Analyse des Causes de la Corrosion des Armatures

Exercice : Analyse de la Corrosion des Armatures

Analyse des Causes de la Corrosion des Armatures

Contexte : La durabilité du béton armé.

Le béton armé est un matériau de construction omniprésent, mais sa durabilité peut être compromise par la corrosion de ses armatures en acier. Ce phénomène, responsable de dégradations coûteuses et dangereuses, est principalement initié par deux processus chimiques : la carbonatationProcessus chimique où le CO₂ de l'air réagit avec l'hydroxyde de calcium du béton, abaissant son pH et détruisant la couche protectrice des aciers. du béton et la pénétration d'ions chloruresIons, souvent issus des sels de déverglaçage ou de l'air marin, qui pénètrent dans le béton et attaquent localement la couche protectrice de l'acier, initiant une corrosion très agressive.. Cet exercice se concentre sur l'évaluation du risque de corrosion pour une structure exposée à ces deux agressions.

Remarque Pédagogique : Cet exercice vous permettra d'appliquer les modèles de prédiction de durabilité issus des normes (comme l'Eurocode) pour quantifier les risques et comprendre l'importance des paramètres de formulation du béton et de conception de l'ouvrage (comme l'enrobage).


Objectifs Pédagogiques

  • Comprendre les mécanismes physico-chimiques de la carbonatation et de la pénétration des chlorures.
  • Appliquer les formules de base pour prédire la profondeur de carbonatation et la concentration en chlorures.
  • Évaluer le risque de déclenchement de la corrosion en comparant les résultats aux seuils normatifs.
  • Identifier les paramètres clés influençant la durabilité du béton armé.

Données de l'étude

On étudie une dalle en béton armé d'un parking extérieur situé en bord de mer, soumis à la fois au dioxyde de carbone de l'air et aux embruns marins. On souhaite évaluer sa durabilité à un horizon de 50 ans.

Fiche Technique de l'Ouvrage
Coupe transversale de la dalle en béton armé
Surface exposée (air + chlorures) Armatures Enrobage (c) Épaisseur (h)
Caractéristique Symbole Valeur Unité
Classe d'exposition (Carbonatation)\(\text{XC4}\)--
Classe d'exposition (Chlorures marins)\(\text{XS1}\)--
Enrobage nominal des armatures\(c_{\text{nom}}\)40\(\text{mm}\)
Coefficient de carbonatation\(k_c\)4\(\text{mm}/\text{an}^{0.5}\)
Concentration en chlorures en surface\(C_{\text{s}}\)0.8\(\text{% masse ciment}\)
Coefficient de diffusion apparent des chlorures\(D_{\text{app}}\)\(5 \times 10^{-12}\)\(\text{m}^2/\text{s}\)
Seuil critique de chlorures pour la corrosion\(C_{\text{crit}}\)0.4\(\text{% masse ciment}\)

Questions à traiter

  1. Calculer la profondeur de carbonatation \(x_c\) après 50 ans.
  2. L'enrobage est-il suffisant pour protéger les armatures de la corrosion par carbonatation à 50 ans ? Justifiez.
  3. Calculer la concentration en ions chlorures \(C(x,t)\) à la profondeur des armatures après 50 ans.
  4. Comparer la concentration calculée au seuil critique \(C_{\text{crit}}\) et conclure sur le risque de corrosion par les chlorures.
  5. Si un risque est avéré, quelle modification simple de conception aurait pu le prévenir ?

Les bases sur la Durabilité du Béton

La protection des armatures dans le béton repose sur une double barrière : une barrière physique (l'enrobage) et une barrière chimique (la passivation).

1. Passivation des aciers et pH du béton
Le ciment hydraté contient de la portlandite, \(\text{Ca(OH)}_2\), qui confère au béton un pH très élevé (environ 13). Dans ce milieu fortement basique, une couche protectrice stable et invisible, appelée film de passivation, se forme à la surface de l'acier et le protège de la corrosion.

