Vérification de la Compatibilité Chimique (Sulfates)

Vérification Compatibilité Mortier (Sulfates)

Vérification de la Compatibilité Chimique (Sulfates) d'un Mortier de Réparation

Contexte : Le risque d'attaque sulfatiqueDégradation chimique du béton ou mortier due aux ions sulfates, provoquant expansion et fissuration..

Cet exercice porte sur la réparation structurelle d'une longrine de fondation en béton armé, située dans un environnement industriel où le sol est connu pour être agressif. Une analyse du sol révèle une contamination par les sulfates. Le choix du mortier de réparation est donc critique pour garantir la durabilité de l'intervention et éviter une dégradation accélérée par la formation d'ettringite secondaireFormation cristalline expansive qui se produit lorsque les ions sulfates pénètrent dans un béton ou mortier durci et réagissent avec les aluminates (C₃A)..

Remarque Pédagogique : Cet exercice vous apprendra à analyser la compatibilité entre un support existant (contaminé) et un produit de réparation, en vous basant sur les classes d'exposition de la norme EN 206 et les fiches techniques des mortiers (EN 1504).


Objectifs Pédagogiques

  • Identifier les classes d'exposition aux sulfates (XA) selon la norme EN 206.
  • Comprendre le mécanisme de l'attaque sulfatique et le rôle du C₃A.
  • Valider le choix d'un mortier de réparation (R4) en fonction de sa résistance aux sulfates.

Données de l'étude

Nous devons spécifier un mortier pour la réparation d'une semelle de fondation en béton C30/37.

Fiche Technique de la Situation
Caractéristique Valeur
Élément à réparer Semelle de fondation (Béton C30/37)
Analyse du sol (Teneur en SO₄²⁻) 2500 mg/kg (ppm)
Mortier de réparation envisagé Mortier R4 (EN 1504-3) - Fiche technique : "Haute résistance aux sulfates (PM/SR)"
Modélisation du Contact Sol/Fondation
SOL (Teneur SO₄²⁻ = 2500 mg/kg) Fondation (Béton C30/37) Zone à réparer SO₄²⁻
Classe XA (EN 206) Description Agressivité Teneur SO₄²⁻ (Sol, mg/kg) Teneur SO₄²⁻ (Eau, mg/l)
XA1 Faiblement agressif 200 à 600 200 à 300
XA2 Moyennement agressif > 600 à 3000 > 300 à 700
XA3 Fortement agressif > 3000 à 6000 > 700 à 1500

Questions à traiter

  1. Déterminer la classe d'exposition chimique (XA) pour le support en béton, en se basant sur l'analyse du sol.
  2. Quelle est la principale exigence chimique pour un mortier de réparation appliqué dans cette classe d'exposition ?
  3. Le mortier R4 envisagé ("Haute résistance aux sulfates (PM/SR)") est-il compatible avec la situation ?
  4. Expliquer le risque pathologique si un mortier R4 standard (non-SR) est utilisé.
  5. Quelles sont les deux précautions de préparation du support essentielles pour garantir l'adhérence et la durabilité de la réparation ?

Les bases sur les Attaques Sulfatiques

Les sulfates, présents dans les sols ou les eaux (industrielles, marines), peuvent réagir avec le ciment durci. Cette réaction, si elle n'est pas contrôlée par le choix d'un ciment adapté, mène à la ruine de l'ouvrage.

1. Le "carburant" : l'Aluminate Tricalcique (C₃A)
Le ciment Portland standard contient de l'Aluminate Tricalcique (C₃A)L'une des quatre phases principales du clinker (le "cœur" du ciment). Il est responsable de la prise rapide mais est très réactif aux sulfates.. C'est le composant qui réagit préférentiellement avec les ions sulfates (SO₄²⁻) pour former l'ettringite.

2. La réaction d'expansion : l'Ettringite Secondaire
La formation de cette ettringiteComposé chimique (sulfoaluminate de calcium hydraté) qui se forme lorsque les ions sulfates réagissent avec les aluminates (C₃A) du ciment. Sa formation après la prise du béton provoque un gonflement et des fissures. (dite "secondaire" car elle se forme après la prise) s'accompagne d'une augmentation de volume très importante, créant des contraintes internes qui fissurent le matériau. \[ C_3A + 3(CaSO_4 \cdot 2H_2O) + 26H_2O \rightarrow C_3A \cdot 3CaSO_4 \cdot 32H_2O \] \[ (\text{Aluminate}) + (\text{Gypse/Sulfates}) + (\text{Eau}) \rightarrow (\text{Ettringite - Volume } \times \sim 2.2) \]


Correction : Vérification de la Compatibilité Chimique (Sulfates) d'un Mortier

Question 1 : Déterminer la classe d'exposition chimique (XA)

Principe

Pour déterminer la classe d'exposition, il suffit de comparer la valeur d'analyse du sol (donnée de l'énoncé) avec les seuils définis par la norme EN 206 (tableau fourni dans l'énoncé).

