.20) + ((1.0 - 2 \times 0.20) \times 0.20) \\ &= 2 \times 0.16 + (0.60 \times 0.20) \\ &= 0.32 + 0.12 \\ &= 0.44 \, \text{m}^2 \end{aligned} \]

Position du centre de gravité :

La section étant symétrique, le centre de gravité se trouve à mi-hauteur, soit \(y_{\text{G}} = h/2 = 0.5 \, \text{m}\).

Calcul du moment d'inertie (\(I_{\text{G}}\)) :

\[ \begin{aligned} I_{\text{G}} &= \frac{b h^3}{12} - 2 \times \frac{(b-t_{\text{w}})/2 \cdot (h-2t_{\text{f}})^3}{12} \\ &= \frac{0.8 \cdot 1.0^3}{12} - 2 \times \frac{(0.8-0.2)/2 \cdot (1.0-0.4)^3}{12} \\ &= 0.06667 - 2 \times \frac{0.3 \cdot 0.6^3}{12} \\ &= 0.06667 - 0.0108 \\ &= 0.05587 \, \text{m}^4 \end{aligned} \]
Réflexions (l'interprétation du résultat)

La forme en I est très efficace. La majorité de la matière (les semelles) est située loin de l'axe neutre, ce qui maximise le moment d'inertie (la rigidité) pour une quantité de matière (l'aire) donnée.

Point à retenir : La géométrie (Aire A, Inertie I) dicte la résistance de la poutre aux efforts.

Justifications (le pourquoi de cette étape)

Cette étape est essentielle car tous les calculs de contraintes dépendent directement de A et I. Sans ces valeurs, il est impossible de continuer.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Attention aux unités : Une erreur fréquente est de mélanger les mètres et les centimètres ou millimètres. Il est plus sûr de tout convertir dans une unité cohérente (par exemple, mètres et Newtons) dès le début.

Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Résultat Final : \(A = 0.44 \, \text{m}^2\), \(I_{\text{G}} = 0.0559 \, \text{m}^4\).

À vous de jouer : Quelle serait l'aire (\(\text{en m}^2\)) si l'épaisseur de l'âme était de 0.30 m ?

Question 2 : Calculer les moments fléchissants maximaux

Principe avec image animée (le concept physique)
Moment max à mi-portée

Le moment fléchissant est l'effort interne qui fait "plier" la poutre. Pour une poutre simplement appuyée soumise à une charge uniformément répartie \(w\), le moment est maximal au milieu de la travée et sa valeur est \(M_{\text{max}} = wL^2/8\). Nous devons calculer ce moment pour les charges permanentes (poids propre + charges additionnelles) et les charges d'exploitation.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

On distingue les charges permanentes (G), qui sont toujours présentes (poids propre, revêtements), des charges d'exploitation (Q), qui sont variables (trafic, vent, neige). Cette distinction est cruciale car elles sont affectées de coefficients de sécurité différents dans les calculs à l'état limite ultime (ELU) et de combinaison à l'état limite de service (ELS).

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Point Clé : N'oubliez jamais d'inclure le poids propre de la poutre dans les charges permanentes. C'est souvent une part très significative de la charge totale, surtout pour les ouvrages de grande portée en béton.

Normes (la référence réglementaire)

L'Eurocode 1 ("Actions sur les structures") fournit les méthodes pour déterminer les valeurs des charges de service. La formule \(M=wL^2/8\) est un résultat fondamental de la Résistance des Matériaux (RDM).

Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose que les charges sont uniformément réparties sur toute la longueur de la poutre, ce qui est une hypothèse courante et raisonnable pour un tablier de pont.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Poids propre par mètre linéaire :

\[ g_{\text{pp}} = A \times \rho_{\text{b}} \]

Moment maximal pour une charge uniforme :

\[ M_{\text{max}} = \frac{w L^2}{8} \]
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Portée \(L = 30 \, \text{m}\)
  • Charge permanente \(g_{\text{k}} = 10 \, \text{kN/m}\)
  • Charge d'exploitation \(q_{\text{k}} = 15 \, \text{kN/m}\)
  • Aire \(A = 0.44 \, \text{m}^2\), \(\rho_{\text{b}} = 25 \, \text{kN/m}^3\)
Calcul(s) (l'application numérique)

Calcul du poids propre de la poutre (\(g_{\text{pp}}\)) :

\[ \begin{aligned} g_{\text{pp}} &= A \times \rho_{\text{b}} \\ &= 0.44 \, \text{m}^2 \times 25 \, \text{kN/m}^3 \\ &= 11 \, \text{kN/m} \end{aligned} \]

Calcul de la charge permanente totale (\(G\)) :

\[ \begin{aligned} G &= g_{\text{pp}} + g_{\text{k}} \\ &= 11 \, \text{kN/m} + 10 \, \text{kN/m} \\ &= 21 \, \text{kN/m} \end{aligned} \]

Calcul du moment maximal dû aux charges permanentes (\(M_{\text{G}}\)) :

\[ \begin{aligned} M_{\text{G}} &= \frac{G \cdot L^2}{8} \\ &= \frac{21 \cdot 30^2}{8} \\ &= 2362.5 \, \text{kN} \cdot \text{m} \end{aligned} \]

Calcul du moment maximal dû aux charges d'exploitation (\(M_{\text{Q}}\)) :

\[ \begin{aligned} M_{\text{Q}} &= \frac{q_{\text{k}} \cdot L^2}{8} \\ &= \frac{15 \cdot 30^2}{8} \\ &= 1687.5 \, \text{kN} \cdot \text{m} \end{aligned} \]
Réflexions (l'interprétation du résultat)

Le moment dû aux charges permanentes est toujours présent. La précontrainte doit, au minimum, le contrebalancer. Le moment d'exploitation est celui que la poutre doit pouvoir supporter en plus en conditions de service.

Point à retenir : Le moment fléchissant maximal sur une poutre simple est \(M = wL^2/8\) à mi-portée.

Justifications (le pourquoi de cette étape)

Nous devons quantifier le moment fléchissant maximal car c'est cet effet que la précontrainte est conçue pour annuler ou réduire.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Ne pas mélanger les charges G et Q : Il est important de calculer leurs effets séparément car elles ne sont pas combinées de la même manière selon les vérifications (ELS caractéristique, fréquent, quasi-permanent).

Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Résultat Final : \(M_{\text{G}} = 2362.5 \, \text{kN} \cdot \text{m}\) et \(M_{\text{Q}} = 1687.5 \, \text{kN} \cdot \text{m}\).

À vous de jouer : Quel serait le moment total \(M_{\text{G}}+M_{\text{Q}}\) (en kNm) si la portée L était de 25 m ?

Question 3 : Établir l'inéquation de contrainte en fibre inférieure

Principe avec image animée (le concept physique)
-P/A +Mp*y/I -Mq*y/I = Total

La contrainte en un point d'une section est la somme des contraintes dues à chaque effort. Ici, nous avons la compression due à la force de précontrainte (\(P\)) et la flexion due à cette même force (car elle est excentrée) et aux charges extérieures (moments \(M_{\text{G}}\) et \(M_{\text{Q}}\)). On écrit que la somme de toutes ces contraintes en fibre inférieure doit être supérieure ou égale à zéro (condition de non-traction).

Mini-Cours (approfondissement théorique)

La formule de Navier (\(\sigma = N/A + My/I\)) est la pierre angulaire de ce calcul. Le terme \(N/A\) représente la contrainte uniforme de compression due à l'effort normal \(P_{\text{k}}\). Le terme \(My/I\) représente la contrainte de flexion, qui varie linéairement sur la hauteur de la section. Il est crucial de superposer correctement les effets de chaque moment (celui des charges et celui, bénéfique, de la précontrainte excentrée).