2. Corrosion par Carbonatation
Le dioxyde de carbone (\(\text{CO}_2\)) de l'atmosphère pénètre dans le béton et réagit avec la portlandite. Cette réaction, la carbonatation, consomme l'alcalinité du béton et abaisse son pH. Lorsque le front de carbonatation atteint l'armature, le pH chute en dessous de 9, le film de passivation est détruit, et la corrosion peut commencer. La profondeur de carbonatation \(x_c\) est souvent modélisée par une loi en racine carrée du temps : \[ x_c(t) = k_c \cdot \sqrt{t} \] Où \(k_c\) est le coefficient de carbonatation (en \(\text{mm}/\text{an}^{0.5}\)) et \(t\) le temps (en années).

3. Corrosion par Pénétration de Chlorures
Les ions chlorures (\(\text{Cl}^−\)), présents dans l'air marin ou les sels de déverglaçage, pénètrent dans le béton par diffusion. Contrairement à la carbonatation, les chlorures n'ont pas besoin d'abaisser le pH global. Ils rompent localement le film de passivation, créant une corrosion par piqûres, très agressive. La concentration en chlorures \(C(x,t)\) à une profondeur \(x\) et un temps \(t\) peut être estimée par la solution de la 2ème loi de Fick : \[ C(x,t) = C_{\text{s}} \cdot \left( 1 - \text{erf}\left( \frac{x}{2\sqrt{D_{\text{app}} \cdot t}} \right) \right) \] Où \(C_{\text{s}}\) est la concentration en surface, \(D_{\text{app}}\) le coefficient de diffusion, et 'erf' la fonction d'erreur.


Correction : Analyse des Causes de la Corrosion des Armatures

Question 1 : Calculer la profondeur de carbonatation \(x_c\) après 50 ans.

Principe

L'objectif est d'utiliser le modèle simplifié en racine du temps pour estimer la progression du front de carbonatation (la zone où le pH a chuté) à travers l'enrobage du béton sur une période de 50 ans.

Mini-Cours

La carbonatation est un phénomène de diffusion-réaction. Le \(\text{CO}_2\) gazeux de l'air se dissout dans l'eau des pores du béton, puis réagit avec les alcalis, principalement la portlandite (\(\text{Ca(OH)}_2\)), pour former du carbonate de calcium (\(\text{CaCO}_3\)). Ce processus est plus rapide lorsque l'humidité relative est intermédiaire (entre 50% et 70%), car elle permet à la fois la dissolution du \(\text{CO}_2\) et sa diffusion à l'état gazeux.

Remarque Pédagogique

Le modèle en \(\sqrt{t}\) est une simplification très courante et efficace. Il traduit l'idée qu'au fur et à mesure que le front de carbonatation avance, le chemin à parcourir pour le \(\text{CO}_2\) est de plus en plus long, ce qui ralentit le processus. La vitesse de carbonatation n'est donc pas constante, elle diminue avec le temps.

Normes

Ce type de modèle de durabilité est à la base des vérifications prévues dans les normes de conception des structures en béton, comme l'Eurocode 2 (NF EN 1992-1-1), notamment dans ses annexes informatives qui traitent de la durabilité.

Formule(s)

La formule de base pour la profondeur de carbonatation est utilisée.

\[ x_c(t) = k_c \cdot \sqrt{t} \]
Hypothèses

Pour appliquer ce modèle simple, on fait les hypothèses suivantes :

  • Les conditions environnementales (température, humidité, concentration en \(\text{CO}_2\)) sont constantes sur 50 ans.
  • Le béton est de qualité homogène et non-fissuré.
  • Le coefficient \(k_c\) représente correctement la qualité du béton et l'agressivité de l'environnement.
Donnée(s)

On extrait les données nécessaires de l'énoncé de l'exercice.

ParamètreSymboleValeurUnité
Coefficient de carbonatation\(k_c\)4\(\text{mm}/\text{an}^{0.5}\)
Temps\(t\)50\(\text{ans}\)
Astuces

Pour une estimation rapide, on peut utiliser des carrés parfaits proches. Par exemple, \(\sqrt{50}\) est très proche de \(\sqrt{49} = 7\). Le résultat sera donc légèrement supérieur à \(4 \times 7 = 28\) mm.