Mini-Cours

Qu'est-ce qu'une classe d'exposition ?
La norme EN 206 (Bétons) classe les environnements auxquels un béton peut être exposé. Ces classes décrivent la nature de l'agression (corrosion par carbonatation, gel/dégel, attaques chimiques...).
La classe XA (Chemical Attack) concerne spécifiquement l'agression par les sulfates, qui est l'une des plus sévères pour le béton.

Remarque Pédagogique

Pensez à cette étape comme à un diagnostic médical. Avant de prescrire un traitement (le mortier de réparation), il faut identifier précisément la "maladie" (l'agressivité de l'environnement). Une erreur de diagnostic ici (choisir XA1 au lieu de XA2) entraîne un mauvais traitement et une rechute assurée (la dégradation de la réparation).

Normes

La norme EN 206, dans son Tableau 2 (relatif aux classes d'exposition pour agression chimique), définit les classes XA1, XA2 et XA3 en fonction de la teneur en ions sulfates (SO₄²⁻) dans le sol ou dans l'eau.

Formule(s)

Il ne s'agit pas de formules mathématiques, mais de critères de seuils (pour les sols) :

Critère XA1 (Faible)

\[ 200 \le \text{SO}_4^{2-} \le 600 \text{ (mg/kg)} \]

Critère XA2 (Modérée)

\[ 600 < \text{SO}_4^{2-} \le 3000 \text{ (mg/kg)} \]

Critère XA3 (Forte)

\[ 3000 < \text{SO}_4^{2-} \le 6000 \text{ (mg/kg)} \]
Hypothèses

Pour cette étude, nous posons les hypothèses suivantes :

  • L'analyse de sol est fiable et l'échantillon prélevé est représentatif de l'agressivité moyenne du site.
  • L'environnement chimique ne contient pas d'autres agents agressifs (ex: acides forts) qui primeraient sur l'attaque sulfatique.
Donnée(s)

Nous avons les données suivantes pour notre analyse :

ParamètreSymboleValeurUnité
Teneur en sulfates (sol)SO₄²⁻2500mg/kg
Astuces

Attention à ne pas confondre les limites pour le sol (en mg/kg) et pour l'eau (en mg/l). Les seuils sont différents ! Nous travaillons ici avec une analyse de sol.

Schéma (Avant les calculs)

Visualisation du positionnement de la valeur par rapport aux seuils XA pour le sol.

Échelle d'Agressivité (Sulfates Sol mg/kg)
0 600 3000 6000 XA1 XA2 XA3 2500
Calcul(s)

Il ne s'agit pas d'un calcul complexe mais d'une simple comparaison :

Étape 1 : Rappel des seuils (Sol)

  • XA1 : 200 à 600 mg/kg
  • XA2 : > 600 à 3000 mg/kg
  • XA3 : > 3000 à 6000 mg/kg

Étape 2 : Positionnement de notre valeur

Notre valeur est 2500 mg/kg.

\[ 600 \text{ mg/kg} < \mathbf{2500 \text{ mg/kg}} < 3000 \text{ mg/kg} \]
Réflexions

La valeur de 2500 mg/kg se situe clairement dans l'intervalle de la classe XA2. L'environnement est donc considéré comme "moyennement agressif" du point de vue des sulfates.

Points de vigilance

Le principal piège est de sous-évaluer la classe. Si la valeur avait été de 500 mg/kg (juste en dessous du seuil XA2), un ingénieur prudent pourrait quand même exiger un mortier SR par précaution, surtout si les analyses sont anciennes ou peu nombreuses.

Points à retenir
  • La classe XA2 est une classe d'agression chimique modérée qui nécessite impérativement un ciment ou un mortier résistant aux sulfates.
Le saviez-vous ?

L'ettringite, la molécule responsable du gonflement, n'est pas "méchante" en soi. C'est même elle qui se forme au tout début de la prise du ciment (ettringite primaire) et qui contribue à sa rigidification ! C'est sa formation "secondaire" (après la prise), dans un matériau déjà durci, qui est pathologique.

FAQ

Il est normal d'avoir des questions.