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Point Clé : La partie la plus délicate est la gestion des signes. Mon conseil : dessinez la répartition des contraintes pour chaque cas (P axial, moment de P, moment des charges) puis additionnez-les. Cela permet de visualiser et de ne pas se tromper dans les signes de l'équation finale.

Normes (la référence réglementaire)

La formule de superposition des contraintes est un principe de base de la mécanique des milieux continus, applicable tant que le matériau reste dans son domaine élastique, ce qui est l'hypothèse de base des vérifications à l'ELS selon l'Eurocode 2.

Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose un comportement élastique et linéaire du béton (la loi de Hooke s'applique). On suppose que les sections planes restent planes après déformation (hypothèse de Bernoulli).

Formule(s) (l'outil mathématique)

Formule générale de la contrainte :

\[ \sigma = \frac{N}{A} + \frac{M}{I} \cdot y \]

Inéquation en fibre inférieure :

\[ \sigma_{\text{inf}} = \underbrace{\frac{-P_{\text{k}}}{A}}_{\text{Comp. axiale}} \underbrace{- \frac{(-P_{\text{k}} \cdot e_{\text{p}})}{I_{\text{G}}} \cdot y_{\text{inf}}}_{\text{Flexion par Pk}} + \underbrace{\frac{M_{\text{G+Q}}}{I_{\text{G}}} \cdot y_{\text{inf}}}_{\text{Flexion par charges}} \ge 0 \]

Inéquation simplifiée (compression positive) :

\[ \frac{P_{\text{k}}}{A} + \frac{P_{\text{k}} \cdot e_{\text{p}} \cdot 0.5}{I_{\text{G}}} - \frac{(M_{\text{G}} + M_{\text{Q}}) \cdot 0.5}{I_{\text{G}}} \ge 0 \]
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • \(A = 0.44 \, \text{m}^2\)
  • \(I_{\text{G}} = 0.0559 \, \text{m}^4\)
  • \(e_{\text{p}} = 0.35 \, \text{m}\)
  • \(M_{\text{G+Q}} = 4050 \, \text{kN} \cdot \text{m}\)
  • \(y_{\text{inf}} = -0.5 \, \text{m}\)
Calcul(s) (l'application numérique)

Cette étape consiste à poser l'équation littérale qui sera résolue à la question suivante. Aucun calcul numérique n'est requis ici.

Réflexions (l'interprétation du résultat)

Cette unique inéquation contient toute la philosophie du dimensionnement : la compression générée par la précontrainte (les deux premiers termes) doit être supérieure ou égale à la traction générée par les charges extérieures (le troisième terme), au point le plus critique (la fibre inférieure à mi-travée).

Point à retenir : La contrainte en un point est la superposition des contraintes de chaque effort (effort normal et moment fléchissant).

Justifications (le pourquoi de cette étape)

Cette inéquation traduit l'exigence du cahier des charges ("pas de traction en fibre inférieure") en un problème mathématique que l'on peut résoudre pour trouver l'inconnue, qui est la force de précontrainte \(P_{\text{k}}\).

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Erreur de signe sur y : Assurez-vous d'utiliser la bonne coordonnée y. Pour la fibre inférieure, y est négatif (\(y = -h/2\)). Pour la fibre supérieure, y est positif (\(y = +h/2\)). Une erreur de signe ici est critique.

Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Résultat Final : L'inéquation à résoudre est \(P_{\text{k}} \left( \frac{1}{A} + \frac{e_{\text{p}} \cdot 0.5}{I_{\text{G}}} \right) \ge \frac{(M_{\text{G}} + M_{\text{Q}}) \cdot 0.5}{I_{\text{G}}}\).

À vous de jouer : Si l'excentricité \(e_{\text{p}}\) était nulle (câble centré), que deviendrait le terme entre parenthèses qui multiplie \(P_{\text{k}}\) ?