Schéma (Avant les calculs)
État initial (t=0)
Surface exposéeArmaturec = 40mm
Calcul(s)

Calcul de la profondeur de carbonatation

\[ \begin{aligned} x_c(50 \text{ ans}) &= 4 \frac{\text{mm}}{\sqrt{\text{an}}} \cdot \sqrt{50 \text{ ans}} \\ &= 4 \cdot 7.071 \\ &= 28.284 \text{ mm} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
État à 50 ans
Front de carbonatationc = 40mmxc ~ 28.3mm
Réflexions

Le résultat de 28.3 mm nous donne une mesure quantitative de la dégradation potentielle. Ce n'est pas encore un diagnostic, mais une donnée essentielle que nous allons devoir comparer à la position de l'acier pour évaluer le risque réel.

Points de vigilance

La principale source d'erreur dans ce calcul est le choix du coefficient \(k_c\). C'est une valeur empirique qui dépend fortement de la qualité du béton (type de ciment, rapport E/C) et de la sévérité de l'environnement. Une mauvaise estimation de \(k_c\) peut mener à des prédictions erronées.

Points à retenir

La progression de la carbonatation n'est pas linéaire, elle ralentit avec le temps. La formule \(x_c = k_c \sqrt{t}\) est le modèle de base pour toute évaluation de ce phénomène.

Le saviez-vous ?

La carbonatation n'est pas toujours négative ! Elle augmente la compacité et la résistance superficielle du béton. Le problème ne se pose que lorsqu'elle atteint les armatures en acier.

FAQ

Cette formule est-elle toujours valable ?

C'est un modèle simplifié. Pour des analyses plus fines, des modèles numériques plus complexes existent, prenant en compte les variations d'humidité, la fissuration, etc. Cependant, pour une première évaluation et des vérifications normatives, ce modèle est largement utilisé.

Résultat Final
La profondeur de carbonatation estimée après 50 ans est de 28.3 mm.
A vous de jouer

Quelle serait la profondeur de carbonatation après 100 ans avec le même coefficient ?

Question 2 : L'enrobage est-il suffisant pour protéger les armatures de la corrosion par carbonatation à 50 ans ?

Principe

Le concept est simple : l'enrobage agit comme une barrière physique. On vérifie si cette barrière est assez épaisse pour ne pas être "traversée" par le front de carbonatation pendant la durée de vie visée de l'ouvrage (ici, 50 ans).

Mini-Cours

La définition d'un enrobage adéquat est un pilier de la conception durable des ouvrages en béton armé. L'enrobage minimal est défini par les normes en fonction des classes d'exposition (qui décrivent l'agressivité de l'environnement) et de la durée de vie de la structure. Il doit être suffisant pour protéger l'acier contre la corrosion, mais aussi pour assurer une bonne adhérence entre le béton et l'acier et protéger ce dernier du feu.

Remarque Pédagogique

Pensez à la corrosion comme une course contre la montre. Les agents agressifs (le \(\text{CO}_2\) ici) partent de la surface et avancent dans le béton. L'armature est la "ligne d'arrivée". Le but du concepteur est de s'assurer que, à la fin de la durée de vie de l'ouvrage, les "coureurs" n'ont pas encore atteint la ligne d'arrivée.

Normes

La vérification \(x_c(t) < c_{\text{nom}}\) est une application directe de l'approche performantielle de la durabilité, encouragée par les normes modernes comme l'Eurocode 2. On ne se contente pas de respecter une valeur d'enrobage minimale, on vérifie que cette valeur est performante face à un processus de dégradation modélisé.

Formule(s)

Il ne s'agit pas d'une formule de calcul mais d'un critère de vérification.

\[ \text{Condition de sécurité : } x_c(t) < c_{\text{nom}} \]
Hypothèses

On suppose que l'enrobage nominal \(c_{\text{nom}}\) est respecté sur tout l'ouvrage. En réalité, il y a des tolérances d'exécution, et on devrait vérifier avec l'enrobage minimal \(c_{\text{min}} = c_{\text{nom}} - \Delta c_{\text{dev}}\), où \(\Delta c_{\text{dev}}\) est la marge pour écarts d'exécution (souvent 10 mm).

Donnée(s)
ParamètreSymboleValeurUnité
Profondeur de carbonatation à 50 ans\(x_c(50)\)28.3mm
Enrobage nominal\(c_{\text{nom}}\)40mm
Astuces

Il est utile de calculer une marge de sécurité : \( \text{Marge} = c_{\text{nom}} - x_c(t)\). Une marge importante est un signe de bonne durabilité. Une marge faible, même si elle est positive, doit alerter sur les risques liés aux défauts d'exécution.