Résultat Final
La classe d'exposition est XA2.
A vous de jouer

La meilleure façon d'apprendre, c'est de pratiquer ! Quelle serait la classe d'exposition si l'analyse du sol avait révélé une teneur de 4500 mg/kg ?

Mini Fiche Mémo

Synthèse de la Question 1 :

  • Donnée : 2500 mg/kg.

Question 2 : Exigence chimique principale du mortier

Principe

Pour contrer une attaque de classe XA2, le mortier de réparation doit être formulé chimiquement pour "couper" la réaction sulfatique. Comme vu dans les rappels, le C₃A est le "carburant" de la réaction. L'exigence principale est donc de limiter ce carburant.

Mini-Cours

Les ciments et mortiers "SR" (Sulfate Resisting) ou "PM" (Prise Mer) sont spécifiquement conçus avec une faible teneur en C₃A (par exemple < 5% ou < 3% pour les plus résistants). En réduisant le C₃A, on limite drastiquement le potentiel de formation d'ettringite secondaire expansive. La norme EN 1504-3 ne l'impose pas directement mais les fabricants l'indiquent pour ces usages.

Réflexions

Un mortier standard, même R4, utilise souvent un ciment Portland classique (CEM I ou CEM II) qui peut contenir 8% à 10% de C₃A, le rendant totalement vulnérable à une attaque XA2.

Points de vigilance

Ne pas confondre la résistance mécanique (R1, R2, R3, R4) avec la résistance chimique (SR). Un mortier peut être R4 (très résistant mécaniquement) mais ne pas être "SR" (non résistant aux sulfates).

Résultat Final
L'exigence principale est que le mortier soit à faible teneur en Aluminate Tricalcique (C₃A), c'est-à-dire un mortier certifié "SR" (Sulfate Resisting) ou "PM" (Prise Mer).
A vous de jouer

Pour un site XA2, vous avez le choix entre un mortier R3-SR et un mortier R4-Standard. Lequel choisir (entrez 3 ou 4) ?

Mini Fiche Mémo

Synthèse de la Question 2 :

  • Attaque XA (Sulfates) \(\rightarrow\) Réaction avec C₃A.
  • Solution : Mortier Faible en C₃A (SR/PM).

Question 3 : Compatibilité du mortier R4 envisagé

Principe

Cette question consiste simplement à mettre en adéquation les données du problème : le besoin identifié (Q1 & Q2) et la solution proposée (fiche technique de l'énoncé).

Donnée(s)

Nous avons les données suivantes :

  • Besoin identifié : Un mortier résistant aux sulfates (SR) pour une classe XA2.
  • Produit proposé : Mortier R4 avec la mention "Haute résistance aux sulfates (PM/SR)".
Réflexions

La mention "Haute résistance aux sulfates (PM/SR)" sur la fiche technique est la garantie du fabricant que le produit est formulé avec un ciment à basse teneur en C₃A. Il est donc spécifiquement conçu pour résister aux classes d'exposition XA (généralement XA1, XA2 et souvent XA3, selon la fiche technique détaillée). Il est donc parfaitement adapté à notre besoin XA2.

Astuces

PM = Prise Mer. Les ciments pour travaux en mer doivent résister à la fois aux sulfates (SO₄²⁻) et aux chlorures (Cl⁻). Ils sont par définition très résistants chimiquement.

Résultat Final
Oui, le mortier est compatible car sa désignation "SR" (Sulfate Resisting) est spécifiquement conçue pour les classes d'exposition XA, incluant la classe XA2.
A vous de jouer

Si la fiche technique avait seulement indiqué "Mortier R4 - Haute Adhérence", serait-il validé (Entrez 0 pour Non, 1 pour Oui) ?

Mini Fiche Mémo

Synthèse de la Question 3 :

  • Besoin XA2 \(\rightarrow\) Mortier SR.
  • Produit \(\rightarrow\) Mortier SR.
  • Conclusion : Adéquation parfaite.

Question 4 : Risque en cas de mauvais choix de mortier

Principe

Que se passe-t-il si l'on ignore les avertissements et qu'on utilise un mortier R4 standard (avec un ciment Portland normal, potentiellement riche en C₃A) dans notre environnement XA2 ?

Mini-Cours

Le processus pathologique sera le suivant :
1. Les ions sulfates (SO₄²⁻) du sol migrent par capillarité vers le support en béton et l'interface de réparation.
2. Ils pénètrent le mortier de réparation standard (non-SR).
3. Ils réagissent avec le C₃A (abondant dans un ciment standard) et l'eau pour former de l'ettringite secondaire.
4. Cette formation cristalline crée une expansion (gonflement) localisée à l'interface et dans la masse du mortier.