Question 4 : Déterminer la force de précontrainte initiale \(P_{\text{0}}\)

Principe avec image animée (le concept physique)
P₀ (initiale) Pertes (20%) Pk (finale)

On résout l'inéquation précédente pour trouver la force de précontrainte minimale \(P_{\text{k}}\) (après pertes) nécessaire pour annuler les tractions. Ensuite, on tient compte des pertes pour remonter à la force initiale \(P_{\text{0}}\) qui doit être appliquée par les vérins lors de la construction.

Mini-Cours (approfondissement théorique)

Les pertes de précontrainte sont la réduction de la force dans les câbles au fil du temps. On distingue les pertes instantanées (au moment de la mise en tension : frottement, recul d'ancrage) et les pertes différées (au cours de la vie de l'ouvrage : retrait et fluage du béton, relaxation de l'acier). Le calcul précis est complexe, mais une estimation en pourcentage est souvent utilisée en pré-dimensionnement.

Remarque Pédagogique (le conseil du professeur)

Point Clé : Soyez toujours très clair sur la force que vous manipulez : s'agit-il de la force initiale \(P_{\text{0}}\) (au vérin), ou de la force finale en service \(P_{\text{k}}\) (après pertes) ? La différence est importante (typiquement 15-30%).

Normes (la référence réglementaire)

L'Eurocode 2, dans sa section 5.10, fournit des méthodes détaillées pour estimer chaque composante des pertes de précontrainte, bien plus précises que l'approche forfaitaire utilisée ici.

Hypothèses (le cadre du calcul)

On suppose une perte forfaitaire de 20%. Dans un projet réel, chaque source de perte serait calculée individuellement pour plus de précision.

Formule(s) (l'outil mathématique)

Relation entre force initiale et finale :

\[ P_{\text{k}} = (1 - \text{pertes}) \cdot P_{\text{0}} \]
Donnée(s) (les chiffres d'entrée)
  • Terme de droite de l'inéquation : \(36225 \, \text{kN/m}^2\)
  • Terme facteur de \(P_{\text{k}}\) : \(5.40 \, \text{m}^{-2}\)
  • Pertes : 20% ou 0.20
Calcul(s) (l'application numérique)

Calcul du moment total :

\[ \begin{aligned} M_{\text{G+Q}} &= 2362.5 + 1687.5 \\ &= 4050 \, \text{kN} \cdot \text{m} \end{aligned} \]

Calcul des termes de l'inéquation :

\[ \begin{aligned} \frac{(M_{\text{G}} + M_{\text{Q}}) \cdot 0.5}{I_{\text{G}}} &= \frac{4050 \cdot 0.5}{0.0559} \\ &= 36225 \, \text{kN/m}^2 \\ \frac{1}{A} + \frac{e_{\text{p}} \cdot 0.5}{I_{\text{G}}} &= \frac{1}{0.44} + \frac{0.35 \cdot 0.5}{0.0559} \\ &= 2.27 + 3.13 \\ &= 5.40 \, \text{m}^{-2} \end{aligned} \]

Résolution pour \(P_{\text{k}}\) :

\[ \begin{aligned} P_{\text{k}} \times 5.40 &\ge 36225 \\ \Rightarrow P_{\text{k}} &\ge \frac{36225}{5.40} \\ &\ge 6708 \, \text{kN} \end{aligned} \]

Calcul de la force initiale \(P_{\text{0}}\) :

\[ \begin{aligned} P_{\text{0}} &= \frac{P_{\text{k}}}{1 - \text{pertes}} \\ &= \frac{6708}{1 - 0.20} \\ &= \frac{6708}{0.80} \\ &= 8385 \, \text{kN} \end{aligned} \]
Réflexions (l'interprétation du résultat)

La force requise est énorme, près de 840 tonnes. C'est pourquoi la précontrainte utilise des torons d'acier à très haute résistance et de puissants vérins hydrauliques pour la mise en tension.

Point à retenir : La force initiale P0 doit être supérieure à la force finale requise Pk pour compenser les pertes de précontrainte.