Schéma (Avant les calculs)
Comparaison de la progression du front de carbonatation et de l'enrobage
Front de carbonatationc = 40mmxc ~ 28.3mm
Calcul(s)

Comparaison

\[ 28.3 \text{ mm} < 40 \text{ mm} \Rightarrow \text{Condition Vérifiée} \]

Calcul de la marge de sécurité

\[ 40 \text{ mm} - 28.3 \text{ mm} = 11.7 \text{ mm} \]
Schéma (Après les calculs)
Visualisation de la marge de sécurité
Front (xc=28.3mm)Marge = 11.7mm
Réflexions

La condition est respectée, ce qui est positif. Cependant, la marge de 11.7 mm n'est pas immense. Compte tenu de la tolérance d'exécution de 10 mm, l'enrobage réel pourrait localement n'être que de 30 mm. Dans ce cas, la marge de sécurité ne serait que de 1.7 mm, ce qui est très faible. Le diagnostic est donc "satisfaisant, mais avec une vigilance requise sur la qualité de l'exécution".

Points de vigilance

Ne jamais oublier les tolérances d'exécution ! Un calcul basé sur l'enrobage nominal peut être optimiste. Les normes imposent des vérifications avec l'enrobage minimal pour cette raison.

Points à retenir

La durabilité se vérifie en comparant la progression d'un agent agressif (\(x_c\)) avec l'épaisseur de la barrière de protection (\(c_{\text{nom}}\)). L'objectif est que la barrière "tienne" plus longtemps que la durée de vie de service de l'ouvrage.

Le saviez-vous ?

Des techniques non destructives, comme le test à la phénolphtaléine, permettent de mesurer la profondeur de carbonatation sur un ouvrage existant. Un échantillon de béton est prélevé et pulvérisé avec cet indicateur de pH, qui devient rose fuchsia dans les zones non carbonatées (pH > 9) et reste incolore dans les zones carbonatées.

FAQ

Et si la condition n'était pas vérifiée ?

Si \(x_c(t) > c_{\text{nom}}\), cela ne signifie pas que la structure va s'effondrer, mais que le processus de corrosion est initié. Une phase de propagation de la corrosion commence alors, qui mènera éventuellement à des dégradations visibles (fissuration, épaufrures). Des réparations seraient à prévoir.

Résultat Final
Oui, l'enrobage de 40 mm est suffisant pour protéger les armatures contre la corrosion initiée par la carbonatation à l'échéance de 50 ans, car la profondeur carbonatée (28.3 mm) est inférieure à l'enrobage.
A vous de jouer

Si, à cause des défauts d'exécution, l'enrobage réel est de 30 mm, la protection à 50 ans est-elle toujours assurée ? (Oui/Non)

Question 3 : Calculer la concentration en ions chlorures \(C(x,t)\) à la profondeur des armatures après 50 ans.

Principe

On modélise la pénétration des chlorures comme un processus de diffusion, où les ions se déplacent des zones de haute concentration (la surface) vers les zones de basse concentration (l'intérieur du béton). On utilise une solution mathématique de ce phénomène (la loi de Fick) pour prédire la concentration à un point donné (\(x=c_{\text{nom}}\)) et à un instant donné (\(t=50\) ans).

Mini-Cours

La deuxième loi de Fick est une équation différentielle qui décrit comment la diffusion provoque un changement de concentration dans le temps. Sa solution pour un milieu semi-infini (comme une dalle exposée sur une seule face) avec une concentration en surface constante (\(C_{\text{s}}\)) fait intervenir la fonction d'erreur "erf". Cette fonction mathématique est très courante dans les problèmes de diffusion (thermique, massique).

Remarque Pédagogique

Ne soyez pas effrayé par la complexité apparente de la formule. L'important est de comprendre son sens physique : la concentration \(C(x,t)\) sera d'autant plus grande que la concentration en surface \(C_{\text{s}}\) est élevée, que le temps \(t\) est long, et que le béton est "perméable" (grand \(D_{\text{app}}\)). Elle sera d'autant plus faible que la profondeur \(x\) est grande.