Schéma (Après les calculs)

Ce schéma illustre la pathologie : la création de contraintes expansives à l'interface, menant au décollement.

Schéma de la Pathologie (Décollement)
SOL (SO₄²⁻) Support Béton Réparation (non-SR) Gonflement Décollement
Réflexions

Cette expansion interne génère des contraintes de traction immenses que le mortier ne peut supporter. Il se fissurera de l'intérieur et, plus grave, se décollera de son support, rendant la réparation totalement inutile en quelques années, voire quelques mois.

Résultat Final
Le risque majeur est un décollement de la réparation. L'expansion due à l'ettringite secondaire à l'interface va "pousser" le mortier, le fissurer, et annuler les effets de la réparation structurelle.
A vous de jouer

Le gonflement est-il un phénomène de (Entrez 1 pour Retrait, 2 pour Expansion) ?

Mini Fiche Mémo

Synthèse de la Question 4 :

  • Mortier Standard (C₃A) + Sulfates (XA2) \(\rightarrow\) Ettringite Secondaire \(\rightarrow\) Gonflement \(\rightarrow\) Fissuration + Décollement.

Question 5 : Précautions de préparation du support

Principe

L'application d'un mortier de réparation est une "greffe". La greffe ne prend que si le support (le "patient") est sain et préparé. Même avec le meilleur mortier (SR), si la préparation est mauvaise, la réparation échouera.

Points à retenir

Deux points sont absolument critiques :

  • 1. Assainissement (Piquage) : Il faut enlever (piquer, hydrodémolir) tout le béton existant qui est contaminé, friable, ou non cohésif. On doit retrouver un support "sain", rugueux et mécaniquement résistant. On ne répare pas sur de la "poussière".
  • 2. Humidification (Saturation) : Le support en béton doit être humidifié à saturation (mais non ruisselant) juste avant l'application. S'il est sec, il "boit" l'eau du mortier (phénomène de "grillage"), empêche sa bonne hydratation et détruit l'adhérence à l'interface.
Points de vigilance

Ne pas appliquer sur support sec : C'est la cause N°1 d'échec d'adhérence. Ne pas laisser de parties friables : La réparation tiendra sur la partie friable, qui elle-même se détachera du support sain.

FAQ

...

Résultat Final
1. Piquage du support pour enlever toutes les parties friables/contaminées. 2. Humidification à saturation du support avant application.
A vous de jouer

Si un support "boit" l'eau du mortier, on appelle cela le... (Entrez 1 pour Grillage, 2 pour Bullage)

Mini Fiche Mémo

Synthèse de la Question 5 :

  • Préparation = Piquer (support sain) + Mouiller (support saturé).

Outil Interactif : Simulateur de Risque Sulfatique

Testez l'impact de la teneur en sulfates et du choix du ciment (teneur en C₃A) sur le risque de dégradation et la classe d'exposition.

Paramètres d'Entrée
2500 mg/kg
8 %
Résultats Clés
Classe d'Exposition (EN 206) -
Risque de Dégradation -

Quiz Final : Testez vos connaissances

1. Une teneur en sulfates de 1500 mg/kg dans le sol correspond à :

2. Quel composant du ciment est le principal "carburant" de la réaction sulfatique ?

3. La formation d'ettringite secondaire dans le matériau durci provoque :

4. Un ciment "SR" (Sulfate Resisting) a une teneur :

5. Quelle norme européenne définit les classes d'exposition (XA, XC,...) ?


Glossaire

Ettringite (secondaire)
Composé chimique (sulfoaluminate de calcium hydraté) qui se forme lorsque les ions sulfates réagissent avec les aluminates (C₃A) du ciment. Sa formation après la prise du béton provoque un gonflement et des fissures.
C₃A (Aluminate Tricalcique)
L'une des quatre phases principales du clinker (le "cœur" du ciment). Il est responsable de la prise rapide mais est très réactif aux sulfates.
Classe d'exposition (XA)
Classification de l'agressivité chimique des sulfates sur le béton, selon la norme EN 206 (XA1, XA2, XA3).
EN 1504-3
Norme européenne spécifiant les exigences pour les mortiers de réparation structurale (comme les mortiers R3 et R4).
EN 206
Norme européenne pour la spécification, la performance, la production et la conformité des bétons.
Vérification de la Compatibilité Chimique (Sulfates) d'un Mortier de Réparation

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