Justifications (le pourquoi de cette étape)

Cette étape finale fournit la valeur pratique nécessaire pour le chantier : la force que les opérateurs devront appliquer aux vérins lors de la mise en tension des câbles.

Points de vigilance (les erreurs à éviter)

Utiliser \(P_{\text{0}}\) au lieu de \(P_{\text{k}}\) : Utiliser la force initiale dans les vérifications en service serait une erreur dangereuse, car cela surestimerait l'effet bénéfique de la précontrainte et conduirait à un dimensionnement non sécuritaire.

Le saviez-vous ? (la culture de l'ingénieur)
Résultat Final : La force de précontrainte initiale minimale à appliquer est \(P_{\text{0}} = 8385 \, \text{kN}\).

À vous de jouer : Quelle serait la force initiale \(P_{\text{0}}\) (en kN) si les pertes n'étaient que de 15% ?


Mini Fiche Mémo : Calcul de Précontrainte

Étape Formule Clé & Objectif
1. Géométrie Calcul de \(A\) et \(I_{\text{G}}\).
Connaître la capacité de la section à résister aux efforts.
2. Moments (ELS) \( M_{\text{max}} = wL^2 / 8 \)
Quantifier les efforts de flexion dus aux charges de service.
3. Contraintes \( \sigma = N/A \pm My/I \)
Écrire l'équilibre des contraintes en un point critique (fibre inf.).
4. Force de précontrainte Résoudre l'inéquation pour \(P_{\text{k}}\) puis \(P_{\text{0}}\).
Déterminer la force de compression nécessaire pour annuler les tractions.

Outil Interactif : Influence de l'Excentricité

Modifiez l'excentricité du câble pour voir son impact sur la force de précontrainte requise. Notez comme une plus grande excentricité est efficace.

Paramètres
0.35 m
30 m
Résultats
Force \(P_{\text{0}}\) requise -
Contrainte béton (compression max) -

Le Saviez-Vous ?

L'inventeur de la précontrainte, Eugène Freyssinet, a eu l'idée en observant des canons. Pour résister à l'explosion, les canons étaient fabriqués en enroulant des fils d'acier tendus autour du tube principal, le mettant en compression. Il a appliqué ce même principe au béton pour en faire un matériau de construction révolutionnaire.


Foire Aux Questions (FAQ)

Pourquoi l'excentricité du câble est-elle si importante ?

L'excentricité crée un "moment de précontrainte" (\(M_{\text{p}} = P \times e_{\text{p}}\)) qui s'oppose directement aux moments des charges. Plus l'excentricité est grande, plus ce moment est important pour une même force P. C'est pourquoi les câbles suivent souvent un tracé courbe, avec une excentricité maximale là où le moment des charges est maximal (à mi-travée).

Que sont les "pertes de précontrainte" ?

La force de tension dans les câbles diminue avec le temps. Ces pertes sont dues à plusieurs phénomènes : le frottement du câble dans sa gaine, le recul des ancrages, la relaxation des aciers (ils se détendent un peu sous tension constante), et le retrait et le fluage du béton (le béton se raccourcit et se déforme dans le temps, ce qui détend les câbles). Ces pertes doivent être anticipées dans les calculs.


Quiz Final : Testez vos connaissances

1. Si la portée de la poutre augmente, la force de précontrainte requise va :

2. La précontrainte sert principalement à :


Précontrainte
Introduction d'efforts internes de compression dans un matériau avant sa mise en service pour contrer les tractions futures.
Excentricité (\(e_{\text{p}}\))
Distance entre le centre de gravité de la section en béton et le centre de gravité du ou des câbles de précontrainte.
Moment d'Inertie (I)
Caractéristique géométrique d'une section qui mesure sa résistance à la flexion. Plus l'inertie est grande, plus la section est rigide.
Pertes de précontrainte
Réduction de la force de tension dans les câbles au fil du temps due à divers phénomènes physiques (retrait, fluage, relaxation).
Fondamentaux du Génie Civil : Calcul de la Force de Précontrainte

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