Normes

Ce modèle de diffusion est également recommandé par des guides et normes, comme le Modèle DuraCrete ou les approches du fib Model Code for Service Life Design, qui sont des références internationales pour l'ingénierie de la durabilité.

Formule(s)

2ème loi de Fick (solution simplifiée)

\[ C(x,t) = C_{\text{s}} \cdot \left( 1 - \text{erf}\left( \frac{x}{2\sqrt{D_{\text{app}} \cdot t}} \right) \right) \]
Hypothèses

On suppose que :

  • La concentration en surface \(C_{\text{s}}\) reste constante au fil du temps.
  • Le coefficient de diffusion \(D_{\text{app}}\) est constant, alors qu'en réalité il diminue avec la maturation du béton.
  • Le transport se fait uniquement par diffusion (on néglige d'autres mécanismes comme la capillarité).
Donnée(s) & Conversion d'unités

Il est crucial d'utiliser un système d'unités cohérent (SI : mètres, secondes). On convertit donc toutes les données.

ParamètreSymboleValeur InitialeValeur en SI
Profondeur (enrobage)\(x\)40 mm0.04 m
Temps\(t\)50 ans\(50 \times 365.25 \times 24 \times 3600 \approx 1.578 \times 10^9\) s
Coefficient de diffusion\(D_{\text{app}}\)\(5 \times 10^{-12}\) m²/s\(5 \times 10^{-12}\) m²/s
Concentration en surface\(C_{\text{s}}\)0.8 %0.8 %
Astuces

Le calcul du terme \(\frac{x}{2\sqrt{D_{\text{app}} \cdot t}}\) est la partie la plus délicate. Faites-le en premier, sans erreur de parenthèses sur votre calculatrice. La fonction "erf" est souvent disponible sur les logiciels de calcul ou peut être trouvée dans des tables.

Schéma (Avant les calculs)
Profil de chlorures à t=0
Concentration en Cl-ProfondeurCs
Calcul(s)

Calcul du terme dans la fonction d'erreur

\[ \begin{aligned} \frac{x}{2\sqrt{D_{\text{app}} \cdot t}} &= \frac{0.04 \text{ m}}{2\sqrt{(5 \times 10^{-12} \text{ m}^2/\text{s}) \cdot (1.578 \times 10^9 \text{ s})}} \\ &= \frac{0.04}{2\sqrt{7.89 \times 10^{-3}}} \\ &= \frac{0.04}{0.1776} \\ &\approx 0.225 \end{aligned} \]

On cherche ensuite la valeur de erf(0.225). On peut utiliser une table ou un calculateur : erf(0.225) \(\approx\) 0.249.

Calcul de la concentration

\[ \begin{aligned} C(x,t) &= C_{\text{s}} \cdot (1 - \text{erf}(0.225)) \\ &= 0.8 \cdot (1 - 0.249) \\ &= 0.8 \cdot 0.751 \\ &\approx 0.60 \text{ \%} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Profil de chlorures à t=50 ans
Concentration en Cl-Profondeurcnom0.6%
Réflexions

Le calcul montre qu'après 50 ans, les chlorures ont non seulement atteint les armatures, mais leur concentration y est significative (0.60%). Cette valeur est même assez proche de la concentration en surface (0.8%), ce qui indique une diffusion relativement rapide dans ce type de béton.

Points de vigilance

Les conversions d'unités sont le piège principal. Le temps doit impérativement être en secondes si le coefficient de diffusion est en m²/s. Une erreur ici fausserait complètement le résultat.

Points à retenir

La pénétration des chlorures est modélisée par la 2ème loi de Fick. Le calcul nécessite de maîtriser les unités et l'utilisation de la fonction d'erreur "erf".

Le saviez-vous ?

Certains ciments, comme les ciments au laitier de haut-fourneau (CEM III), offrent une bien meilleure résistance à la pénétration des chlorures car leur structure de pores hydratée est beaucoup plus fine, ce qui diminue le coefficient de diffusion \(D_{\text{app}}\).

FAQ

Qu'est-ce que la fonction d'erreur "erf" ?

C'est une fonction mathématique liée à la loi normale (courbe de Gauss). Elle est définie par une intégrale et vaut 0 pour x=0, et tend vers 1 lorsque x devient grand. Elle représente la probabilité qu'une variable aléatoire normale centrée réduite se trouve dans l'intervalle [-x, x].

Résultat Final
La concentration en chlorures à la profondeur des armatures après 50 ans est d'environ 0.60 % de la masse de ciment.
A vous de jouer

Avec les mêmes données, quelle serait la concentration à une profondeur de 20 mm seulement ?

Question 4 : Comparer la concentration calculée au seuil critique \(C_{\text{crit}}\) et conclure sur le risque de corrosion.

Principe

Le risque de corrosion par les chlorures est considéré comme avéré lorsque la concentration en ions à la surface de l'acier dépasse une valeur seuil, dite critique, qui dépend de nombreux paramètres mais est souvent fixée par les normes.

Mini-Cours

Le seuil critique de chlorures n'est pas une constante universelle. Il dépend du type de ciment, du potentiel de l'acier, et de la présence d'oxygène. Cependant, les normes fixent des valeurs conservatives pour la conception. La valeur de 0.4% par rapport à la masse de ciment est une valeur communément acceptée pour les ouvrages en béton armé en ambiance marine.

Remarque Pédagogique

C'est l'étape du diagnostic. Jusqu'ici, nous avons fait des calculs pour obtenir des valeurs. Maintenant, nous les comparons à des valeurs de référence (les seuils) pour prendre une décision d'ingénieur : "Y a-t-il un problème ?" ou "La situation est-elle sûre ?".

Normes

La notion de seuil critique est fondamentale dans toutes les approches normatives de la durabilité, que ce soit pour la corrosion, la fatigue ou d'autres mécanismes de dégradation. On compare toujours une "sollicitation" (la concentration calculée) à une "résistance" (le seuil critique).

Formule(s)

Il s'agit d'un critère de vérification.

\[ \text{Risque si : } C(x,t) > C_{\text{crit}} \]
Hypothèses

On suppose que la valeur de \(C_{\text{crit}}\) de 0.4% donnée dans l'énoncé est pertinente pour le type de ciment et d'acier utilisé dans la structure.

Donnée(s)
ParamètreSymboleValeurUnité
Concentration calculée à 50 ans\(C(x,t)\)0.60% masse ciment
Seuil critique\(C_{\text{crit}}\)0.4% masse ciment
Astuces

Pas d'astuce de calcul ici, mais une astuce de raisonnement : si le risque est avéré pour la corrosion par les chlorures, il n'est presque plus nécessaire de se préoccuper de la carbonatation. La corrosion par piqûres est généralement plus rapide et plus dangereuse que la corrosion généralisée due à la carbonatation.

Schéma (Avant les calculs)
Profil de chlorures et seuil critique
Concentration en Cl-ProfondeurCcritcnom
Calcul(s)

Comparaison au seuil

\[ 0.60 \text{ \%} > 0.4 \text{ \%} \Rightarrow \text{Seuil Dépassé} \]
Schéma (Après les calculs)
Comparaison au Seuil Critique
Concentration en Cl-ProfondeurCcritcnomDépassement !
Réflexions

La concentration en chlorures à la profondeur des armatures dépasse le seuil critique. Même si le béton n'est pas encore carbonaté à ce niveau, le film de passivation est susceptible d'être rompu par les ions chlorures, initiant une corrosion par piqûres. Le risque est donc avéré et sérieux.

Points de vigilance

Une conclusion binaire (risque / pas de risque) est une simplification. En réalité, il y a une probabilité de corrosion. Un calcul plus avancé (probabiliste) donnerait un pourcentage de risque plutôt qu'une réponse par oui/non.

Points à retenir

Le diagnostic de durabilité repose sur la comparaison entre une valeur calculée (qui représente l'agression) et une valeur seuil (qui représente la résistance du système). Si l'agression dépasse la résistance, le risque est avéré.

Le saviez-vous ?

La corrosion par piqûres est particulièrement vicieuse car elle peut mener à une réduction très rapide de la section d'une barre d'acier en un point très localisé, sans signes extérieurs visibles évidents, ce qui peut mener à une rupture fragile et soudaine de l'armature.

FAQ

La corrosion va-t-elle commencer exactement au moment où le seuil est dépassé ?

Pas forcément. Le dépassement du seuil signifie que les conditions thermodynamiques pour la corrosion sont réunies. Le démarrage effectif de la corrosion (la cinétique) dépend aussi d'autres facteurs comme la présence suffisante d'oxygène et d'eau au niveau de l'armature.

Résultat Final
Le seuil critique est dépassé. Il existe un risque élevé de déclenchement de la corrosion des armatures par les ions chlorures avant 50 ans.
A vous de jouer

Si le seuil critique était de 0.7%, le risque à 50 ans serait-il toujours avéré ? (Oui/Non)

Question 5 : Si un risque est avéré, quelle modification simple de conception aurait pu le prévenir ?

Principe

Pour prévenir la corrosion, on peut agir sur plusieurs leviers qui apparaissent dans la formule de Fick : on peut augmenter la "distance à parcourir" \(x\) (l'enrobage), ou on peut ralentir le "coureur" en diminuant le coefficient de diffusion \(D_{\text{app}}\) (améliorer la qualité du béton).

Mini-Cours

L'ingénierie de la durabilité consiste précisément à jouer sur ces paramètres en phase de conception pour garantir que la structure atteigne sa durée de vie de service sans dégradations majeures. Cela implique de choisir :
- Un enrobage adapté à la classe d'exposition.
- Une formulation de béton adéquate (choix du ciment, rapport Eau/Ciment bas) pour obtenir une faible perméabilité et donc un faible \(D_{\text{app}}\).
- Des dispositions constructives soignées pour garantir la qualité de l'exécution.

Remarque Pédagogique

En phase de conception, augmenter l'enrobage est souvent la solution la plus simple et la plus économique pour améliorer significativement la durabilité d'un ouvrage. Un centimètre d'enrobage en plus peut parfois ajouter des décennies à la durée de vie sans corrosion !

Normes

Les normes, comme l'Eurocode 2, proposent une approche dite "préscriptive" ou "deemed-to-satisfy" : pour chaque classe d'exposition, elles imposent un enrobage minimal et des qualités de béton (résistance, rapport E/C max) qui sont réputées satisfaire aux exigences de durabilité pour une durée de vie de 50 ans. L'exercice que nous faisons correspond à l'approche "performantielle", où l'on vérifie par le calcul.

Formule(s)

On reprend la formule de Fick, mais cette fois l'inconnue est l'enrobage \(x\). On fixe \(C(x,t) = C_{\text{crit}}\) et on résout pour \(x\).

Hypothèses

On suppose que les autres paramètres (qualité du béton, environnement) restent les mêmes et que l'on ne peut jouer que sur le paramètre géométrique de l'enrobage.

Donnée(s)

On cherche \(x\) pour que \(C(x, 50 \text{ ans}) = 0.4\%\). Les autres données sont inchangées.

Astuces

Le calcul inverse peut être complexe. On peut aussi procéder par itérations : tester une valeur d'enrobage supérieure (ex: 50 mm), recalculer \(C(x,t)\) et voir si on passe en dessous du seuil.

Schéma (Avant les calculs)
Augmentation de l'enrobage
Surface exposéeArmaturec' > 40mm
Calcul(s)

Résolution de l'équation pour trouver Z

\[ \begin{aligned} 0.4 &= 0.8 \cdot (1 - \text{erf}(Z)) \\ \frac{0.4}{0.8} &= 1 - \text{erf}(Z) \\ 0.5 &= 1 - \text{erf}(Z) \\ \text{erf}(Z) &= 1 - 0.5 \\ \text{erf}(Z) &= 0.5 \end{aligned} \]

À l'aide d'une table, on trouve que pour erf(Z)=0.5, Z est approximativement 0.477.

Calcul de l'enrobage requis \(x\)

\[ \begin{aligned} x &= Z \cdot (2\sqrt{D_{\text{app}} \cdot t}) \\ &= 0.477 \cdot (2\sqrt{(5 \times 10^{-12}) \cdot (1.578 \times 10^9)}) \\ &= 0.477 \cdot (0.1776 \text{ m}) \\ &= 0.0847 \text{ m} \\ &\Rightarrow x \approx 85 \text{ mm} \end{aligned} \]
Schéma (Après les calculs)
Enrobage requis pour la durabilité
Surface exposéeArmaturec_requis ≈ 85mm
Réflexions

Un enrobage d'au moins 50 mm (valeur standard supérieure) aurait probablement été un meilleur choix pour cette classe d'exposition, mais le calcul montre qu'un enrobage de près de 85 mm aurait été idéal pour atteindre la limite à 50 ans. Cela montre que pour cet environnement très agressif, l'enrobage de 40 mm était clairement sous-dimensionné.

Points de vigilance

Augmenter l'enrobage n'est pas toujours possible ou souhaitable (poids de la structure, contrôle de la fissuration). C'est pourquoi agir sur la qualité du béton (diminuer \(D_{\text{app}}\)) est une solution complémentaire et souvent nécessaire.

Points à retenir
  • La durabilité se conçoit en amont du projet.
  • Les deux principaux leviers d'action sont l'enrobage (barrière physique) et la qualité du béton (barrière microstructurale).
Le saviez-vous ?

Pour des structures exceptionnelles ou très exposées (piles de ponts en mer, par exemple), on peut utiliser des armatures en acier inoxydable, beaucoup plus résistantes à la corrosion par les chlorures, ou même des armatures en matériaux composites (fibres de verre ou de carbone) qui ne se corrodent pas du tout.

FAQ

Est-ce la seule solution ?

Non. On aurait pu aussi choisir un béton plus performant (avec un \(D_{\text{app}}\) plus faible), utiliser des inhibiteurs de corrosion dans le mélange de béton, ou appliquer un revêtement de protection sur la surface du béton.

Résultat Final
Une augmentation de l'enrobage nominal des armatures (par exemple à 50 mm ou plus, idéalement vers 85 mm) aurait retardé significativement la pénétration des chlorures. Une autre option serait d'utiliser un béton de plus haute performance avec un coefficient de diffusion plus faible.
A vous de jouer

Si on utilise un béton de haute performance avec \(D_{\text{app}} = 1 \times 10^{-12}\) m²/s, quel serait le temps avant corrosion pour un enrobage de 40mm ?


Outil Interactif : Simulateur de Durabilité

Utilisez cet outil pour visualiser l'influence de l'enrobage et de l'agressivité de l'environnement (concentration en surface) sur le temps avant le début de la corrosion par les chlorures.

Paramètres d'Entrée
40 mm
0.8 %
Résultats Clés
Temps avant début de corrosion (années) -
Risque à 50 ans -

Quiz Final : Testez vos connaissances

1. Quel est le rôle principal du pH élevé (alcalinité) du béton pour les armatures en acier ?

2. La carbonatation du béton est une réaction chimique entre la portlandite (\(\text{Ca(OH)}_2\)) et...

3. Quel est le principal danger des ions chlorures pour les armatures, même dans un béton non carbonaté ?

4. La profondeur de carbonatation dans le béton évolue généralement de manière proportionnelle à :

5. En phase de conception, quelle est la mesure la plus directe pour augmenter la durée avant le début de la corrosion ?


Glossaire

Carbonatation
Processus chimique où le dioxyde de carbone (\(\text{CO}_2\)) de l'air pénètre dans le béton et réagit avec l'hydroxyde de calcium (\(\text{Ca(OH)}_2\)), abaissant le pH du matériau. Cette baisse d'alcalinité détruit la couche de passivation protégeant les aciers.
Chlorures (Ions)
Ions, souvent issus des sels de déverglaçage ou de l'air marin, qui pénètrent dans le béton. Au-delà d'une concentration critique, ils rompent localement la couche de passivation de l'acier, même à pH élevé, et initient une corrosion par piqûres, très agressive.
Enrobage
Épaisseur de béton recouvrant l'armature la plus proche de la surface. Il constitue une barrière physique contre la pénétration des agents agressifs (\(\text{CO}_2\), chlorures, eau, oxygène).
Passivation
Formation d'une fine couche protectrice d'oxydes (film passif) à la surface de l'acier, stable dans le milieu très alcalin (pH > 12.5) du béton sain. Ce film empêche le processus de corrosion de démarrer.
Exercice : Analyse de la Corrosion des Armatures

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